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Crise Scolaire: Les élèves, Seuls Perdants Des Dégâts Collatéraux De Cet Imbroglio

Crise Scolaire: Les élèves, Seuls Perdants Des Dégâts Collatéraux De Cet Imbroglio

Comme toutes les décennies passées, l’école sénégalaise a encore renoué avec les perturbations depuis hier. De l’élémentaire en passant par le moyen secondaire jusqu’au supérieur, le calendrier scolaire sera rythmé de débrayages et mouvements de grève des syndicats d’enseignants. Ce face à face entre un État politicien qui ne respecte jamais ses engagements et des enseignants peu consciencieux, a des goûts d’un dilemme cornélien pour les éternels perdants que sont les élèves. L’éducation n’est pas une priorité pour l’État. Le manque de vocation a gangrené le corps enseignant. Quel imbroglio!

Avec les politiques d’ajustements structurels des années 90, les institutions financières comme le FMI et la Banque Mondiale avaient imposé des économies drastiques aux états du Tiers Monde. Parmi les domaines ciblés, l’éducation figurait en bonne place. Le recrutement fut arrêté, les instituts de formation des enseignants comme l’école normale supérieure fermés pour longtemps. Un mal sans précédent dont l’éducation nationale ne se relèvera jamais. À la place d’enseignants chevronnés, l’éducation deviendra le réceptacle de tous les cartouchards et autres déboussolés du système, c’est l’ère du volontariat et du vacatariat.

Alors, des milliers d’éducateurs sont affectés dans les classes sans une formation pédagogique de base initiale. Avec les effectifs pléthoriques engendrés par la non construction d’écoles, des systèmes comme les classes multigrades ou le double flux apparaissent, baissant ainsi le niveau déjà faible des élèves. Les abris provisoires foisonnent même dans les zones urbaines, plaçant ainsi les enseignants et les élèves dans des conditions d’études draconiennes voir moyenâgeuses.

Des problèmes de carrière et d’avancement méconnus jusqu’alors surviennent. Des enseignants à qui l’État demandaient des diplômes profesionnels comme le CEAP ou le CAP pour l’élémentaire, le CAEM ou le CAES pour le moyen secondaire, pour intégrer la fonction publique, attendent des décennies sans voir le bout du tunnel. L’avancement automatique est stoppé net. D’année en année, l’ardoise des rappels d’intégration et de validation s’accumule et croit atteignant même des dizaines de milliards, malgré les 40% du budget, que l’État dit verser chaque année dans le secteur.

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En plus de la précarisation du métier d’enseignant, la prolifération des écoles privées vient empirer un système qui était au bord de l’abîme. Même les gouvernants semblent se donner le mot, l’exemple le plus patent est celui du ministre de l’éducation nationale Serigne Mbaye Thiam qui n’a pas hésité à envoyer son enfant à l’école Yavuz Selim. Un acte ignoble qui met la lumière sur l’état d’esprit du patron des enseignants et ceux de nos décideurs, qui n’ont pas confiance à notre système éducatif, car ils connaissant les tares et manquements qui le gangrènent et dont ils sont en grande partie responsable. Pourtant Paul Kagame du Rwanda envoie ses enfants dans les écoles publiques de son pays.

Voyant le rejet grandissant de l’école publique, les enseignants qui sont l’un des principaux acteurs de cette décadence, profitent cyniquement de l’opportunité. Ils réaménagent ou cessent même les cours du public pour ouvrir des écoles à quelques encablures de nos instituts publics, devenants des » chasseurs de primes » par excellence. Ils multiplient les heures perdues mais se plaignent des coupures opérées sur leurs salaires. Où allons nous ?

Finalement, ce sont les élèves et leurs parents qui ont le plus à perdre. Le quantum horaire est sérieusement entamé. Le niveau des potaches dégringole chaque jour, les diplômes sénégalais sont sous cotés selon les standards internationaux. Les résultats enregistrés dans les examens, ces dernières années, et les difficultés linguistiques titanesques auxquelles sont confrontés les étudiants qu’on voit s’exprimer sur nos médias sont assez d’éléments édifiants.

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Babacar Touré

Enseignant, journaliste

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