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Réchauffement Du Front Social : Vous Avez Dit Maîtres-chanteurs ? 

Quand un commentateur politique a rappelé il y a quelques semaines « qu’à la veille de chaque élection, on note une floraison de conflits sociaux », il ne pensait peut-être pas qu’il allait donner le coup d’envoi à un lynchage en règle contre tous ceux qui dans ce pays ont des choses à revendiquer; à réclamer en direction de l’Etat, des autorités dont ils dépendent. Des accords signés pour certains depuis quelques années, et dont ils réclament l’effectivité. Depuis quand cela est-il devenu un chantage pour ne pas dire un crime ?

Il ne s’agit pas de la parole donnée, dont on sait ce qu’elle vaut dans ce pays depuis le reniement du premier d’entre nous à propos d’un mandat à réduire. Oui, on sait ce que vaut la parole de ceux qui, pour obtenir le suffrage des citoyens, promettent souvent n’importe quoi la main sur le cœur. Non, ici, il est question d’accords paraphés par des responsables politiques et syndicaux avec tams-tams et louanges de laudateurs de tous bords. Ces accords ont permis, ici ou là, de sauver une année scolaire, universitaire, ou encore à ralentir la lente agonie de notre système de santé.

Mais depuis que l’éclaireur a donné le signal du lynchage, la meute des courtisans et autres haut-parleurs de la galaxie beige-marron s’en donne à cœur joie avec une haine qui n’a d’égale que la peur qui l’a sous-tend : voir le second mandat emporté par les vagues sociales incandescentes qui lèchent chaque jour les fondations du «Macky».

On brûle ces « antipatriotes » d’enseignants qui privilégient leurs basses revendications « à l’avenir de nos enfants ». Comme si ces derniers n’avaient pas d’enfants dans les écoles, collèges et facs ! Comme si ces médecins, sages-femmes, infirmiers n’avaient pas dans nos hôpitaux-mouroirs des parents, amis et connaissances malades ! Pourtant, c’est un secret de polichinelle : ceux qui crient au patriotisme et autres supposées valeurs, n’ont pas, en général, leurs enfants dans les écoles de la République. Ils sont à l’étranger ou dans le privé. Quand ils tombent malades, ils sont évacués dans les pays où les services de santé sont vraiment des « services de santé » et non des lieux de mort certaine.

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Mais comme tout le monde n’est pas un va-t-en-guerre obtus, en même temps qu’on laisse les fous du gouvernement appeler à la mort de ces paresseux « qui passent tout leur temps à faire grève » on négocie au plus haut lieu : à la Primature, voire la Présidence. À se demander à quoi servent les ministres puisque tout le monde veut discuter avec le Premier ministre ou le président de la République ? Faites des économies en virant ceux qui ne peuvent pas assumer leurs rôles, pour lequel ils sont censés être payés : résoudre les problèmes des secteurs à eux confiés. Parce que c’est quand même extraordinaire et grave ce déficit de confiance envers les autorités directes. Si ces ministres et autres autorités ne servent à rien, n’ont plus la confiance de leurs administrés, pourquoi continuer à les supporter comme des boulets budgétivores ?

Oui tout le monde n’a pas que la bave anti-travailleur à la bouche et des œillères aux yeux. J’ai entendu le ministre, Mary Tew Niane, refuser, malgré l’insistance d’un journaliste, de reprendre à son compte les propos insultants du ministre-conseiller, chef de cabinet du président. C’est quand même, un ancien recteur, un professeur, mathématicien de surcroît. Il sait, contrairement au baveux, ce que parler veut dire. J’ai aussi entendu des enseignants de l’Apr, dire leur gêne face au nom respect des accords signés qui justifient la surchauffe du monde syndical. Ils sont dans leurs petits souliers quand ils entendent leurs ministres baver sur leurs collègues.

Parce qu’eux, tous ces pères de famille qui battent tous les jours le macadam, ne sont pas assis à la droite, tout près, de Dieu-le-président. Ils savent ce que c’est que les fins de mois casse-tête et autres crédits récurrents. Ils jonglent. Pour survivre avec le« xar matt », devenu leur principal gilet de survie. Ils sont des pères de famille et, ensuite, des militants. Le distinguo s’impose à eux par nécessité. Ce n’est pas parce qu’ils se taisent qu’ils sont d’accord avec le non-respect des accords par « le gouvernement de leur parti ». Parce qu’ils savent que « deuxième mandat-bi », dépend d’un front social apaisé et non une cocotte-minute surchauffée par des bureaucrates planqués dans leurs bureaux, qu’ils croient être des bunkers imprenables.

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À force de vouloir s’asseoir sur le labeur et la dignité d’hommes et de femmes, qui se battent pour survivre, on creuse inexorablement la tombe politique du régime qu’on croit défendre. Parce que messieurs les « emergentistes », les hommes et les femmes qui réclament qu’on respecte les engagements pris, lors des négociations ou de campagnes électorales, ceux et celles qui réclament le droit à disposer de l’eau, de routes, de l’électricité, de la fin des abris provisoires, ceux-là ne peuvent pas être des maîtres chanteurs. Des milliers, voire des millions de maîtres chanteurs dans ce pays ? Alors changeons le pays puisque nous ne pouvons objectivement pas changer de pays.

Rappelez vous maître, « un pays de tous, un pays pour tous ».

 

Demba Ndiaye

dndiaye@

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