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Dakar, Capitale Moyenâgeuse…

Nous souhaitons tous croire aux incantations vantant quotidiennement notre Plan Sénégal Emergent qui doit propulser notre pays aux cimes du développement. Mais, à regarder et surtout subir certains désordres homologués par nos habitudes et nos accoutumances coupables, nous désespérons d’atteindre ce but ambitieux. Comment comprendre que notre administration puisse tolérer, puisqu’elle l’organise, les véhicules à traction animale et surtout humaine ? Il est surréaliste de voir des hommes en plein centre-ville tracter avec leur seule musculature des tonnes de marchandises sous le soleil du mois d’août, suant et ahanant comme des bêtes de somme, pour des sommes dérisoires. Pour un Sénégal qui se veut émergent, ces scènes rappelant l’esclavage devraient être bannies, mais elles se déroulent dans l’indifférence la plus totale d’un peuple qui accepte sans sourciller que certains puissent être pris pour des animaux. Ces images sont moyenâgeuses.

Mais il y a aussi un phénomène qui prend de l’ampleur et qui pose souci du fait de son officialisation administrative, c’est celui des calèches. Nous voyons en pleine ville, au cœur d’une circulation déjà bien embouteillée, de plus en plus de cochers déguisés en Ben Hur ruraux, conduire leurs calèches et se mêler au trafic urbain sans sourciller, sur les grandes avenues, voire sur la VDN ou l’autoroute et même au péage de celui-ci et y faire la queue. Pour quel tarif ? C’est bien la question.

Ces véhicules n’ont ni cartes grises, ni assurances, ni freins autres que l’instinct du cheval à éviter un obstacle, et pourtant causent accidents et désagréments souvent graves. Ils ont pourtant des permis de circuler et même des panneaux de signalisation leur interdisant d’emprunter telle ou telle artère. C’est bien donc que leur statut est officiellement pris en compte par nos administrations, à commencer par le ministère de l’Elevage qui en a fait un segment de sa politique de vaccination. Que se passe-t-il lors d’un accident avec un charretier qui emboutit notre véhicule ? Eh bien, on vous rétorque qu’il faut laisser ce brave homme faire son « taxalé », et gagner sa pitance quotidienne, et lui, penaud, vous balance sa demande de clémence par un surréaliste « Ma ngi diégeulou »…

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Mais, tant que ça nous sert à emporter nos poubelles et remplir nos boutiques de proximité, nous nous en accommodons lâchement. Et surtout nous n’éprouvons aucune compassion pour ces chevaux qui traînent parfois une tonne à la force de leur harnais, accélérés par leurs cochers de quelques coups de fouets bien sentis.

Et on ne se demande même pas pourquoi nos prières au Bon Dieu ne sont pas exaucées, alors qu’on maltraite autant une bête aussi sacrée que Le Cheval, qui a eu le privilège de faire monter Le Prophète au Ciel. Au nom d’Al Bourakh au moins, cela devrait nous révolter.

 

Jean Pierre Corréa

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