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Le Rôle De L’acteur Culturel Pour Le Développement Du Tourisme National : Contribution Introductive : Les Articulations Possibles Entre Tourisme Et Culture

Le Rôle De L’acteur Culturel Pour Le Développement Du Tourisme National : Contribution Introductive : Les Articulations Possibles Entre Tourisme Et Culture

La problématique

La problématique soulevée doit pouvoir nous permettre de poser et de répondre à la double équation d’une mise en culture du tourisme et d’une manière symétrique, d’une mise en tourisme de la culture dans une synchronisation temporelle et territoriale. Nous pouvons, dès lors, nous accorder sur les diligences à mettre en œuvre pour faire émerger dans les pratiques professionnelles le couple «tourisme-culture» articulé, productif et performant pour l’économie nationale.

Par conséquent, si on se situe par exemple au niveau de la production touristique et de la consommation culturelle, il s’agira de satisfaire le besoin de redonner au touriste et à l’excursionniste d’un jour «la place qu’il mérite, de le considérer comme un public, prendre sa propre culture en considération et de l’initier à des cultures différentes».

Comment alors définir les articulations possibles entre les politiques touristiques, découlant des pratiques observées, et les politiques culturelles, en vue de l’élaboration d’une stratégie globale pour améliorer les connexions entre le tourisme et la culture ?

Le couple tourisme-culture s’inscrit aussi bien dans les pratiques touristiques que dans celles culturelles. Il n’est pas inutile de répéter, à la suite de nombreux chercheurs et auteurs, que d’une part, la culture devient une des motivations porteuses du voyage et du déplacement et matière première des opérateurs de tourisme, d’autre part, le tourisme est un moment privilégié de l’apprentissage culturel : il joue un puissant effet de levier sur le développement de la culture et la rénovation du patrimoine culturel d’une ville, d’une région, d’un pays.

Réalités conceptuelles du couple : «tourisme-culture»

Cependant, on devrait questionner la réalité de ce couple «tourisme-culture» en s’interrogeant sur les possibles articulations entre les deux «secteurs». Certains chercheurs comme le français Robert Lancquar pensent que les convergences ne sont possibles que sur le plan fonctionnel et des domaines de convergence peuvent ainsi être identifiés.

Pour R. Petrella, économiste italien, la convergence entre tourisme et culture est réalisée quand la maturité des technologies qui ne concerne pas seulement le globe, mais aussi le local, les villes, et qui se mondialise, le changement d’échelle des échanges et des images sont à un niveau élevé. Pour lui, «c’est là que se joue la qualité de la culture, lorsque les technologies sont utilisées par l’homme, lorsque les activités touristiques deviennent culture».

Avancées stratégiques et institutionnelles du couple : «tourisme-culture»

Repères au plan mondial

Dès 1960, c’est-à-dire dès les indépendances, le sociologue Edgar Morin avertissait avec son célèbre aphorisme : «Valeur des vacances, vacances des valeurs». Et ce n’est que plus tard en 1975 que l’Unesco, appuyé par la Banque mondiale, publie un rapport sur les effets du tourisme sur les valeurs socioculturelles.

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Très récemment, les 4,5,6 février 2015 à Siem Reap au Cambodge, une Conférence mondiale de l’Omt et de l’Unesco sur le tourisme et la culture a réuni pour la première fois les ministres du Tourisme et de la Culture avec plus de 900 participants, au nombre desquels plus de 45 ministres et vice-ministres du Tourisme et de la Culture, des experts internationaux, orateurs et invités en provenance de 100 pays dans le but d’explorer et de promouvoir de nouveaux modèles de partenariat entre le tourisme et la culture.

Une date importante marquant une réelle prise de conscience des leaders mondiaux sur la nécessité de bien cerner dans les politiques publiques la problématique née d’une ouverture touristique des pays sous-développés avec une maîtrise des effets négatifs sur les territoires visités.

Profitant de cette tribune inédite, Taleb Rifai, secrétaire général de l’Omt, a déclaré : «Le patrimoine culturel raconte l’histoire de l’humanité ; il raconte notre histoire. S’il est judicieusement géré, le tourisme peut protéger et revitaliser ce patrimoine, ouvrir de nouveaux débouchés pour les communautés locales et favoriser la tolérance et le respect entre les Peuples et les Nations.»

Pour Irina Bokova, directrice générale de l’Unesco, «chaque touriste doit être un gardien du patrimoine mondial, un ambassadeur du dialogue interculturel. C’est pourquoi la sauvegarde du patrimoine culturel doit avancer de pair avec le tourisme durable».

Elle poursuit : «Cette vision des choses guide nos efforts pour promouvoir la culture comme moteur et comme catalyseur du développement durable. Cela n’a jamais été aussi important qu’en cette époque de changements, alors que les pays sont en train de façonner un nouveau programme de développement durable à l’échelle mondiale pour l’après-2015».

Repères au plan national

Le Sénégal a expérimenté vers les années 2012-2015 l’approche «Grappe», en mettant en place la grappe «Ticaa» (Tourisme, industries culturelles, artisanat d’art) au sein de la Stratégie de croissance accélérée, (Sca) et dès l’accession à la Magistrature suprême du Président Macky Sall, institué un ministère du Tourisme et de la culture.

Peut-on, toutefois, considérer que le couple «tourisme-culture» s’est formé et bien formé ?

Certes le Pse opère pour les deux secteurs une transversalité de certains programmes et réformes, mais une lecture des différents plans stratégiques et lettres de politique sectorielle nous montre une convergence pas du tout recherchée et visible.

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Dans la politique touristique telle que retracée par les documents stratégiques du ministère en charge de ce secteur (Lps 2005 et Plan stratégique (2014-2018)), on constate que toute la dynamique culturelle n’est perçue qu’à travers le prisme du tourisme culturel qui paraît un peu réducteur, mais qui a tout de même le mérite d’exister.

Par contre, dans la politique culturelle retracée dans le pré-rapport de la Lpsc du 30 Déc. 2015, il n’existe pas de références stratégiques ni opérationnelles qui concernent l’activité touristique. Même pour ce qui est de l’axe consacré à la valorisation du patrimoine matériel.

Et pourtant, l’articulation sectorielle au moins institutionnelle remonte très longtemps au Sénégal. Elle existait déjà à l’époque coloniale. Selon Hamady Bocoum et Ber­nard Tou­lier dans le livre La fabrication du patrimoine : l’exemple de Gorée (Sénégal), en 1926, le Guide du tourisme en Afrique occidentale française fut élaboré et au cours des années 1930, l’agence économique de l’Afrique occidentale française (Aof) procède à la mise en valeur touristique des territoires coloniaux et un syndicat d’initiative et de tourisme de l’Aof est installé à Dakar. En 1936, la revue à grand tirage L’Illustration consacre un numéro spécial à «L’œuvre de la France en Afrique occidentale», avec un supplément sur le tourisme. La même année, Air-France inaugure une ligne aérienne vers Dakar.

Intérêts mutuels manifestes

Les tendances mondiales du tourisme montrent bien une forte préférence des touristes à visiter des destinations qui offrent un tourisme à haute teneur culturelle. Notre pays possède un riche patrimoine culturel, mais insuffisamment intégré dans le produit touristique.

Ce qui a pour conséquence une altération de son attractivité et son corollaire, la fréquentation de la destination qui, quelles que soient les statistiques actuelles, demeure très en-deçà de ses réelles potentialités.

La destination en est une «majeure» de la région ouest africaine et à cet égard devrait, outre des préoccupations de fréquentation, de revenus tirés de l’activité, des emplois créés, encore pouvoir contribuer à donner une image d’un pays qui compte se positionner valablement au rayon de la multiculturalité en apportant sa diversité culturelle.

D’un autre côté, le patrimoine culturel, pour être sauvegardé et souvent restauré, a besoin régulièrement de moyens techniques et financiers qui sont rarement suffisants, malgré les énormes efforts de l’Etat.

On sait que la valorisation du patrimoine culturel passe, entre autres, par une «mise en tourisme» « impactante». Ce qui est valable pour la Tour Eiffel en France, qui est la première source de recettes touristiques, devrait sans doute l’être pour le Monu­ment de la Renaissance Africaine au Sénégal.

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Au demeurant, notre pays est largement doté d’infrastructures culturelles et touristiques d’envergure mondiale qui peinent à avoir un niveau de fréquentation à la dimension de leur standing, faute de notoriété et de visibilité autant dans le marketing touristique que culturel.

Le Sénégal doit relever ses ambitions attribuées aux deux secteurs articulés pour les mettre, au moins, en adéquation avec ses potentialités réelles et leur permettre de jouer pleinement leurs rôles dans le cadre du Pse, afin de contribuer à l’atteinte des objectifs d’émergence.

Solutions existantes

Nous percevons des solutions à notre portée qui existent et pourront être très rapidement mises en œuvre. Nous en préconisons quelques-unes qui nous paraissent plus urgentes et «impactantes».

Il s’agira certainement de renforcer l’articulation recherchée dans les orientations stratégiques contenues dans les documents de politique économique nationale (Pse), sectorielle (ministères et agences), interprofessionnelle (organisations professionnelles privées, société civile).

Il serait également utile de mettre en place et de structurer une plateforme opérationnelle autour des acteurs publics (agences et directions nationales, collectivités locales) et d’acteurs privés (organisations patronales, partenaires,…). La plateforme sera dotée de plan d’actions et d’outils techniques et de marketing/communication et devra assurer la cohérence d’ensemble pour promouvoir la destination Sénégal. Elle pourra mener des actions de marketing, assurer la visibilité de la destination et aider à intégrer les produits culturels dans les produits touristiques pour créer des routes culturelles et touristiques.

Les outils dont elle pourra disposer peuvent être un site web, un agenda culturel et touristique national, un agenda des évènements à l’étranger, etc.

En outre, il urge de revitaliser les syndicats d’initiative et organisations régionales de tourisme pour que chaque territoire culturel et touristique puisse avoir un levier d’animation et une vitrine. Ces entités organisées avec les collectivités locales peuvent être les relais au niveau local de la plateforme nationale.

Enfin, il est attendu de l’Agence sénégalaise pour la promotion du tourisme (l’Aspt) de jouer un rôle central dans la nouvelle dynamique ici préconisée.

Brahim SAKHO

Directeur du Pôle Traitements au Fongip

Ex-Coordinateur de la Grappe «Tourisme, industries culturelles,

artisanat d’art- Ticaa» de la Stratégie de croissance Accélérée (Sca- Primature)

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