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Lettre Ouverte Au Président De La République, Président De L’alliance Pour La République

Adresse d’un militant à son mentor Monsieur le Président,

Je vous écris ces lignes en public, car je n’ai pas eu l’occasion, malgré toutes les tentatives, de vous les dire en privé.

Permettez-moi tout d’abord de vous féliciter pour tout ce que vous avez entrepris pour le Sénégal durant ces six années de gestion du pouvoir.

De 2008 à 2012, le climat social du pays était très tendu et nous avons combattu avec véhémence les coupures intempestives d’électricité, dénoncé la gestion «gabégique» des biens publics, la cherté des denrées de première nécessité dont les prix ne cessaient d’accroître, le manque d’emploi des jeunes, le fameux projet de dévolution monarchique du pouvoir, etc. De nos jours, beaucoup d’efforts ont été fournis et cet ardu combat de la population est devenu un vieux souvenir. Le monde rural est bien en émergence, avec le branchement des villages du Diéri et du Walo en électricité. Barga, mon village natal, dans le département de Matam, en est un exemple. La construction des forages et des pistes de production a permis de désenclaver lesdits villages. Certaines familles bénéficient des bourses familiales, même si ce n’est pas suffisant.

Cependant, nous n’avons pas pu faire de Matam le grenier du Sénégal en matière d’’autosuffisance alimentaire. Lors du Conseil des ministres décentralisé à Matam, parlant au nom des jeunes de la commune de Dabia, je vous avais dit qu’il suffisait d’aménager les terres et de maîtriser l’eau pour que Matam constitue à elle seule le grenier du Sénégal en matière d’autosuffisance alimentaire. Avec la verte Casamance et les potentialités du Sine et du Saloum, nous pouvons atteindre l’autosuffisance alimentaire tant chantée et pour tous les produits que nous consommons. J’y crois fortement, mais des efforts allant en ce sens ne sont pas consentis. Nous avons massivement adhéré et reproduit votre slogan du «Consommons ce que nous produisons et produisons ce que nous consommons», mais le marché extérieur continue à influer sur nos produits locaux.

Les Domaines agricoles communautaires (Dac) de Matam sont lancés depuis deux ans et jusqu’à nos jours, ils peinent à se réaliser. Même pas 10 m2 aménagés pour ce qui devrait employer des milliers de jeunes de la région. La Couverture maladie universelle ne se ressent pas, faute de communication. La jeunesse est désorientée et le chômage s’accroît, faute de moyens des rares agences décentralisées.

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La construction de la route NDioum-Ourossogui-Bakel a été appréciée et bien accueillie par les populations, sauf qu’elle se réalise à pas de caméléon et certainement le délai de «18 mois seulement» ne sera pas respecté. Nos ressources, notre latérite, sont exploitées sans retour d’investissement sur les populations. Les populations de cette zone nord doivent encore patienter deux ans ou un an et demi pour emprunter ces tronçons. L’accélération de ces travaux serait bénéfique pour nous et pour vous qui l’aviez promis.

Monsieur le président de l’Alliance pour la République, notre parti est en lambeaux et son avenir est sombre. Pour l’attester, partons d’un postulat simple. La majorité des responsables politiques du département de Matam ne sont pas des Apéristes, mais plutôt des Mackystes. Les soi-disant responsables politiques étant des «businessman», donc à la recherche du profit. Ils sont de plus en plus riches et les populations de plus en plus pauvres. Ce qui veut dire qu’après vos deux mandats inch’Allah, ils quitteront le parti, laissant derrière eux des militants désœuvrés et désorientés, ou bien les transformer en béni oui oui ou en moutons de panurge, à la merci des miettes d’argent distribuées à tort et à travers.

Conséquence : votre base affective restera sur sa faim.

A la place de la structuration verticale, vous avez préféré celle horizontale. Difficile de savoir qui est qui et qui fait quoi. Nous sommes devenus une Armée mexicaine à la merci des mobilisations et des votes massifs. Où sont passés les fameux comités jadis implantés dans les coins et recoins du pays entre 2008 et 2012 ? Que sont devenues les Unités de vigilance opérationnelles (Uvo) qui nous avaient servi à surveiller et à sécuriser les élections en 2012 ? Que sont devenus les animateurs et commissaires desdits comités et Uvo ? Quel est le rôle de l’école du parti, si celle-ci existe encore ? Où sont la dignité et la solidarité tant chantées dans le parti ? Je donne ma langue au chat.

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Toujours sur ce volet politique, je constate la grande manœuvre de la promotion des transhumants au détriment de vaillants militants de première base de l’Apr. Je pense à ces hommes et femmes courageux qui avaient tout laissé pour soutenir votre candidature depuis Dekkal ngor. Des jeunes et des étudiants ont été tabassés, ligotés et même emprisonnés (c’est mon cas) pour leur engagement derrière vous. Si récompense du mérite existe en politique, ces gens devraient être récompensés. Mais ce qui est frustrant et agaçant dans tout cela, c’est qu’on les écarte, les isole et pis, on les écrase au profit des adversaires d’hier. J’avoue que l’opération soustraction n’existe pas en politique, qu’il faut accumuler les voix, mieux, les multiplier, mais s’il faut additionner pour écarter ceux qui étaient là, nous risquons de périr, car + 1- 2= -1. Le régime de Wade que vous maîtrisez bien ne dira pas le contraire.

Au moment où des politiciens en perte de vitesse, nostalgiques du pouvoir, affamés et à la recherche des prairies marron sont adoubés, les hommes politiques dignes, déterminés, fidèles et loyaux sont jusque-là laissés en rade. Attention au retour du bâton !

Pour cette première correspondance publique, je me réserve de citer des noms des transhumants promus qui avaient l’insulte et l’arrogance à la bouche, ceux qui arguaient que Macky ne serait jamais Président. Je suis persuadé que ce n’est pas ceux-là qui vont défendre votre reluisant bilan, encore moins vous faire gagner les élections. Ils ne connaissent pas les fondements de votre projet politique, mais aussi et surtout ne maîtrisent pas les idéaux du parti. Ils sont venus pour leur propre intérêt et non celui des citoyens. Je le dis et l’assume.

Monsieur le Président

A la veille de l’élection de 2012, certains d’entre nous vous ont surnommé le «Obama de l’Afrique» grâce à la stratégie de campagne que vous aviez initiée à l’image de celle de l’ancien Président des Usa. Il ne s’agissait point de l’organisation des meetings politiques, car vous disiez qu’«ils n’étaient pas efficaces et nous faisaient gaspiller de l’argent». Nous avions ainsi adopté la politique de proximité et de l’écoute du pouls du citoyen lamda. Nous gardons encore les notes de cette formation en politique de proximité et d’approche des populations. Oui, ç’était efficace, mais ce que je constate, c’est le retour des meetings avec des cars de mobilisation, ce qui ne nous permet pas de connaître réellement le potentiel électoral que nous avons.

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Cela me rappelle exactement le crépuscule du régime de Wade. Il s’était lourdement trompé par les fortes mobilisations à coups de 5 000 F par jeune. Le résultat, nous le savons… Le réveil a été brutal. Je ne le souhaite pas pour vous.

C’est pourquoi j’ai pris l’initiative de tirer la sonnette d’alarme, parce que je considère que je suis bien placé pour dire tout haut ce que tous pensent tout bas, pour le bien-être d’un cher parti que nous avons vu naître.

Je reviendrai Inch’Allah, dans la prochaine lettre ouverte, sur : de la défaillance des structures du parti, de la timidité de la Cojer à la désorientation d’un Mouvement des élèves et étudiants républicains (Meer) fort, de l’inertie du Réseau des enseignants républicains à la désertion de la Convergence des cadres républicains (Ccr), de la défaillance du Mouvement des femmes à l’inexistence du Réseau des sages, etc.

Monsieur le Président, je termine par cette citation que vous nous avez enseignée et qui résonne encore dans notre esprit : «Je demeure convaincu que l’engagement politique peut bien s’accommoder de l’éthique, de la loyauté et de la morale.» Ajouter pour vous paraphraser que ceux qui voudront nous faire renier notre dignité, nous leur dirons non, avec en bandoulière l’éthique et les valeurs.

Construire un nouveau Sénégal est notre projet

La vérité est notre patrie

Sincères salutations

Harouna Demba SECK

Apr Matam

ronechoe@hotmail.fr

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