Est-ce son amour pour la lutte ou sa volonté d’imbiber davantage le peuple de l’opium du sport ? L’eau n’est pas revenue, Auchan n’est pas en passe de partir, mais l’arène nationale est ouverte. Une priorité de Macky Sall qui a couté 34 milliards de FCFA pour ne pas trainer. Le leader de l’APR pense probablement que la présidentielle de 2019 va se jouer au milieu des sacs de sable. Et que Karim Wade et Khalifa Sall n’entendant même pas le son des tambours, il pourrait se taper une sortie dominicale et venir facilement à bout de ces poids plumes encore inconnus des masses populaires.
Le petit Kirikou a réussi à ramener l’eau au village. Pas comme Macky Sall et ses collaborateurs qui avaient promis de ramener l’eau dans la capitale le 20 juillet 2018. La réalité des faits, celle que vivent les Sénégalais au quotidien, différente du scénario de Michel Ocelot qui est semblable à celui du ministre Amadou Ba, renseigne de la persistance de l’image de ces femmes haletantes courant toujours derrière des citernes vides.
Il est facile de distiller des statistiques farfelues que les Sénégalais, de manière générale, ne peuvent vérifier. Mais lorsque la question a trait au train-train quotidien des populations, point d’échappatoire. C’est comme annoncer le retour de l’électricité à un tailleur dont l’impatience est à la mesure de la grande commande sur la table. Il pourrait croire que le bateau transportant le fuel devant permettre à la Senelec de produire l’énergie a été abordé par des pirates mais pas que le courant est de retour dans son atelier ténébreux. Comprenant qu’il allait encore être pris à son propre jeu, le gouvernement a pris les devants avant que les Sénégalais ne constatent eux-mêmes cet autre engagement du régime qui part en fumée. Mansour Faye, ce ministre, qui tient sa puissance des colas d’un mariage, a replongé le Sénégal dans le siècle dernier. Le 19 juillet, à la veille de l’échéance, il vient annoncer non pas la fin de la pénurie d’eau, mais l’amélioration d’une situation catastrophique. D’ailleurs, qui pour croire aux engagements de Macky Sall ?
Il n’est plus question de jauger le leader de l’APR à l’aune des engagements qu’il avait solennellement pris. « Ma première mission n’est pas de construire des routes, autoroutes et ponts, mais de reconstruire l’Etat de droit… » et patati et patata. Tout cela a fondu comme du beurre exposé aux rayons du soleil au zénith. Il n’est même plus question de rappeler la durée de son mandat ou le bienheureux accueil qu’il accorde aux transhumants ou encore la partition des justiciables en deux. Ce qui est devenu plus inquiétant, c’est son incapacité manifeste à apporter une solution à certains besoins primaires des populations. Depuis 2014, les Dakarois se plaignent régulièrement des pénuries d’eau.
C’est ce même régime de Macky Sall peinant à étancher la soif des populations qui a englouti plus de trente milliards dans la construction d’une arène nationale inaugurée ce dimanche. De tous les projets de l’Etat, c’est le seul qui n’a pas traîné. De ce qui n’était qu’une idée en 2014, les autorités en ont fait une priorité absolue. En effet, en visite en Chine au mois de février 2014, Macky Sall, affichant un gigantesque et inhabituel sourire, annonçait, à sa sortie d’audience avec Xi Jinping : « le président chinois a pris une décision importante dans le cadre de la visite, en octroyant un don de 8 milliards et un prêt sans intérêt de 16 milliards. Le tout devant constituer les sommes nécessaires pour la construction de l’arène nationale de lutte ». Comment est-on arrivé à 34 milliards, Macky Sall ne l’a pas dit quand le président chinois lui a remis les clefs de l’ouvrage. Tout comme il n’a pas dit ce que les Chinois prennent en contrepartie. Seule constance, il a tout fait pour que la banlieue ait son arène dite nationale.
La coopération sino-sénégalaise est à l’image de celle que le Sénégal entretient avec les autres puissances. Pendant que les Chinois s’intéressent aux secteurs vitaux de l’économie nationale, le Sénégal fixe ses priorités, après le Grand Théâtre, sur une arène nationale. Depuis qu’il est à la tête de l’Etat, le Sénégal se fait avoir sur presque tous les accords. Le partage des ressources entre la Mauritanie et le Sénégal a été fait selon le bon vouloir de Mouhamed Abdel Aziz qui a aussi imposé sa volonté aux pêcheurs saint-louisiens. Avec les autres chefs d’Etat, Macky Sall est loin d’être le dur à cuire qu’il incarne. Devant le président turc Erdogan, il n’assume pas son choix d’avoir nommé plus de 50 ministres. Face à Macron, la vérité est sortie de la bouche d’une enfant. Même pour se débarrasser de ce voisin impétueux et provocateur, il a fallu engager la CEDEAO.
C’est ce même Macky Sall qui agit en vrai dictateur, traitant les acteurs politiques selon leur alignement. L’affaire Prodac tourne autour de 29 milliards qui seraient partis en fumée des caisses de l’Etat qui est beaucoup plus préoccupé par les 1 milliard 800 millions de la Ville de Dakar. Karim Wade est gracié mais risque de retourner en prison s’il revient pour briguer le suffrage des Sénégalais. Tout ce qui avait permis au candidat arrivé de nulle part qu’il a été en 2012, Macky Sall est en train de le torpiller. Et pour y arriver, il est prêt à faire dire autre chose que ce qui est enseigné à la Faculté de droit de l’Université de Dakar et à réduire au silence ses plus tenaces adversaires. « A vaincre sans péril on triomphe sans gloire ». Une citation qui ne sonne vrai qu’aux oreilles des honorables.
Mame Birame Wathie