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Ces Sondages Fantastiquement Irréalistes

Depuis, un certain temps, à quelques mois des présidentielles, l’on constate, çà et là dans l’espace politico-médiatique des sondages. Et ces sondages, sont utilisés par l’opposition et le pouvoir pour prétendre à une victoire prochaine.

Il est impératif de faire une critique scientifique de ces différents sondages. Pour cela, rigoureusement, il nous faut revenir aux fondamentaux et exigences d’un bon sondage.

C’est quoi un sondage ?

Un sondage est une méthode statistique visant à évaluer les proportions de différentes caractéristiques d’une population à partir de l’étude d’une partie seulement de cette population, appelée échantillon.

En statistique, un échantillon est un ensemble d’individus représentatifs d’une population.

La représentativité est une notion statistique qui caractérise la relation entre un échantillon et la population représentée. La notion de représentativité est d’abord issue des réflexions sur la démocratie représentative.

Dans ce sillage, s’il faut faire un sondage politique, il est nécessaire de tenir compte de plusieurs critères.

Représentativité de l’électorat sénégalais

Tout d’abord la représentativité d’un échantillon à la population électorale du Sénégal, s’appuie selon une analyse du fichier électoral sur ces critères-ci :

Ø La taille de l’échantillon

n : t² x p x (1-p)/m²

[(n: taille de l’échantillon minimale, p :proportion, t: intervalle de confiance (95% ou 1,96), m: marge d’erreur (5%)]

Ce nombre qui se calcule comme indiqué ci-dessus est :

· pour la population électorale (6 682 075) : 375

· pour le nombre de votants (3 337 494) : 257

Prendre la population électorale, permettrait d’avoir un nombre plus important. Mais parmi ces répondants il n’y aurait aucune distinction entre le potentiel électeur et un non électeur. Bien que cela n’est pas de grande incidence sur l’étude ;

Il serait préférable d’énumérer d’abord à travers des questions échelonnées, si la personne est un électeur d’abord (détenteur d’une carte d’identité biométrique et inscrit dans le fichier électoral). Ou bien de pousser plus loin en ajoutant dans les critères d’éligibilité d’un répondant le fait d’être « votant des élections législatives passées ».

Ø Les zones électorales

Pour le travail de terrain, il faudra faire les enquêtes, si nécessaire dans toutes les régions du Sénégal. Sinon, il ne faut pas exclure ces régions les plus importantes en terme d’électorat à savoir, Dakar, Thiès, Diourbel,

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Ø La tournure des questions :

Loin d’être le plus connu des critères, mais il demeure un facteur très important de biais, ou de détournement de l’essentiel d’un sondage. Il y’a de ces questions qui peuvent donner des chiffres, mais la tournure induit la réponse systématique du répondant. De ce fait, tout commanditaire peut facilement trouver favorable son sondage lancé, mais pas scientifiquement.

Alors pour les différents sondages à ce jour connus et publiés nous mettrons ces critères susmentionnés pour les exposer à une critique stochastique.

Des sondages irréalistes ?

La plupart des sondages, qui font fureur ces jours-ci ne reflètent aucun réalisme. Car pour la plupart, ce sont justes des chiffres balancés. Et aucune information exhaustive n’est fournie sur la méthodologie.

Tout d’abord, de ma part, j’exclue d’office tout sondage qui s’est fait sur les réseaux sociaux. Loin d’être une vitrine électorale, la population des internautes qui est de 8 701 175 (ansd) en 2017 et 9 600 000 (artp) en 2018 n’est pas représentative de l’électorat. Car aucune étude rigoureuse ne montre cette corrélation. Quand même elle demeure, un bon moyen de jauge de l’opinion intellectuelle et activiste sénégalaise, même de celle médiatique. Car le constat est que les plus prompts à lancer ou participer aux débats politiques sur les réseaux sociaux, sont le plus souvent des intellectuels, des partisans politiques, des activistes, des influenceurs, des leaders d’opinion, des gens de la société civile….

Bien que ce nombre d’internautes soit exorbitant, la réalité politique montre bien que le taux de participation aux votes est beaucoup important chez les adultes et le taux d’abstention plus important chez les jeunes, et ces derniers sont les plus connectés à internet.

Alors pour plus de crédibilité, les sondages les plus susceptibles d’être scientifiquement acceptables, sont ceux exécutés sur le terrain.

· Le sondage du cabinet d’étude malaisien « Royal institution of serveyors Malaisia » [1]

Cette étude réalisée au mois de Mai 2018, donne 38,57% des intentions de

Vote au Président Macky, et l’opposition se répartit le reste comme suit : Karim Wade 17,34%, Samuel Sarr 12,69%, Malick Gackou 11,5%, Idrissa Seck 9,31%, et Ousmane Sonko 2,27%.

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Venant à la méthodologie, on voit bien que l’échantillon qui est de 1861 personnes inscrites sur les listes électorales, est supérieur à l’échantillon minimal requis ; et celles-ci sont choisies selon ces critères qu’ils ont bien cité : « sexe, âge, profession de l’individu, région administrative, taille d’unité urbaine ……500 personnes ont été interrogées en ligne quotidiennement ».

D’après l’exhaustivité de la restitution des résultats, l’on voit que l’étude est en soi très importante. Mais la seule réserve est le fait que cette enquête soit menée en ligne, comme ils l’ont mentionné ci-haut. Et nullement, il n’est indiqué sur quelles plateformes cette enquête s’est faite ? Par quelle pertinence la situation professionnelle figure dans les critères ? Et la troisième place occupée ici par Samuel Sarr, est-elle rigoureuse, bien qu’étant parmi les candidats à la candidature, rien ne nous montre ses activités politiques dans l’espace médiatique ? A-t-il un électorat caché ?

· Le Sondage de Sunuvote [2]

Ce sondage lancé au moins d’Août, donne à Ousmane Sonko 21% et 14% à Macky Sall, Idrissa Seck 13,1%, Karim Wade 10,1%, Khalifa Sall 9,1%…au premier tour.

Tout d’abord le fait que ce sondage de 11 502 participants s’est passé sur le web est encore un problème. En plus la question clef est très ambiguë (« Quel est selon vous le meilleur président pour le Sénégal ?»). Il n’est en aucun mentionné une intention de vote. En plus il est souligné une erreur stochastique intolérable à savoir le fait que la marge d’erreur soit de 2% et l’intervalle de confiance de 95%. Bien que l’objectif soit pertinent, cette étude ne regorge d’aucune rigueur scientifique.

· Le sondage cité par le Président Macky Sall [3]

Il est cité et repris par les médias et internautes que le Président Macky aurait dit que : « Le sondage m’attribue 54% et je veux plus… »

Scientifiquement on ne se base pas sur une parole subjective d’une seule personne. Ensuite « le » article indéfini, nous ferait douter de cette déclaration. Pourquoi le dudit sondage n’est pas nommément cité par son excellence ? Etait-ce un coup médiatique d’influence de vote ?

· Le sondage de ISEO [4]

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Ce sondage de 15 000 sénégalais, qui s’aurait fait sur un peu partout sur le territoire sénégalais en 7 jours avec 38 enquêteurs, ce qui fait 56 répondants par enquêteur et par jour. Ceci n’est possible que si le questionnaire n’est pas trop long. D’après les recherches aucune information de validation ou d’infirmation de ce sondage n’est facile à avoir. Mais la rigueur de Moubarak Lô ferait que cette étude répondrait surement aux normes scientifiques. Le seul hic est, pourquoi les résultats de cette étude ne sont pas accessibles. Serait-elle commanditée et gardée secrètement ? Est-elle défavorable au pouvoir, serait-ce parceque, d’après les médias 57% de la plus importante zone électorale (Dakar) est défavorable au Président ainsi que Touba et Mbacké (dans la troisième plus importante zone) ?

Surement, il y’en a d’autres sondages et il y’en aura encore. Quoi qu’il en soit aucun sondage parmi ceux qui sont déjà sur l’espace publique ne sont rigoureux dans la méthodologie et dans la scientificité. Le plus souvent ce sont des coups médiatiques des différents candidats à la présidentielle pour tenter de persuader la population de leur illusoire victoire.

Retenons que le meilleur sondage actuellement est le parrainage. Bien que tout parrain n’est pas forcément un votant d’un candidat donné ; Cependant vu la manière dont il se passe actuellement sur le terrain, il est le préliminaire ou les « phases éliminatoires » des présidentielles. A son issue, en tout cas pour les opposants, l’électorat de chacun est bien établi. Par contre pour le pouvoir, avec cette méthode d’achat de conscience, une marge d’erreur est nécessaire avant de considérer son parrainage à un électorat. En réalité, seul le rapport de force, pourrait changer la donne. Car aucun sondage, quoique réaliste comme le parrainage, ne peut définir la réalité du soir du 24 Février 2019. Car l’intention de vote pourrait changer en fonction des circonstances politiques qui s’enchaîneront surtout durant ces périodes pré-électorales.

Il est vivement conseillé à tout candidat sérieux, afin de gagner les cœurs des sénégalais, d’utiliser stratégiquement les chiffres du fichier électoral et socio-démographiques afin de descendre sur le terrain à leur rencontre.

Papa FALL

Statisticien-Informaticien

pafndio@gmail.com

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