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Sidy, La Mine D’or N’est Plus (par Mouhamadou Drame)

CONTRIBUTION

Il est des gens qui naissent sous de bons hospices, grandissent dans la dignité et meurent dans la gloire. Tel est le cas de l’homme que nous avons récemment confié à la terre pour une vie intermédiaire avant celle éternelle.  Niasse  fut son patronyme, du nom de cette sainte famille qui a la même résonance pour tous les sénégalais même les moins informés chaque fois qu’on l’évoque. « Sidy », son  premier prénom est une déformation de l’arabe « Saïd » ou « seydi » qui signifie « maître, prescripteur ou lieutenant ». « lamine » le second renvoie au « digne de confiance  (Al Amine) », attribut symbolique du caractère de l’envoyé de Dieu du temps même de la jahiliya ou régnait un épicurisme ambiant et sans commune mesure chez les arabes. Sidy, la mine d’or dont le scintillement des pépites et la brillance des lingots irradiaient tout, avait hérité de son homonyme, le prophète Muhammad (SAWS) la noblesse du caractère, la sincérité dans ses rapports à autrui, sa magnanimité quasi proverbiale, son honnêteté en tout et en tous lieux, son courage à fleur de peau, son sens élevé de la République au sens platonicien du terme,  sa foi en un peuple un et indivisible, son mépris pour les vanités de ce bas monde dont il vécut complètement désabusé, sa conviction qu’il n’y a de repos que dans la mort, enfin sa conscience au jour de la vraie rétribution qui fit de lui un forcené du travail ainsi qu’une sentinelle intraitable des justes causes.

Célébrer Sidy Lamine, ce n’est pas, comme le note Bossuet dans l’oraison d’Yolande de MONTERBY, pour accroitre la pompe  du deuil par des plaintes étudiées ni pour satisfaire l’ambition des vivants par de vains éloges du mort, c’est plutôt, dans les derniers devoirs que l’on rend à un mort, en même temps faire contempler aux vivants la condition de tous les mortels et les inciter à travailler pour une mort honorable.

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Sidy est mort, les armes à la main. Que tous les honneurs lui soient rendus !

Heureusement, la nation, unie comme jamais, rend à ce monument difficilement classable et les honneurs et le salut.

Sidy a toujours compris que cette vie n’est qu’un lieu de transit vers une autre, celle-là éternelle ; un champ fécond dans lequel, il faut semer pour la glorieuse immortalité. Oui, il l’avait compris, l’a  toujours compris. Il savait qu’une vie réussie est celle qui est utilement ménagée pour l’éternité non celle parsemée de crimes et de vaines entreprises ; il savait enfin que ce qui ressort de la vie c’est la mort mais que le principe de la vie est éternelle.

Sidy est celui qui a illustré de la plus éloquente des manières la pensée sartrienne selon laquelle « un intellectuel est celui qui se mêle de ce qui ne le regarde pas ».  Nombreux sont ceux qui, comme moi, se sont toujours posés la question de savoir ce qui faisait courir Sidy. Il y’en a même qui, par méconnaissance de l’homme en faisaient un maître-chanteur, un homme inconstant et versatile mais Sidy était tout sauf cela. Il avait de la suite dans les idées et avait choisi librement d’être du côté des faibles quelles que soient par ailleurs leurs convictions et situations sociales. Son organe de presse, qu’il a dirigé avec rigueur et doigté nonobstant toutes les tribulations dont il fit l’objet,  était un mur de lamentation, une tribune libre, en quelque sorte, une « bouche des malheurs qui n’ont point de bouche » pour reprendre un poète bien connu.

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Que dire maintenant de l’intellectuel et du religieux ? Nous pourrions épiloguer pendant longtemps sur ces facettes de l’homme si nous ne voulions pas lasser le lecteur. Il nous faut juste noter que Sidy Lamine était un grand intellectuel formé à la prestigieuse école d’Al AZHAR. Il a légué à la postérité une production scripturale de 10 (dix) ouvrages publiés ainsi qu’une anthologie des écrits de son père le vénéré El hadji Khalifatou Mouhammad NIASS dont des copies ont été apportées à tous les chefs religieux. Sidy lui-même était un chef religieux même s’il ne s’en réclamait jamais.

Voici, en somme, le fils que le Sénégal vient de perdre

Voici la sentinelle de la démocratie que les politiques, le peuple en général a perdue

Voici le défenseur infatigable de la cause palestinienne que le monde arabe a perdu

Voici le patron, manager hors-pair et précurseur de la presse libre que les journalistes ont perdu

Voici le porte-étendard des intellectuels en langue arabe que les arabisants ont perdu

Voici l’ambassadeur de toutes les confréries religieuses et le chantre du dialogue islamo-chrétien que les religions de ce pays ont perdu

Puisse Allah le rétribuer pour ses bonnes œuvres au cœur du paradis de Firdaws dans les allées somptueuses de Hilliyine.

 

 

 

Mouhamadou DRAME

Professeur de lettres au lycée de Bikilane

Journalistemlcolm24@yahoo.fr

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