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L’ua Est Un Frein à L’intégration Africaine

En février 2019 s’est tenue à Yaoundé, au Cameroun, la troisième session du Comité technique spécialisé de l’Union africaine (UA) sur les finances, les affaires monétaires, la planification et l’intégration économiques. Cette instance a opté pour l’entrée en service d’une Banque centrale, d’un Fonds monétaire africain, d’une banque d’investissements et d’une Bourse panafricaine en… 2045 ! 

Le projet d’Union monétaire africaine date en réalité de la réunion à Lagos, en 1980, de la Conférence de l’Organisation de l’unité africaine (OUA, dissoute en 2002 pour laisser place à l’UA). C’était bien avant la mise en route de l’euro.

Son instauration était prévue pour 1990 mais, entre-temps, l’OUA devait avoir créé la Communauté économique africaine (CEA), censée conduire à la levée des barrières douanières, la libre circulation des personnes, la création d’une monnaie technique de référence, comme jadis l’écu pour l’Europe, etc. Lorsque l’échéance est arrivée, les dirigeants de l’OUA repoussèrent la mise en place de la CEA à l’horizon 2025, c’est-à-dire suffisamment loin pour qu’aucun des dirigeants de l’époque ne soit plus aux affaires.

Depuis, cette fuite en avant est devenue la règle de la maison. L’Afrique a été le seul continent à n’avoir réalisé aucun des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) lancés en 2000 par l’ONU sur une programmation de quinze ans, alors que sa dette a été quasiment supprimée à cet effet. Seuls trois pays ont atteint le sous-objectif fondamental de scolarisation de tous les enfants dans l’enseignement primaire.

En 2015, l’ONU a refondu son programme en transformant les OMD en Objectifs du développement durable (ODD), à atteindre en 2030. Tout en s’y engageant, l’UA a arrêté son propre plan baptisé Agenda 2063, repoussant d’autant l’atteinte d’objectifs similaires aux ODD. L’Afrique a donc préféré une nouvelle fois éloigner l’échéance en choisissant une date symbolique – le centenaire de l’OUA – si lointaine qu’elle défie toute projection raisonnable.

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Aucun calendrier pour la Banque centrale

Parler aujourd’hui d’une Banque centrale pour 2045 sans calendrier – pourquoi pas 2029 ou 2048 ? – procède des mêmes échappatoires. La conséquence de cette indolence est le maintien d’une Afrique morcelée qui souffre d’échanger trop peu avec elle-même, bridant son potentiel de développement, exposant ses États à la merci des marchés internationaux et facilitant leur conquête par des nations voraces.

En admettant que dresser un bilan cinquante-six ans après la création de la première organisation politique panafricaine n’est pas prématuré, on peut aisément constater que cette démarche n’a rien apporté à l’intégration continentale. Elle l’a même retardée, tout en maintenant passifs les Africains, faisant illusion quant à cette mission.

Prendre conscience de la nécessité d’en sortir – ou du moins de la contourner – permettrait à tout pays désirant avancer vers des marchés intégrés de tracer leur propre chemin en s’alliant à d’autres volontaires du progrès. Qu’ils soient ses voisins ou non, sur le continent et au-delà, du Brésil à la Norvège en passant par les Bahamas… Peu importe, l’essentiel étant d’avoir un marché plus important, régi par des règles standardisées en matière juridique, économique et politique. Il est peut-être l’heure de rechercher des intégrations 2.0 tenant compte du fait que les continents sont une convention politique et non une contrainte infranchissable.

Si, pour l’UA, l’échéance de 2045 est la réponse au débat sur la sortie du franc CFA, il faut rappeler par ailleurs que cette monnaie commune à quatorze pays africains reste le seul exemple d’intégration africaine qui fonctionne sans faille depuis soixante ans. Le second exemple était Air Afrique, qui a duré quarante ans et dont les multiples tentatives de refondation africaine ont échoué depuis sa liquidation en 2002. Ces coopérations continentales n’ont été rendues possibles que par un concours extérieur. L’UA, bien endormie dans son berceau de l’humanité, continue quant à elle de répondre à toutes les actions collectives qu’il est urgent et nécessaire d’attendre.

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