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Un Premier Frein Au Fast-track ?

Un Premier Frein Au Fast-track ?

Durant sa prestation de serment pour son deuxième mandat, son Excellence M. le président de la République, Macky Sall, déclinant ses ambitions pour son quinquennat disait entre autres : «La réforme de l’administration est la quatrième priorité que je compte mettre en œuvre pour soutenir nos efforts vers l’émergence et le développement. Notre administration, ancienne et rompue à la tâche, est l’épine dorsale de l’Etat. Elle assure la stabilité et la continuité au-delà des changements de gouvernements et de régimes.

Je sais, et je m’en félicite, qu’elle recèle de ressources humaines de qualité dévouées corps et âme à la bonne marche du secteur public. Tout cela est appréciable mais nous pouvons faire mieux… Notre administration devrait épouser les réalités de son temps et s’adapter à ses missions… Or dans bien des cas, trop de routine, trop de lenteurs, trop de formalités indues continuent d’altérer l’efficacité du service public et la compétitivité de notre économie.

Dans la nouvelle dynamique que je compte imprimer a la conduite des affaires publiques, j’ai la ferme intention d’inscrire  toutes les actions de l’Etat en mode fast track.»

Pour satisfaire les requêtes des populations la commande publique est le levier économique le plus stratégique pour un gouvernement. Son importance au Sénégal est révélée par sa montée en puissance durant cette décennie, passant de 500 milliards de francs CA en 2007  à près de 2400 milliards de francs Cfa en 2018. Avec les ressources attendues de l’exploitation du gaz et du pétrole la commande publique dépassera la barre des 3000 milliards dès 2022, d’où la nécessité d’avoir un Code des marchés publics efficient tout en étant garant de la transparence avec les meilleures pratiques de gestion et en restant en harmonie avec le dispositif communautaire dans l’espace UEMOA.

La dernière réforme du Code des marchés publics ayant abouti au code actuel adopté par décret N°2014-1212 du 22 septembre 2014. Celui-ci consacre près de trois décennies de réformes à la fois intenses et avant-gardistes dans la passation de marchés. Parmi les experts qui comme moi ont connu et travaillé sous les directives du Code 82-690 du 7 septembre 1982, nous ne pouvons que saluer le génie sénégalais dans ce domaine comme le soulignait le Président Macky  Sall («Une administration qui recèle de ressources humaines de qualité dévouées corps et âme a la bonne marche du service public»).

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De ce fait l’actuel Code des marchés publics  dispose de beaucoup d’acquis susceptibles d’améliorer  la commande publique entres autres : le relèvement de divers seuils de passation et de soumission, l’amélioration des exigibilités de garanties de soumission, l’introduction de la Drp, l’introduction de l’Offre spontanée pour les projets innovants, la modification des délais d’approbation, la réactualisation des délais de transmission des plans de passation de marchés, l’allotissement, la marge de préférence, divers avantages accordés aux Pme, les accords-cadres, décentralisation de la prise de décision, le recours gracieux, l’extension des régimes dérogatoires, etc.

Cependant à l’aune d’une «Société 3.0», toute numérique, ou les exploits et acquis d’aujourd’hui relèveront demain de l’antiquité, il est tout à fait légitime de nous interroger sur l’efficacité, voire l’efficience, de la commande publique. D’autant plus que certains critères économiques de suivi-évaluation  méritent réflexion. Il s’agit, par exemple, du taux d’absorption des crédits publics ainsi que les durées d’exécution des projets de l’Etat.

Toutes les données disponibles agrégées au niveau des agences, sociétés nationales et ministères montrent une relative faiblesse du taux d’absorption des crédits budgétaires, en moyenne entre 30 et 75%; et l’extrême lenteur dans la réalisation des projets publics dépassant souvent une moyenne de 30 mois, entre le début des consultations et la livraison des ouvrages aux populations.

En toute évidence le Code des marchés publics n’est pas la seule cause, mais  pour beaucoup d’acteurs il demeure le premier responsable de cette situation qui impacte négativement la compétitivité économique du Sénégal.

Devons-nous rester statiques et nous contenter des acquis de l’actuel code au risque d’être taxés de nombrilisme ? Ou devons-nous avoir le courage et la volonté de constater scientifiquement les faits pour nous interroger et anticiper sur l’avenir ?

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Le Président Macky Sall, en démarrant son quinquennat, a choisi la voie des réformes des actions publiques pour aller vite et bien dans l’intérêt des populations, c’est le mode «fast track».

En traduction simple et accessible ce terme se résume à l’accélération des procédures pour avoir des résultats positifs au service des populations, donc il peut s’appliquer à tous les domaines : santé, justice, agriculture, impôts-domaines, urbanisme, contrats étatiques, prise de décision stratégique, etc.

Depuis 2017 la Banque Mondiale teste ce mode fast track au Sénégal  dans le cadre du projet relatif à la modernisation du service public au niveau du ministère de l’Urbanisme, dans le cadre du traitement des demandes de lotissement. La Délégation à l’entreprenariat rapide (DER) est un exemple de réussite du mode fast track dans sa prise de décision de financement des Startup de l’économie numérique.

Par ailleurs des expériences concrètes de réussite existent depuis plus d’une décennie dans des pays comme le Burundi et le Kenya.

En première analyse empirique des critères de suivi-évaluation des programmes publics, il parait évident que pour aller vite et bien il faudra une réforme inclusive et rapide du processus de passation de marchés ceci pour satisfaire les demandes pressantes des populations  dans l’eau, l’électricité, les transports, la santé, l’agriculture, l’élevage, et les infrastructures en général.

Avec cette nouvelle ère des quinquennats le temps d’un président de la République est plus que compté; il s’agit de présenter un bilan au bout de seulement 60 mois.    

Cette contribution n’a pas l’ambition de trouver une solution à ce dilemme cornélien, «fast track présidentiel et commande publique», mais plutôt de proposer des pistes de réflexion pour engager un dialogue fécond, urgent et décisif sur cette équation à plusieurs inconnues, nonobstant qu’une réforme des codes est en cours au niveau communautaire.

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Pour réussir ce challenge du fast track présidentiel dans la satisfaction des besoins des populations les pistes suivantes de réflexion  pourront être explorées :

– participation active du secteur privé national à la réforme de la commande publique;

– évaluation des acquis et faiblesses du Pudc pour mieux intégrer certains de ses mécanismes dans un nouveau processus de la commande publique;  

– participation de la société civile;

– participation des partenaires techniques et financiers ;

– redéfinition du rôle et des missions des spécialistes en passation de marché et des agents comptables particuliers au niveau des autorités contractantes ;

– participation des corps de contrôle et des cabinets d’évaluation des marchés publics ;

– participation des représentants des populations bénéficiaires et des collectivités locales,

– rationalisation des organes de la commande publique en synergie avec les divers organes de contrôle Comité PPP et ARMP,

– redynamisation du comité Ad hoc BOS/ARMP en redéfinissant les missions et les membres,

– faire un bilan  et l’analyse des modes dérogatoires,

– redonner beaucoup plus d’importance aux Ntic, ainsi qu’aux acteurs nationaux de l’économie numérique, dans le processus de la commande publique, par l’adoption dans les textes d’une préférence nationale dans la digitalisation et la dématérialisation des processus publics.

Ces pistes de réflexion associées à d’autres, émanant des divers acteurs  pourront servir de base de travail pour constituer un cahier de charges cernant les contours de ce challenge, «fast track présidentiel et commande publique», qui ambitionne de solutionner vite et bien les multiples attentes des populations sénégalaises.

Modibo Diop est ingénieur polytechnicien, ancien Auditeur du CEDS de Paris, expert/Consultant International en Infrastructures, Energie, Eau et Ntic, Vice-Président du Mouvement des entreprises du Sénégal MEDS







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