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La Solitude Du Pouvoir

A n’en point douter, il est le point de convergence de partis politiques emblématiques aux leaders à la personnalité fort charismatique, qui explique que toute confiance entre eux était impossible avant. Et pour cause ! Chacun d’eux voulait le pouvoir et s’estimait assez puissant pour ne pas verser dans quelque logique de coalition. «De si précieux alliés» donc, renchérit le magazine Jeune Afrique du mois de février dernier ! Des alliés, oui ! Et pourtant, le Président donne l’impression d’être seul. Trop seul même, depuis sa dernière élection à la Présidentielle de cette année. Et pour cause ! Que de réformes dont l’objectif non-avoué justifie cette solitude du pouvoir ! 

La plus marquée reste incontestablement celle qui a conduit à la suppression du poste de Premier ministre. Ainsi, tout laisse croire que le Président, dans la lutte permanente que représente la vie politique, veut être le seul détenteur de la décision. Et si toute responsabilité lui incombe, forcément le contrat social est miné de l’intérieur par cette intrusion du «faux pacte» que Jean-Jacques Rousseau évoquait comme menace qui plane dans la sphère de la souveraineté. L’autre décision que le Président pourrait prendre, et qui déjà fait bondir quelques opposants ainsi que la Société civile, pourrait être le report éventuel des élections locales. En l’état actuel des choses, si comme nous l’évoquions dans notre dernière chronique, le Président semble avoir entendu les «pulsions du Peuple», force lui revient alors d’avoir constaté que dans des groupes sociaux hétérogènes, une forme de souffrance particulière accompagne toujours le spectacle de ce qui est perçu comme injuste. Le M23 en 2012 a porté ce message qui avait sonné comme un désaveu du prince de l’époque, Me Abdoulaye Wade qui, en agitant le vote du «Ticket présidentiel» pour baliser le chemin de la Présidence à son fils, avait perdu de vue cette remarque de Nicolas Machiavel qui stipule que «les peuples oublient moins vite la perte de leur patrimoine que la mort de leur père».

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Ainsi, l’hypothèse d’une compétence de la psyché humaine à poser comme insoutenable ce qui est perçu comme injuste n’a jamais été négligée par les études de sciences politiques, ce, même si le pouvoir revêt une dimension sacrée qui l’inscrit assez souvent dans une malédiction nécessaire. Que le prince en souffre ou pas, la solitude est là qui accompagne son règne. Et sa façon de réagir face à cette solitude écarte de plus en plus la pertinence d’un dialogue avec l’opposition. Cette solitude est-elle liée à la fonction ? A priori non, puisque ce qui fonde la souveraineté, c’est la recherche du meilleur-vivre ensemble au sein d’une instance qui reconnaisse les droits et devoirs de chaque membre de la société, pour le triomphe du bien commun.

Toutefois, reconnaissons que le prince a renforcé cette solitude par un type de fonctionnement qui nous paraît aisément monarchique, à l’exemple du magistère de la 5ème République française. Et pourtant, ce deuxième mandat de Macky Sall pouvait être vécu de manière assez relax si on sait que ses décisions engagent déjà ceux qui travaillent depuis 2012 avec lui. Donc, il n’est menacé par aucun concurrent potentiel, s’il est avéré qu’il ne se représentera pas pour un autre mandat. Mais, tout laisse croire que le Président est habité par un personnage évoluant dans une sorte de psychose qui l’isole volontairement en lui faisant percevoir comme une menace toute posture d’autorité légitime.

«La République c’est moi», tel semble être le viatique du Prince qui oublie, en ces temps de crise, d’incarner une autorité morale dans ce paysage en recomposition que nous vivons. Et le dialogue aurait pu permettre l’affirmation de cette incarnation, permettant au Président de faire amende honorable en reconnaissant qu’il est de sa responsabilité d’être capable d’avoir avec tout le monde des débats de fond pour voir si toute la classe politique peut s’accorder. Au lieu de cela, la propension du Président à se mettre en scène et à jouer «perso» laisse voir qu’il ne compte sur personne à part lui-même. Ce qui prouve que le rideau sur l’écran n’est pas encore tombé, si on se rappelle le film au scénario signé Philippe Besson, du réalisateur Josée Dayan, «La solitude du pouvoir», relatant la journée d’un chef d’Etat à l’emploi du temps chargé, devant dénouer les crises politiques, contenir la colère populaire et supporter la pression des journalistes et les attaques de l’opposition.

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