Le fait est assez rare pour être souligné dans l’univers mythique des marchés financiers sous nos cieux. L’émission d’obligation de type « diaspora bonds », par appel public à l’épargne, dénommé « Bhs 6,25 % 2019-2024 », de la Banque de l’habitat du Sénégal, à la Bourse régionale des valeurs mobilières (Brvm) serait, certainement, l’un des faits saillants sur la place boursière de l’Union économique et monétaire africaine (Uemoa) pour l’année 2019.
Il s’agit d’une opportunité de placement offrant une rémunération de 6,25 % par an sur une durée de cinq ans. Le remboursement du capital sera graduel avec deux ans de différé et les intérêts seront payés semestriellement. Les souscriptions à cette émission sont ouvertes à tous les investisseurs, institutionnels et personnes physiques, résidents ou non dans l’espace Uemoa. En effet, depuis le démarrage de ses activités, le 16 septembre 1998, notre marché a enregistré, pour la première fois, une opération du genre, autorisée par le Conseil régional de l’épargne publique et des marchés financiers (Crepmf).
A l’image des autres bourses du monde telles que New York stock exchange (Nyse) et Nasdaq aux Etats-Unis, Bourse de Casa (Maroc), Tokyo (Japon), la Brvm nous habituait traditionnellement à ses deux types d’activités phares : la cotation des entreprises et l’émission de titres publics comme les obligations souvent émises par les Etats et autres institutions à la recherche de ressources longues. Notre marché financier, commun à l’ensemble des huit pays de l’Uemoa (Benin, Burkina Faso, Cote d’Ivoire, Guinée-Bissau, Mali, Niger, Sénégal et Togo), s’est lancé, ces dernières années, dans un vaste chantier d’innovations avec une diversification dans son offre de produits. C’est dans cette optique que l’on pourrait inscrire l’opération que vient de lancer la Bhs consistant à rechercher 20 milliards de F Cfa auprès, notamment, de la diaspora. Cette présente émission obligataire offre au Sénégal le privilège d’être le premier pays de l’Afrique francophone à avoir effectué une telle opération.
Laboratoire d’expérimentation, le Sénégal a été, en 2014, le premier Etat membre de l’Union à émettre un emprunt obligataire « Sukuk » d’un montant de 100 milliards de FCfa avant de conduire une second émission en 2016 pour 200 milliards. Toutes ces innovations apportent une touche nouvelle à la Brvm dans ses opérations de mobilisation de fonds et créent un environnement attractif pour les investisseurs détenteurs de capitaux. Elles offrent, en outre, la possibilité aux Etats de diversifier leurs sources de financement au sein du marché financier régional de l’Uemoa qui, aujourd’hui, constitue un modèle réussi d’intégration financière et de bourse unique appartenant à plusieurs pays.
Dans un contexte où un nombre important d’investisseurs se réfugient derrière le compartiment des obligations au détriment de celui des actions, le marché financier régional a encore besoin de solutions nouvelles et innovantes pour diversifier davantage ses offres à tous les acteurs intervenant dans la chaîne. Elle devra également faire face à la faible culture boursière au sein des populations et donner plus de confiances aux investisseurs.