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Des Lois À Application Variable

Le samedi 4 mai dernier, l’Assemblée nationale a voté, en mode fast track, pour reprendre le slogan en vogue, la loi supprimant le poste de Premier ministre. Dix jours plus tard, le chef de l’Etat la promulguait. C’est acté, plus de Premier ministre dans notre ordonnancement institutionnel. La rapidité avec laquelle ce texte a été adopté, promulgué et automatiquement appliqué, appelle un constat : au Sénégal, c’est à croire que seules les lois à caractère politique connaissent une application immédiate. Vous en doutez ?

L’exemple cité supra ne vous convainc pas ? Elargissons le focus, remontons un peu le temps et citons pêle-mêle : Loi sur le parrainage, Loi sur la parité, « Loi Sada Ndiaye », « Loi Ezzan »… Quant aux textes législatifs censés impacter directement le quotidien des Sénégalais, certains finissent dans les tiroirs de l’oubli, d’autres peuvent rester de longs mois sans être promulgués et pour ceux qui le sont, leur application laisse à désirer.

Trois exemples pour étayer nos propos : Loi sur le sachet plastique, Loi sur la baisse des loyers, loi sur le tabac. Qui, au Sénégal, se rappelle encore qu’il y a une loi interdisant la production, l’importation, la détention, la distribution et l’utilisation de sachets plastiques légers ? Cette mesure prise en 2015 a, pour l’instant, pour seul mérite, d’avoir placé le Sénégal dans le cercle des pays de la sous-région, ayant interdit le sachet plastique. Grossir notre corpus législatif, sinon, pour le reste, elle ne nous a servi à rien. Les sachets plastiques continuent de coloniser arbustes et feuilles d’arbre, de s’accrocher aux fils électriques, de joncher nos rues, de polluer durablement les sols de culture. Comme si cette loi n’avait jamais existé !

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A ce sujet, la Mauritanie voisine nous dame le pion. L’usage du sachet plastique y est prohibé. Et c’est donc fort étonnée qu’une consœur mauritanienne de passage à Dakar s’est vu remettre un sachet après un achat dans une boutique. « Vous utilisez encore des sachets plastiques chez vous ? », s’est-elle demandé. « Pourtant nous avons une loi qui l’interdit et qui prévoit même des sanctions pécuniaires et une peine d’emprisonnement contre les contrevenants », lui répondis-je. Et la loi sur la baisse des loyers en janvier 2014, qui s’en souvient ?

Hélas, l’enthousiasme et le soulagement suscités par l’adoption de ce texte n’auront duré que le temps d’une rose. Cinq ans après son entrée en vigueur, cette mesure non seulement n’est plus respectée, mais pire, elle cause plus de problèmes aux locataires qu’elle n’en leur enlève. Le loyer n’a jamais été aussi cher au Sénégal. De nombreux bailleurs n’en font qu’à leur tête, usant et abusant de subterfuges pour contourner cette loi. Et dire que la mesure de baisse, du reste très salutaire, avait pour ambition de rétablir l’énorme fracture sociale longtemps causée par une spéculation sauvage entraînant une hausse vertigineuse des prix du loyer. Et que dire de la loi sur le tabac ? Votée en mars 2014, les décrets d’application n’ont été publiés qu’en juillet 2018, soit plus de quatre ans après son adoption.

Aux termes de l’article 18 de ladite loi, « il est interdit de fumer dans les lieux publics ou ouverts au public, ou à usage collectif et tout lieu qui constitue un lieu de travail, ainsi que dans les moyens de transport public ». Sont notamment visés les couloirs, les ascenseurs, les cages d’escaliers, les halls d’entrée, les cafeterias, les toilettes, les salons, les salles de repas, etc.

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Le propriétaire ou toute autre personne responsable des lieux visés à l’article 18 a l’obligation d’afficher, de manière visible et lisible à l’entrée, à l’intérieur et dans d’autres lieux appropriés, la signalétique « Interdiction de fumer » ou « Zone nonfumeur », de retirer tous les cendriers existant dans l’établissement. Combien sont-ils ces établissements qui respectent à la lettre ces mesures ? C’est à croire que la Loi sur le tabac est partie en fumée







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