Le 11 septembre 2001, déjouant les défenses anti-aériennes les plus formidables du monde, des pirates de l’air ont détourné des avions pour frapper le World Trade center, le cœur du système économique des Etats-Unis, ainsi que le Pentagone. Les premiers moments de stupeur passés, on s’est demandé comment un pays aussi puissant, avec son dense réseau de radars de surveillance, son aviation militaire et ses missiles, pouvait-il être atteint aussi facilement. La puissance militaire ne prémunirait-elle donc plus contre les attaques terroristes ?
Assurément non, car les moyens asymétriques utilisés par les terroristes échappent souvent au contrôle des Etats. La nature des actes et le comportement des terroristes sont très divers et imprévisibles. Depuis cette attaque contre l’Amérique, plusieurs autres pays puissants (France, Angleterre, Russie…) ont été touchés. Les moyens militaires classiques sont donc peu efficaces dans la lutte anti-terroriste.
A quoi peut servir un avion, un canon ou un missile contre un individu bourré d’explosifs et qui se dissimule dans la foule ? Rien du tout. A priori donc, tous les Etats, quels qu’ils soient, sont vulnérables face au terrorisme. Dans la guerre en Syrie, les plus puissantes armées du monde (Etats-Unis, Russie, France, Iran, Grande Bretagne…) essaient, depuis 2013, de débarrasser le pays des groupes terroristes islamistes (soutenus par des Etats) qui l’ont attaqué pour faire tomber le régime. Malgré leurs moyens colossaux et sophistiqués, elles n’ont pas, jusqu’à présent, réussi à les éradiquer. Les terroristes se cachent dans la population s’ils ne la prennent pas comme bouclier contre les attaques aériennes et les tirs d’artillerie. Même si les Américains ont annoncé, en mars dernier, avoir vaincu Daech en Syrie après la prise de Baghouz par les Forces démocratiques syriennes (Fds), on sait qu’il s’agissait de s’approprier, prématurément, une victoire sur ce mouvement par rapport aux Russes avec lesquels ils semblent être en compétition. Mais dans la réalité, l’hydre est loin d’être morte.
D’autres conflits similaires, comme en Somalie, en Irak ou en Afghanistan, ont montré la capacité des groupes terroristes à résister aux assauts des armées classiques. On se rappelle encore les corps des soldats américains tués et trainés dans les rues de Mogadiscio par les Shebab et le départ précipité de l’armée américaine de Somalie. En avril 1983, un attentat meurtrier revendiqué par le Hezbollah contre l’ambassade américaine à Beyrouth fit une soixantaine de morts. Six mois plus tard, en octobre de la même année, un camion bourré d’explosifs provoque un carnage au quartier général des troupes américaines causant 241 morts majoritairement des marines. Quelques minutes plus tard, un autre immeuble abritant des soldats français sera soufflé par une explosion, faisant 58 morts. Même si les moyens militaires ne peuvent être exclus de la lutte anti-terroriste, les spécialistes sont maintenant d’accord que la méthode la plus efficace est celle qui allie le renseignement technologique, celui humain par l’infiltration, les échanges d’informations entre services de renseignement et la formation de forces spéciales rompues aux différentes techniques d’attaque et de protection. Ces terroristes, acculés un peu partout dans les différents pays susmentionnés, se sont déversés dans notre région à la faveur du renversement du guide libyen Mouamar Khadafi. Ils savent que la faiblesse des moyens de la plupart de nos Etats et l’immensité des territoires à surveiller leur garantissent une grande liberté de mouvement. Voilà maintenant, plus de six ans qu’ils y commettent des attaques un peu partout du Nigéria au Niger, en passant par le Mali et le Burkina Faso… sans qu’une solution soit trouvée contre leurs agissements. Plus grave encore, les terroristes s’attaquent au ciment qui fonde la cohésion de ces pays à savoir l’entente entre les ethnies et les religions.
Le G5 Sahel constitué depuis 2014 par le Mali, le Burkina Faso, le Niger, la Mauritanie et le Tchad, pour faire face aux djihadistes, est handicapé, dès le départ, par la non-intégration de pays « importants » et par son manque de moyens qui confine son action à la confidentialité. Quant aux Casques bleus présents au Mali, leur mobilité insuffisante limite leur efficacité. Les forces occidentales (françaises, américaines…) venues à la « rescousse » se sont révélées incapables d’éradiquer les terroristes malgré leurs moyens parmi lesquels des drones de combat. Pire, leur jeu trouble donne l’impression aux populations qu’elles ne sont pas venues pour combattre les terroristes mais pour occuper le Sahel.