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Regard Sur Les Nouvelles Séries Sénégalaises (par Moussa Seck)

Regard Sur Les Nouvelles Séries Sénégalaises (par Moussa Seck)

Le personnage que tout le monde adule existe bel et bien. Mais, l’idéal d’homme ou de femme qu’il incarne ne se rencontre pas tous les jours, ou ne se rencontre seulement pas. Ce gentleman tout en muscles, galant, attentionné n’est dans le petit écran que parce que les inventeurs de séries savent que c’est le type d’homme sur lequel fantasment les jeunes filles. De même, cette femme au regard surréel, à la démarche féérique sur qui les cadreurs font de beaux zooms n’a de place dans la série que parce qu’on sait qu’elle est le fantasme des jeunes hommes. De ce fait, les séries sont peuplées de gros muscles et de belles faces, ceci, dans la perspective de satisfaire l’œil du spectateur. Cela semble de bonne guerre, c’est une question de spectacle.  Cependant, de là peut être soulevée la question suivante : que reste-t-il d’un acteur, si les exigences du public le réduisent à ses muscles ou à ses hanches ?

A vrai dire, nos nouvelles séries sont criminelles, et ce qu’elles assassinent, c’est l’essence même qui devait les faire : le jeu d’acteurs. L’actorat n’est apparemment plus une question de talent. Il serait plutôt devenu l’affaire de petits bourgeois qui savent s’exprimer dans un français acceptable, habillé par des roulements de « R ». Ce serait, plutôt, l’apanage de personnages à qui la Nature a offert des formes généreuses et une suave voix. Et, les acteurs, les vrais, qui sentent la flamme artistique brûler au fond d’eux ? Qu’ils aillent chercher ailleurs, s’ils ne savent captiver l’attention des spectatrices ! Qu’ils aillent chercher ailleurs, si elles n’ont pas assez de beauté pour faire saliver les spectateurs ! Quelque part, ils sont récupérables, s’ils acceptent les seconds rôles. Mais, en tout état de cause, les premiers rôles appartiennent à cette petite bourgeoisie pour qui les séries ne sont que…des séries, et non des œuvres d’Art. Ce n’est pas pour rien que le théâtre, la scène telle que la pratiquait Douta Seck, n’existe plus. La raison est simple à expliquer : le Sénégal manque cruellement d’artistes. On a, chez nous, beaucoup de profitards (des étudiants des universités privées quelques fois…parce qu’ils sont charmants, parce qu’elles sont belles) qui tuent l’Art à petit feu.

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Mais, le physique seulement ne suffit pas. Il faut savoir parler ou, pour rester dans le vocabulaire : il faut aussi  savoir dialoguer. Et, on n’a pas besoin d’un profond entendement pour se rendre compte de la pauvreté en dialogues de nos nouvelles séries. Comment donc remédier à ce manque ? La vulgarité ! Des répliques vulgaires, des phrases creuses, dont la pauvreté se réfugie derrière le mirage d’une pédanterie que suppléent des béquilles comme « bah », « voilà », « en fait », sans oublier le « R » roulé à excès. Cette pauvreté des dialogues est la partie saillante d’un problème tout aussi sérieux que celui de l’actorat : celle de l’écriture. N’a-t-on pas, chez nous, vu des séries qui n’ont pas de fin ? Lorsque l’écrivant on n’a pas d’idée claire sur son déroulement, la série ne peut être que confuse. Confuse, jusqu’à ennuyer. Peut-être, qu’aussi, il est intentionnel de les faire durer, puisqu’à chaque fois, il y a les sponsors et les publicités qui font entrer beaucoup d’argent.

Et, en ce sens, nos séries n’ont pas besoin de vrais artistes, d’un vrai actorat. Elles n’ont besoin que d’individus assez présentables pour répondre aux fantasmes du public, tout en vendant les produits des sponsors. On le voit, d’ailleurs. Dans plus d’une scène, les acteurs se transforment en commerciaux, au lieu de rester dans leur rôle originel. A-t-on des séries ou des vitrines de commerce, alors ?

La question mérite d’être posée dans ce sens, et dans un autre sens. Cet autre sens, c’est celui de l’infidélité des cadres de tournage par rapport à la réalité du pays. A bien regarder ces lieux, on est emmené à s’interroger, à se demander si le Sénégal se limite à Dakar, si la corniche, quelque immeubles et quelques maisons bien carrelées et bien fournies en matériel résument Dakar à leur tour. Est-ce étonnant, du moment où les séries sénégalaises sont l’affaire de petits bourgeois ?

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MOUSSA SECK, étudiant au CESTI

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