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Enfin L’état Se Départ De Sa Faiblesse

Une nouvelle société va remplacer la Sénégalaise des eaux (Sde), dont le contrat d’affermage est arrivé à expiration. Les travailleurs revendiquent que la totalité des 10% des parts du capital de la future société bénéficiaire de la concession de gestion et de distribution des eaux en zone urbaine et périurbaine soit réservée aux travailleurs de l’ex-Sde, alors que le gouvernement voudrait donner quelque 3% de cette part de capital aux autres travailleurs de la Société nationale des eaux du Sénégal Sones) et de l’Office national d’assainissement du Sénégal (Onas). Les travailleurs de la Sde ne l’entendent pas de cette oreille et ont déclenché une grève dont les conséquences avaient commencé à être durement ressenties par les populations. A l’issue d’une ultime séance de négociations infructueuses vendredi dernier, le gouvernement a décidé d’utiliser la manière forte, en procédant à la réquisition des travailleurs grévistes, afin d’assurer la continuité du service public de la fourniture et de la distribution de l’eau. On peut encore épiloguer, en attendant une éventuelle décision du juge administratif, sur la régularité de la procédure de réquisition. On peut chercher à alléguer notamment son caractère général ou impersonnel, mais il reste que la décision apparaît salutaire aux yeux des populations. Il n’est pas rare d’entendre des consommateurs saluer la mesure de réquisition, soulignant le caractère sauvage de la grève des travailleurs de la Sde. Il faut dire que l’attitude des syndicats de la Sde durant toutes les péripéties de la procédure de sélection d’un nouveau concessionnaire pour le secteur de l’eau n’a pas manqué de révulser nombre de consommateurs. Les travailleurs de la Sde portaient résolument le combat de leur actuel employeur contre l’Etat du Sénégal, alors que le gouvernement leur garantissait la pérennité de leurs contrats et conditions de travail ; cela, quelle que soit la société adjudicatrice. Plus grave, des actes assimilables à du sabotage avaient même été enregistrés dans un contexte politique on ne pouvait être plus sensible. C’était à la veille du démarrage de la dernière campagne électorale pour l’élection présidentielle. L’eau avait été coupée dans les foyers, du fait de curieuses pannes survenues dans le réseau de distribution. On avait ainsi observé des images d’une autre époque, pendant plusieurs jours, de personnes avec des seaux qui sillonnaient les rues des villes, à la recherche de quelques litres d’eau. L’image du régime de Macky Sall en avait pris un sacré coup, surtout que le gouvernement n’avait pas pu ou su se montrer assez réactif pour prendre la mesure de la gravité de la situation politique et sociale.

Au demeurant, le secteur de l’hydraulique avec les manquements sur la qualité de l’eau fournie et les grosses pannes répétitives dans le secteur a constitué l’un des aspects les plus négatifs de la gouvernance de Macky Sall. Combien de fois des coupures d’eau sur plusieurs jours voire des semaines ont indisposé les populations ces dernières années ? On peut donc dire que les travailleurs de la Sde et les responsables de leur société sont assez mal placés pour revendiquer des faveurs de la Nation. En tout cas, ils ne devraient mériter des avantages ou des privilèges particuliers, au vu de leurs piètres performances qui, d’ailleurs, ont autorisé l’Etat du Sénégal à se sentir obligé de rechercher un nouvel opérateur.

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On peut dire qu’après ces douloureuses expériences, le Président Macky Sall n’a plus voulu s’y laisser prendre encore que la Sde, qui termine son contrat à la fin du mois en cours, semble vouloir adopter la stratégie de la terre brûlée ; d’où la décision de réquisitionner les travailleurs grévistes. Un communiqué du gouvernement souligne qu’«en application des dispositions de la Constitution et de l’article L.276 (du Code du travail) qui précise que l’autorité compétente peut à tout moment procéder à la réquisition des travailleurs du secteur privé qui occupent des postes indispensables à la sécurité des populations et des biens, au maintien de l’ordre public, à la continuité des services publics et à la satisfaction des besoins essentiels de la Nation, Monsieur le président de la République a pris le décret n°2019-2067 pour la réquisition des personnels de la Sde». En effet, le gouvernement considère que «l’eau est vitale. Elle conditionne le bien-être et la santé des populations. Elle est un droit humain fondamental».

On voit bien que dans cette histoire de revendication des travailleurs grévistes de la Sde, il n’est question que des intérêts exclusifs de ces travailleurs dans un secteur aussi stratégique pour la vie de la Nation. il apparaît donc nécessaire que le gouvernement arrive à prendre ses responsabilités devant des situations qui mettent en péril la stabilité du pays, mais surtout la sécurité vitale des populations. La décision de réquisitionner les travailleurs aura le mérite d’abréger les souffrances des populations. Il sera loisible, dans un Etat de droit, aux travailleurs et autres syndicalistes de contester la mesure devant les juridictions compétentes selon les règles de procédure pertinentes. Il n’en demeure pas moins que le gouvernement a le devoir régalien de veiller à la sécurité des installations et de sanctionner tout acte de dégradation des biens publics. Les actes perpétrés çà et là contre des conduites d’eau pour assoiffer les populations sont inacceptables.

Macky Sall prend la mesure de ses responsabilités

On ne le dira jamais assez, le laisser-faire a fait son lit dans ce Sénégal où tous les comportements les plus antipatriotiques et les plus répréhensibles sont tolérés, compris, justifiés même. Dans n’importe quel pays au monde, des travailleurs et dirigeants d’une entreprise de distribution de l’eau qui, par des actes de vandalisme, en arriveraient à laisser couper l’eau aux populations, de surcroît la veille du démarrage d’une campagne électorale nationale, afin de manifester un courroux contre le gouvernement, feraient face à la rigueur de la loi pénale. La moindre mesure devant un tel sabotage était de confier la gestion des installations au bataillon du génie militaire par exemple et de traduire les responsables devant la justice. En faisant le dos rond, le gouvernement avait fait montre d’une faiblesse coupable.

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Il est on ne peut plus regrettable de relever que si les travailleurs de la Sde avaient eu le toupet d’agir de la sorte, c’est que dans d’autres circonstances aussi vitales, le gouvernement n’avait pas su apporter les réponses ou adopter la posture régalienne convenable devant des faits de sabotage qui entamaient gravement les intérêts supérieurs de la Nation. Qui ne se rappelle pas qu’à peine inauguré, l’Aéroport international Blaise Diagne avait été totalement paralysé par une grève des aiguilleurs du ciel la nuit du 14 au 15 décembre 2017 ? L’impact négatif sur les activités aéroportuaires et sur l’image du Sénégal et les désagréments causés aux usagers sont incalculables. Les syndicalistes le disaient à qui voulait les entendre, qu’ils cherchaient à saboter le démarrage du nouvel aéroport.

Le 5 août 1981, le Président américain Ronald Reagan, devant la grève des aiguilleurs du ciel qui paralysait la totalité du trafic aérien américain, avait décidé de licencier plus de 11 mille aiguilleurs du ciel et de les bannir de l’Administration fédérale. Il avait mis des militaires dans les tours de contrôle des différents aéroports. Depuis lors, plus jamais un mouvement d’humeur d’aiguilleurs du ciel aux Etats-Unis n’a eu à paralyser de manière durable ce secteur névralgique. Au Sénégal, le 28 avril 1987, le Président Abdou Diouf avait pris ses responsabilités quand des policiers étaient allés en grève, dégarnissant tous les postes de sécurité du pays. Ces policiers protestaient contre la condamnation judiciaire de cinq de leurs collègues pour avoir torturé à mort un suspect du nom de Bara Ndiaye. Le Président Abdou Diouf avait décidé de la radiation de 1 485 policiers de tous grades. Depuis lors, les forces de police et autres corps de sécurité utilisent d’autres moyens et procédés pour porter leurs revendications. Le 20 juillet 1998, Mademba Sock et une vingtaine de responsables syndicaux avaient été emprisonnés pour des actes consécutifs à une grève de travailleurs opposés à une opération de privatisation de la Senelec. Force est de dire que depuis cette épreuve de force entre le gouvernement et les syndicalistes de la Senelec, plus jamais des installations de la société nationale d’électricité n’ont subi la furie de travailleurs grévistes. Dans les chaumières, on avait pu rire de cette opération qualifiée du «coup de l’épervier».

Le droit syndical ne protège pas moins les populations

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C’est dire simplement que le droit syndical, avec son corollaire le droit de grève, ne donne pas tous les droits, jusqu’aux droits les plus exorbitants et qui pèsent injustement sur les populations. C’est dans cet esprit que devant l’impasse de la grève de syndicats d’enseignants, nous disions dans une chronique en date du 13 juin 2016 : «Que chacun prenne ses responsabilités !». Nous écrivions notamment que «le gouvernement a l’obligation de régler une telle situation. Et le chef de l’Etat Macky Sall ne se met plus à envisager l’idée d’une année blanche ou d’une année invalidée. On peut donc comprendre le recours à la procédure de réquisition pour sauver l’année scolaire. En refusant d’obtempérer aux réquisitions du gouvernement, les syndicats d’enseignants auront allègrement violé la loi et exposé leurs adhérents aux rigueurs de la loi. Le gouvernement a donné le ton en brandissant la menace de la radiation et l’application de poursuites pénales contre les récalcitrants. Ce sont des possibilités qu’offrent les lois en vigueur. Les mêmes lois permettent aux grévistes d’attaquer devant les juridictions administratives de telles décisions de réquisition, mais les grévistes ont l’obligation de satisfaire préalablement auxdites réquisitions.

L’actualité en France montre, qu’en dépit de leur radicalisation contre le gouvernement de Manuel Valls et la «loi travail» ou «loi El Khomri», les syndicats français sont bien obligés de satisfaire aux réquisitions décidées par les préfets. Les autorités administratives ont la latitude de décider de la réquisition de personnels grévistes lorsque «l’atteinte constatée ou prévisible au bon ordre, à la salubrité, à la tranquillité et à la sécurité publiques l’exige». Et ce, même dans une entreprise privée.

En d’autres termes, «si l’autorité publique constate que les besoins essentiels de la population ne sont pas assurés, la puissance publique tranche». L’autorité publique qui recourt à la réquisition «s’applique à répondre aux besoins de la population et remplit son rôle d’assurer la continuité du service public». Le refus de satisfaire à une pareille réquisition est assez grave, car elle est assimilable «à une désertion militaire» et donc susceptible de lourdes sanctions pénales et administratives.

L’Etat et les enseignants seront responsables devant l’histoire d’avoir empêché les citoyens de s’épanouir et de prospérer aux plans intellectuel, économique et social si la crise de l’éducation venait à perdurer».

Les mêmes mots peuvent s’appliquer à cette grève des travailleurs de la Sde. Avec les enseignants, le gouvernement avait entamé une procédure de réquisition pour empêcher la rétention des notes des élèves qui étaient ainsi devenu des otages, victimes de leurs maîtres et professeurs. La procédure de réquisition était engagée et on peut augurer que cela avait rendu plus facile le dénouement de la crise, car les syndicalistes avaient fini par accepter les propositions qu’ils refusaient auparavant.







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