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J’invite Sonko à Jouer Une Partition Unitaire Dans L’intérêt Du Sénégal (ibrahima Thiam)

J’invite Sonko à Jouer Une Partition Unitaire Dans L’intérêt Du Sénégal (ibrahima Thiam)

Le Sénégal a débattu au Parlement voici quelques jours de la loi d’habilitation qui permet au président de prendre des décisions par voie d’ordonnances pour faire face à la pandémie de Covid 19. Cette disposition, prévue par les textes, a soulevé l’indignation d’Ousmane Sonko, toujours prêt à dégainer contre le président Macky Sall.

Dans son réquisitoire à l’adresse du gouvernement il a pris bien soin cependant de préciser qu’il était « favorable à l’union sacrée pour faire face à un ennemi commun aussi vicieux qu’insaisissable ». En général, tous les psychologues vous le diront, lorsqu’on commence ainsi par amadouer son adversaire c’est pour mieux lui porter l’estocade ensuite. Je subodore qu’il a comme livre de chevet « l’Art de la guerre » du général chinois Sun Tzu, auteur d’un célèbre ouvrage de stratégie ou qu’il relise souvent « Le Prince » de Machiavel dont on dit que tout homme politique se doit de posséder un exemplaire.  

En réalité sa compréhension, son adhésion sont feintes car Sonko est rusé et ce n’est pas lui faire injure que dire cela. Dans les ouvrages précédemment cités la ruse fait partie des méthodes de gouvernement recommandées « au Prince » pour maîtriser ses opposants. Mais c’est avant tout un idéologue, et le revendique d’ailleurs, dont je ne partage pas les convictions, mais que je respecte. Doublé d’un stratège. Autant de vertus nécessaires à tout homme politique, qu’il soit au pouvoir ou dans l’opposition. A défaut, mieux vaut s’abstenir.  

Mais là, où nous divergeons c’est lorsque Sonko recourt, et c’est assez régulier chez lui, à l’hypocrisie. Car qui peut douter un seul instant que s’il était actuellement aux manettes du pays il ne procéderait pas lui aussi par le biais, avec le truchement des ordonnances ? Tout pays démocratique, qui dispose d’une telle possibilité dans sa constitution, y recourt sans hésiter car les circonstances exceptionnelles que nous connaissons sur le plan sanitaire l’exige. Nécessité fait loi ! A condition bien sûr qu’un contrôle parlementaire veille au respect des règles républicaines. Mais jusque-là avons-nous des raisons objectives d’en douter ?

Et ce n’est pas se renier, ce que semble croire Sonko, que d’approuver leur utilisation dans un moment où le Sénégal est confronté à une grave crise humaine et économique pour cause de pandémie au Coronavirus. Ne pas le faire serait, au contraire, irresponsable car on attend de ceux qui nous gouvernent des mesures fortes, efficaces, rapides afin d’enrayer les conséquences dramatiques du virus. Agir autrement serait irresponsable, pire, coupable. Et si était le cas, demain, une fois la crise résolue aucun gouvernement n’y survivrait.

Et Sonko, lui-même serait le premier à émettre des reproches véhéments. En revanche, là où je le rejoins, c’est sur l’absolue nécessite que le gouvernement soit transparent et nous informe de ses décisions. On ne doit pas pouvoir le soupçonner de noirs desseins ou de calculs politiciens ce qui serait misérable et méprisable dans le moment actuel.

Contrairement à Sonko je ne suis pas en mesure de voter « pour », « contre » ou de m’abstenir en ce qui concerne cette loi d’habilitation et je comprends qu’il ait voulu justifier son abstention par un long réquisitoire en règle. 

Il évoque dans son texte des métaphores comme « timonier » en parlant de Macky Sall, est-ce une allusion « au grand timonier » comme on qualifiait Mao ? Je préfère pour ma part parler de « capitaine », celui qui commande les matelots sur un navire et qui a la charge de traverser les tempêtes en protégeant ses passagers et l’équipage. Et ce n’est pas, selon moi, dans la tempête que nous traversons actuellement, qu’on doit fournir à ce capitaine de mauvaises informations sur la météo ou lui suggérer de changer de cap. « Ce n’est pas au milieu du gué qu’on change de monture », et aucune argutie, aussi pertinente soit-elle, ne doit nous faire oublier que l’union fait la force, et que la discorde conduit au drame. 

Alors plutôt que d’être des prophètes de malheur qui affalent les voiles et rament à contre-courant, soyons des gardiens de phare qui veillent à ce que le navire ne vienne pas s’échouer sur les rochers. Il y aura au cours de cette traversé, et des éléments que nous allons affronter, quelques voies d’eau. Nous devrons les colmater et écoper afin de maintenir le bateau à flots.

C’est pourquoi j’invite Sonko à oublier pendant quelques temps son ambition d’être la figure de proue du bateau, pour être, comme chacun de nous, un simple matelot pour qui compte seulement le sauvetage des passagers et joue la même partition que l’équipage et de son capitaine. En de tels moments il n’est pas inutile de se rappeler ce que disait un jour à Berlin le président John Kennedy : « Ne vous demandez pas ce que le pays peut faire pour vous mais demandez-vous ce que vous pouvez faire pour le pays ».

J’adhère totalement à cette exhortation et j’invite Sonka à faire de même.

Ibrahima Thiam, président du mouvement « Un Autre Avenir »

  

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