Le Fonds monétaire international a décidé d’accorder une enveloppe financière d’urgence de 221 millions de dollars au Sénégal pour permettre au pays de faire face à l’impact économique et social de la pandémie de Covid-19. https://www.imf.org/en/News/Articles/2020/04/01/pr 20129-senegal-imf-completes-discussions-us-221-milliondisbursement-in-response-to-covid19 Une décision motivée par l’alerte qui a été lancée par l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, l’Organisation mondiale de la santé et l’Organisation mondiale du commerce (OMC) sur le risque de pénurie alimentaire : « Les incertitudes liées à la disponibilité de nourriture dans un contexte de fermeture des frontières, peuvent gravement mettre en péril la pénurie alimentaire des pays les plus pauvres ».
La distribution actuelle de vivres (denrées alimentaires) aux populations prouve que le Sénégal est confronté à une situation critique. Ce programme « alimentaire » confirme le diagnostic lucide établi par l’ex Premier Ministre Abdoul M’Baye, qui a tiré la sonnette d’alarme dans une lettre rendue publique le 10 avril 2020 (le Covid-19 entraînera une augmentation considérable de la pauvreté au Sénégal et fera basculer dans la précarité des millions de sénégalais).
Le 03 avril 2020, Macky Sall a annoncé publiquement que les factures d’eau et d’électricité seraient prises en charge pour la tranche sociale (2 mois).
Pour ce dispositif, ont été ciblés, les ménages qui paient les factures d’électricité dont le montant oscille entre 13 000 et 25 000 F CFA et ceux dont la consommation en eau est plafonnée à 20 mètres cubes, éligibles à la tranche sociale. Dans un pays où les revenus sont très bas pour la majorité des salariés qui ont la chance d’avoir un emploi, où la pauvreté est massive, où la classe moyenne n’existe pas et où l’économie informelle fait vivre l’immense majorité de la population, déterminer la tranche sociale à partir du critère portant sur le montant des factures n’a aucun sens. A titre d’exemple, une famille de 10 personnes, où personne n’a le statut de salarié et dont le Chef de famille vit d’expédients (Gorgoolu qui se démène pour la dépense quotidienne) peut se retrouver avec une facture d’électricité de 30 000 F CFA, et être exclue de la tranche sociale alors qu’elle est dans une situation sociale dramatique.
Dans un pays normal, c’est le revenu du ménage qui est pris en compte pour déterminer la tranche sociale et l’éligibilité à un dispositif d’accompagnement social. Etant donné que le pourcentage de salariés est faible par rapport à la population au Sénégal, le régime a choisi un critère arbitraire pour définir la tranche sociale (le montant de la facture) qui ne concernera qu’une partie non significative de la population (agiter le chiffre de 975 000 ménages ne doit impressionner personne, car ces statistiques brandies ne veulent rien dire). L’immense majorité des sénégalais qui vit de l’informel (revenus précaires) ne bénéficiera pas de cette mesure.
L’enveloppe financière allouée par le FMI (221 millions de dollars) ne doit pas faire l’objet d’un détournement d’objectif, car elle est destinée aux populations fortement impactées par les effets de la pandémie de Covid-19. Elle doit permettre une prise en charge intégrale des factures d’eau et d’électricité de tous les sénégalais, pour un bimestre. A l’exception de la classe dirigeante et de l’élite qui ne sont pas éligibles et ne doivent pas bénéficier de la mesure, à savoir : les Présidents d’institutions, les ministres, les députés, les magistrats, les membres du HCTT (Haut Conseil des Collectivités territoriales) et du CESE (Conseil économique, social et environnemental), les Préfets, sous-Préfets, les administrateurs civils, les entrepreneurs et de manière générale tous les salariés qui disposent de revenus confortables.
L’enveloppe de 12,5 milliards de FCFA allouée à la diaspora (un cadeau « calculé » dont l’impact sera quasi nul sur la vie de nos compatriotes vivant à l’étranger) est ridicule et insensée (quelques centaines d’euros pour les bénéficiaires).
La totalité des 221 millions de dollars ainsi que l’enveloppe de 12 milliards octroyée à la diaspora doivent être restituées intégralement aux nationaux, y compris sous forme d’aide alimentaire d’urgence aux localités qui en ont grandement besoin. Nos compatriotes qui vivent au Sénégal, qui ne disposent pas de filets sociaux, seront confrontés dans les mois à venir à des situations dramatiques, et notamment à d’énormes difficultés sociales pour se nourrir correctement et s’approvisionner en denrées alimentaires. Disons-le sans détour, l’un des effets du Covid-19, c’est que le risque de famine dans de nombreuses localités du Sénégal (naufrage social sans précédent). Rappelons qu’avant la pandémie de Covid-19, 900 000 sénégalais étaient retenus pour bénéficier d’une aide alimentaire d’urgence (un chiffre très largement sous-estimé à l’époque).
Il ne faut pas se voiler la face : le régime actuel est impréparé pour faire face à la crise (à venir).
Seybani SOUGOU
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