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Tout Ça Pour Ça

Tout Ça Pour Ça

Décidément, on aura tout vu avec cette pandémie de coronavirus. Au-delà des ravages sanitaires enregistrées depuis que la maladie a pointé son nez dans notre pays, elle nous montre jour après jour l’incapacité de nos dirigeants à la gérer dans les règles de l’art. Il est vrai que la perfection n’existe nulle part. Elle est même du domaine exclusif du Tout-puissant. Cela dit, reconnaissons au moins qu’il est des situations auxquelles il est plus facile de trouver des solutions faisant l’unanimité plutôt que des résultats aux antipodes de ce qu’aurait dicté la raison.

Après la polémique née de la commande et de la distribution des kits alimentaires destinés aux ménages indigents, voilà que nous assistons à une gestion défectueuse de la situation scolaire. Au lendemain de la décision de suspendre les cours — une décision prise alors que le pays n’avait enregistré qu’une dizaine de cas du coronavirus —, tout le peuple avait applaudi. Hélas, le même peuple n’a pas compris, par la suite, pourquoi tout d’un coup, les autorités qui avaient fermé les classes ont tenu vaille que vaille à les rouvrir. Ce à une période où notre pays est à plus de trois mille personnes infectées et quarante-deux morts !

Pourtant tout le monde avait averti sur les dangers que pouvait engendrer cette reprise inopportune, impertinente, insensée et quelque part même suicidaire. Que d’alertes ont été lancées à ces autorités que l’on dit être mieux informées que quiconque dans le pays. Mais au lieu de prêter oreille aux acteurs très expérimentés du système éducatif, nos autorités se sont entêtées à maintenir leur décision de faire reprendre les cours. Et mieux elles se sont permis d’occuper les médias pour tenter de défendre la décision du Chef et parfois avec des arguments farfelus et dépourvus de toute pertinence. Mais comme les enseignants n’ont pas voulu prêter le flanc, ils ont tenu comme de véritables soldats en guerre à rejoindre leurs postes de travail malgré les conditions catastrophiques d’organisation de leur « rapatriement ». Des conditions que tout le monde a déplorées.

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Des milliers d’individus regroupés dans un espace réduit (le Terminus de Liberté V), bravant la faim et la soif en pleine situation de pandémie d’une maladie aussi contagieuse ! A dire vrai si ces images à la fois choquantes et effroyables ne relèvent pas de l’amateurisme, il vaut mieux alors trouver une autre signification à ce mot.

A-t-on besoin de rappeler qu’au lendemain de cette déclaration impopulaire de reprise des cours, des élèves ont refusé de regagner les classes par peur de choper le virus? Que leurs parents ont exprimé leur inquiétude de voir leurs enfants exposés ? Malgré tout, l’Etat a déroulé sa stratégie qui, au finish, s’est effondrée comme un château de cartes. Qu’est-ce qui se cache donc derrière cette précipitation à vouloir coûte que coûte rouvrir les classes? Nos dirigeants ont-ils oublié que parmi les missions qui leur sont assignées figurent la garantie de notre sécurité et de notre santé ? En vertu de quoi, elles n’avaient pas à se précipiter pour faire reprendre les cours dans un contexte de pandémie où personne n’est à l’abri. Et s’il s’avère que la principale motivation c’est de ne pas perdre les milliards de francs investis dans le secteur de l’Education, cela voudrait dire qu’ils ignorent que la vie d’un citoyen, fut-il un nourrisson, est infiniment plus importante que tout le budget réuni du Sénégal.

Et malheureusement, pour avoir ignoré la signification véritable de leur mission, on a assisté à une série de ratés dont les conséquences n’ont pas fini de révéler tous leurs secrets. Mieux, on apprend avec tristesse que des enseignants ont été stigmatisés par les populations de leurs localités d’exercice tandis que d’autres parmi eux ont tout simplement été renvoyés par des habitants qui les soupçonnent d’être porteurs du virus. Des populations qui n’ont pas tout à fait tort puisque des cas d’enseignants testés positifs ont été signalés notamment à Ziguinchor. Mieux, d’autres cas d’enseignants testés positifs ont été signalés dans d’autres localités. Des enseignants dont le seul tort est d’avoir accepté d’aller répondre à l’appel de la Nation pour donner du savoir aux jeunes espoirs de leur pays.

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Sans nous ériger en donneur de leçons, nous pensons que la confection de cartes professionnelles pour tous les enseignants aurait facilité l’organisation de cette opération de convoyage. Maintenant que certains de ces vaillants enseignants sont tombés malades du coronavirus, tandis que d’autres restent confinés dans des zones retirées, nous espérons que nos autorités vont à s’organiser pour les assister et les faire revenir dans leurs familles respectives. Il va falloir aussi que plus de respect et de considération soient donnés à nos enseignants. Ils le méritent plus que quiconque vu l’importance de la mission qui leur est assignée. C’est mieux que de penser à élever au titre d’honno… d’honnoro (honorariat, mais bon le terme n’est pas important !) d’anciens présidents d’une institution en leur allouant une indemnité mensuelle de 4,5 millions par mois. Ce qui représente 40 fois le salaire mensuel de certains enseignants.

Messieurs les dirigeants, la gestion d’un pays est une affaire tellement sérieuse qu’elle ne doit pas se faire dans le tâtonnement et l’amateurisme. Et malheureusement, dans cette réouverture des écoles avortée, on a assisté à beaucoup de ratés symptomatiques d’un pilotage à vue. On se demande à quoi ont finalement servi ces dépenses de plusieurs millions, voire milliards au frais du contribuable et qui ont permis d’acheter tout le matériel sanitaire mis a la disposition des écoles. Qu’en est-il du budget alloué au carburant utilisé par des centaines de bus pour faire des milliers de kilomètres à l’intérieur du pays? Tout ça pour ça ! Autrement dit, pour rien…

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