Le journal Le Quotidien vient de s’installer à Diamniadio. L’édition de ce jour aura été la première à y être réalisée. Nous prions pour que ce nouveau siège nous porte bonheur et consacre un plus large rayonnement de notre journal. La décision de nous installer à Diamniadio est l’aboutissement d’un long cheminement. Ceux qui se souviennent de nos débuts en 2003, à la Sodida, ont pu mesurer combien nous ne manquions pas «d’audace» (pour nos amis) et de «prétention» (pour ceux qui l’étaient moins). Nous avions par la suite migré à Yoff, à la Cité Adama Diop, au moment de lancer en 2007, grâce à un prêt financier souscrit auprès de l’organisme international Media development loan fund (Mdlf), devenu Media development investment fund (Mdif), de nouveaux organes comme Week End Magazine, le journal satirique Cocorico, la Radio Première Fm et l’Imprimerie du Quotidien. Nous avions beaucoup d’ambitions qui s’étaient malheureusement heurtées à la résolution farouche du régime du président Abdoulaye Wade de nous faire taire définitivement. Nous y avions laissé de grosses plumes, mais comme le phénix, nous avions pu renaître de nos cendres, après être retombés sur nos pieds.
Ainsi, avions-nous choisi de réduire la voilure en nous installant à la Cité Djily Mbaye, dans une propriété familiale où nous étions sûrs de ne pas subir des mesures hardies de recouvrement de créances de loyers. La radio et le journal Cocorico étaient donc fermés. C’était une grosse déchirure et cela donnait l’occasion à tous les quolibets contre ma personne, affublée du sarcasme de «celui qui se prenait déjà pour un Rupert Murdoch». L’hémorragie provoquée notamment par la radio Première Fm était forte.
Une âme charitable (?), celle de Karim Wade, alors toute puissante personnalité du régime de son père Abdoulaye Wade, nous proposa, en 2009, son aide pour nous permettre de sortir la tête de l’eau. Karim Wade nous offrit la possibilité d’engager la responsabilité de l’Etat quant aux difficultés de notre entreprise et considérait que l’Agent judiciaire de l’Etat pourrait trouver un arrangement avec nous pour nous renflouer. Il faut dire qu’il y avait une jurisprudence déjà établie avec un autre Groupe de médias qui avait été victime d’une attaque de nervis. L’offre, il faut le dire, était assez tentante, mais nous avions fini par y renoncer. Nous avions décidé de porter seuls notre croix.
La descente aux enfers
Une autre tuile s’abattit sur notre tête, quand la plupart des membres de la rédaction de Week End Magazine ont été débauchés par la concurrence. Nous avions tenté de sauver ce magazine qui était devenu le plus lu de la place. Mais à la vérité, le cœur n’y était peut-être plus, et les moyens nous manquaient cruellement.
Nos difficultés de fin de mois étaient devenues plus pressantes. Dieu merci, nous n’avions jamais accusé un arriéré de salaires et nous nous demandons encore par quel miracle tout cela avait pu être possible ? Seulement, quand la date légale de paiement des salaires (le 8 du mois) arrivait à être dépassée sans que les salaires ne fussent payés, des actions syndicales bruyantes étaient engagées. Quelques manifestations avaient été organisées devant le siège du journal par les syndicalistes de la presse. Il semblait que rien ne nous était pardonné. On observait des journalistes à qui leurs employeurs devaient plusieurs mois d’arriérés de salaire, qui se massaient devant le siège du Quotidien pour dénoncer des retards de salaire. Cela pouvait faire sourire, mais surtout nous donnait davantage de courage. Le fait que rien ne nous était pardonné a pu dissiper en moi toute idée de fermer boutique.
Le défi était de rester en vie, au prix d’aliéner quelques patrimoines personnels.
Nous décidions alors de fermer Week-End Magazine et de mettre en place un plan de licenciements pour motifs économiques ; plan approuvé par les autorités publiques en charge des relations sociales, afin d’alléger la masse salariale. Il ne nous restait plus que le navire-Amiral, le journal Le Quotidien. L’imprimerie du Quotidien sera aussi arrêtée pour cause de non-rentabilité, des journaux, notamment Le Soleil, Stades et Sunulamb avaient fini d’installer leurs propres machines rotatives.
J’ai eu l’idée de céder le titre de Week-End Magazine et le matériel de la Radio Première Fm. Des personnes intéressées se sont bousculées, mais sans jamais faire une offre sérieuse pour Week-End Magazine. Par contre, pour le matériel de la radio, j’avais eu la proposition de Bougane Guèye Dany, Pdg du Groupe Dak’cor, pour nouer un partenariat. Bougane était très persuasif, m’assurant qu’au bout de trois ans il pouvait relancer la radio. C’est ainsi que Zik Fm était née. Nous avions créé une société pour l’exploitation de la nouvelle radio, avec pour chacun la moitié des parts. Bougane s’était investi totalement pour réussir le projet. Il y avait mis toutes les ressources nécessaires. Je n’ai jamais eu à intervenir dans le fonctionnement ou dans la gestion de la radio. Mes équipes se suffisaient des comptes rendus envoyés par les collaborateurs de Bougane.
Après un peu plus de trois années d’exercice et que Zik Fm prenait véritablement son envol, mes collaborateurs devenaient de plus en plus exigeants dans leurs demandes d’informations. Les contacts avec les équipes de Bougane avaient pu commencer à se raidir, d’autant que le Groupe D-Média avait entre-temps lancé d’autres supports médiatiques et cela pouvait donner l’impression d’une unicité de gestion. J’appelais Bougane pour lui dire que si la radio en est arrivée à ce niveau, c’est exclusivement grâce à son mérite et son entregent et que je lui proposais de lui céder mes parts. Il accepta ma proposition et me demanda le montant escompté pour la transaction. Je lui répondis que son prix sera le mien. Il fixa donc un prix et des modalités de paiement que j’avais aussitôt acceptés. Mes collaborateurs s’arrachaient les cheveux, d’autant que le notaire d’un propriétaire d’une radio concurrente de Zik Fm nous avait déjà approché avec une offre plus intéressante pour reprendre nos parts. Il n’était pas question pour moi de faire un tel coup à Bougane. Ainsi, le Groupe Avenir Communication est sorti de la radio Zik Fm.
Le projet d’installer Le Quotidien à Diamniadio
En 2005, j’avais pris contact avec la Société immobilière Darou Salam de l’ex-sénateur Saliou Dionne, pour permettre aux membres de mon équipe d’accéder à la propriété immobilière. Mon ami Thiao Kandji, architecte, était le facilitateur. Le site de Keur Massar qui était proposé ne semblait pas trop emballer mes gars, du fait de son éloignement de Dakar. Je m’évertuais, sans succès, à leur faire comprendre que l’autoroute à péage allait desservir cette zone et que cet enclavement relatif sera très rapidement dépassé. D’aucuns, sans doute mal inspirés, avaient aussi considéré qu’un engagement immobilier serait un moyen d’être ferré ad vitam aeternam par Le Quotidien. Ce projet était tombé à l’eau, surtout que le projet en substitution qui leur était proposé sur le secteur du quartier Liberté 6 s’avérait inaccessible pour beaucoup, en raison des coûts prohibitifs.
C’est en 2017, toujours sur les conseils de mon architecte Kandji, que l’idée de proposer un nouveau programme immobilier a refait jour. Cette fois-ci, la Direction du Quotidien proposa d’accompagner le projet en offrant gratuitement l’apport initial exigé par la société promotrice Peacock, sur son site de la Cité des fonctionnaires à Diamniadio. Je décidais aussi de prendre une villa pour mon compte personnel. C’est cette villa qui a été transformée pour servir de nouveau siège à votre journal. Nous y avons consacré des moyens non négligeables pour que notre siège ne souffre la comparaison devant un quelconque autre siège de groupe de médias.
Il faut dire que la décision de faire de cette villa le siège du journal nous est venue, après le constat du refus des autorités de l’Etat de nous accorder un site pour y ériger un siège. En effet, nous étions enthousiastes à l’idée de répondre à l’appel du Président Macky Sall, aux entreprises privées sénégalaises, pour s’installer dans la nouvelle ville de Diamniadio. Ainsi, avions-nous formulé une demande d’affectation d’un terrain de 800 mètres carrés à Diamniadio. Les services de la Délégation générale pour l’aménagement du pôle urbain de Diamniadio, alors dirigée par Seydou Sy Sall, nous demanderont moult informations sur notre projet. Nous avions fourni les plans détaillés et les modalités de financement. La décision d’affectation n’a pas été effective, en dépit de toutes les démarches que nous avions pu effectuer. Aucune des promesses que nous avait faites Seydou Sy Sall n’avait été concrétisée.
De guerre lasse, je m’en étais ouvert au Président Macky Sall qui semblait être révolté par cette carence de son Administration, d’autant qu’il disait que de nombreux promoteurs avaient reçu des hectares de terres à Diamniadio et dont ils ne faisaient encore rien. Le chef de l’Etat promit de donner les instructions nécessaires. Nous avions alors amélioré notre projet pour demander un terrain de 2 000 mètres carrés, en y incluant le projet de création d’une nouvelle unité d’imprimerie industrielle. Jamais nous ne bénéficierons d’une affectation foncière. Je me résignais alors à transformer la villa de la Cité des fonctionnaires pour en faire le siège.
A la nomination de Diène Farba Sarr à la place de Seydou Sy Sall, notre architecte avait voulu relancer la demande d’affectation foncière. Je refusais de le faire, me contentant de ce que j’ai pu m’offrir par mes propres moyens.
L’installation à Diamniadio devra être un nouveau départ. C’est le lieu de remercier sincèrement toutes les personnes qui, d’une manière ou d’une autre, ont rendu possible l’idée de la création de ce journal, mais surtout toutes celles qui ont consenti des sacrifices pour que ce journal reste encore en vie et arrive à pouvoir se développer davantage. Le challenge de continuer à chercher à tirer les choses vers le haut nous habite. Nous espérons pouvoir lancer d’autres initiatives dans le secteur des médias et de la communication à partir de Diamniadio. Certaines difficultés vont marquer ce déménagement, notamment du point de vue logistique. Nous avons mis en place des moyens tendant à faciliter la mobilité de tous nos personnels et assurer une coordination efficace des activités de la rédaction et des autres services avec les différents interlocuteurs et partenaires du Quotidien. Nous espérons pouvoir motiver et mobiliser nos équipes de collaborateurs pour que notre journal continue de rester au pinacle.
Le Quotidien vous salue et vous dit : «Demain commence à Diamniadio !»