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Lettre Ouverte Au Président Macky Sall: Au Nom De La Jeunesse (elimane Ba)

Monsieur le Président de la république, les évènements tragiques de ces derniers jours m’ont poussé à m’adresser à vous, une seconde fois par voie de presse sur des questions liées à la jeunesse. En effet Monsieur le président ce 08 Mars 2021, vous avez dit avoir entendu et compris le message de la jeunesse sénégalaise ; une réaction que nous saluons et que nous jugeons très responsable. 

Par ailleurs, s’il a fallu autant de violence avec ses lots de morts pour que vous puissiez enfin parler directement à votre jeunesse et calmer les ardeurs, il y’a lieu de faire un rétropédalage et de se pencher sur les causes réelles de cette situation plus que déplorable.

Et la question que bon nombre de sénégalais se pose est : comment en est-on arrivé à une telle situation ? 

Avant tout, permettez-moi Monsieur le Président de présenter mes condoléances aux familles des victimes et à l’ensemble de la jeunesse sénégalaise, je tiens aussi à manifester ma solidarité et compassion à l’égard des blessés et à ceux qui ont subi des dommages matériels. Je tiens aussi à montrer toute ma gratitude à l’endroit des chefs religieux et coutumiers, qui, une fois de plus, ont confirmé leur posture de régulateurs sociaux, une spécificité bien sénégalaise.  Je tiens également à féliciter les forces de défenses et de sécurité pour leur maitrise et leur sang-froid qui nous ont permis d’éviter le pire.

Monsieur le président de la république bien vrai que la question posée plus haut suscite de multiples réflexions, je reste convaincu que telle situation ne se produirait pas si l’Etat parvenait à subvenir correctement aux besoins de la jeunesse. Car force est de constater que ces émeutes ne sont que les conséquences d’un mal-être que les jeunes ont voulu vous faire connaitre, et il est nécessaire de déterminer les causes de ce mal-être. Aux bons diagnostics les bons remèdes dit-on.

Et pourtant Monsieur le président, pour résoudre les difficultés auxquelles les jeunes sont confrontés, vous avez bien mis en place une politique de jeunesse qui, actuellement est en train d’être dérouler par votre gouvernement avec des réalisations palpables. 

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Mais pourquoi cette politique de jeunesse peine-t-elle à apporter les résultats escomptés ?

Est-ce lié à un manque de pertinence dans son établissement ou est-ce tout simplement un problème dans la mise en œuvre ? 

  1. Une Politique de jeunesse en quête de succès auprès des jeunes !

Monsieur le président, les mesures de l’action publique à destination de la jeunesse se résument à un empilement de projets et de programmes tels que l’ANPEJ, DER, 3FPT, AGRIJEUNES, PSEJ etc. Bien que ces dits projets et programmes soient pertinents, la réalité montre à suffisance que les impacts recherchés ne sont pas toujours au rendez-vous. D’ailleurs, la plupart des communiqués faits jusqu’ici sur ces projets et programmes, se limite à l’énumération des activités réalisées et non sur leurs impacts réels à l’endroit des jeunes et dans l’économie. Ce qui ne ressort pas la pertinence de ces projets et programmes, d’où l’importance de savoir si toutes les études préalables ont été menées jusqu’au bout, et qu’une situation de référence ait été établie avec des objectifs et résultats clairement définis, dans le moyen et long terme.

Monsieur le président, ceci nous ramène à la question fondamentale de l’implication des jeunes dans la procédure d’établissement de la politique de jeunesse, pour mieux cerner leurs besoins mais aussi agir plus efficacement. D’ailleurs, le fait de ne pas associer les jeunes à des projets qui les concernent directement renforce leur méfiance envers les institutions qui les pilotent. La prise en compte, en amont, de leurs points de vue permettrait de mettre en place une politique de jeunesse mieux comprise avec une meilleure appropriation : « Une politique pour la jeunesse, par la jeunesse et avec la jeunesse »

2) Une mise en œuvre décousue de la politique de jeunesse !

Monsieur le président votre politique de jeunesse étant certes prise en compte de manière transversale dans quasiment tous les secteurs, mais le manque de coordination des programmes et projets intersectoriels réduit leurs impacts et leurs efficacités. De ce fait, il est nécessaire que l’entité en charge de la question de jeunesse ait un ancrage institutionnel d’un rang suffisamment élevé pour pouvoir coordonner les projets et programmes éparpillés dans les différents ministères.

Ceci nécessite un travail préalable d’évaluation exhaustive des projets et programmes en cours afin de ressortir toutes les insuffisances dans leurs implémentations, mais aussi de pouvoir identifier les leviers de politique publique sur les quels s’appuyer pour atteindre les objectifs.

Monsieur le Président, il apparait clair qu’on note aisément des lenteurs assez inquiétantes dans l’application de vos instructions. En guise d’exemple, vos collaborateurs auraient dû mettre en place le CNEIJ (Conseil National pour l’Emploi et l’Insertion des Jeunes) depuis la deuxième quinzaine du mois de décembre 2020 comme vous le leur aviez instruit en conseil des ministres du 18 Novembre 2020. Mieux encore, suivant vos instructions du conseil des ministres du 30 Octobre 2019, ils auraient dû, tout au moins, construire huit maisons de la jeunesse et de la citoyenneté en 2020. Et la liste n’est pas exhaustive. 

Outre ces lenteurs dans l’exécution, on note également une communication peu adaptée sur les projets et programmes, qui a fini par créer un gap entre les services offerts par l’Etat et la cible. Les canaux et relais utilisés pour faciliter ce rapprochement sont le plus souvent méconnus des jeunes. Ainsi, les jeunes accèdent, bien souvent, que tardivement à l’information sur les projets qui leur sont destinés et ils sont tentés de croire que les opportunités offertes sont réservées aux jeunes du parti au pouvoir ou qu’il faut un bras long pour y accéder. 

Quel rôle doit jouer la jeunesse politique ?

 -Monsieur le président de la république, président de l’APR, avant de terminer, permettez-moi de vous refaire part de mon opinion en notre endroit, nous votre jeunesse politique et la mission politique qui est censée nous être assignée (ma 1ère missive publiée le 04 Juillet 2019 sur Senego.com en faisait état). Car après que vous ayez défini et piloté des projets et programmes pour la jeunesse il est primordial et impératif que des jeunesses politiques accompagnent ces projets en termes de vulgarisation, de sensibilisation et de portage en vue de les faire appropriés par les cibles.

 Monsieur le président de l’APR, la radioscopie politique de ces évènements décèle que votre jeunesse politique n’a pas été suffisamment outillée et impliquée pour  jouer le rôle de relai qui aurait dû être le sien dans la vulgarisation de votre politique pour la jeunesse sénégalaise. De plus, c’est une toute petite frange qui cherche à communiquer sur les projets et programmes de votre gouvernement et à promouvoir aussi votre vision pour la jeunesse. En conséquence, leurs influences et envergures sur le terrain et dans les réseaux sociaux restent très limitées. Ils peinent à exploiter leurs pleins potentiels, libérer les énergies en interne afin d’asseoir leur leadership au niveau des autres jeunes du pays. La structuration opaque et le manque d’organisation des instances politiques qui pilotent ces actions posent un problème de déploiement organisé, à grande échelle. Voilà les raisons pour lesquelles votre vision pour la jeunesse peine à atteindre une grande partie de sa cible. Les jeunesses urbaines et des banlieues ne s’identifient pas à votre jeunesse politique actuelle et ne les écoutent même pas. Une réalité qui malheureusement a toujours été camouflée par les guéguerres de positionnement au sein du parti. Je pense qu’il est clair maintenant pour les militants comme responsables que la bataille est ailleurs et non entre jeunes de la même coalition.

Pour finir Monsieur le président de la république, président de l’APR, je dirais que le parti gagnerait beaucoup si ceux qui sont en charge de la jeunesse mettaient en place des structures souples et ouvertes avec un mode de fonctionnement moderne, inclusif et démocratique. Cette ouverture permettrait d’attirer le maximum de jeunes leaders dans les différents quartiers et augmenter ainsi l’influence de la jeunesse républicaine au niveau de la jeunesse sénégalaise. Pour apprendre de ces évènements, ils doivent changer de fusil d’épaule et de paradigme car les instances politiques modernes de jeunesse ne peuvent plus être dirigées « au fouet » à partir d’un seul fauteuil. 

Elimane BA, Consultant Junior

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