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Vietnam, Afghanistan, Mali, Les Vices Inherents Aux Forces Expeditionnaires

Vous voulez savoir l’avenir de l’opération Barkhane ou celui de la Minusma ? La réponse est simple. C’est le présent de l’opération «Liberté immuable», nom de l’intervention américaine en Afghanistan. L’opération «Liberté immuable» qui a été lancée en 2001 après les attentats du 11 septembre pour traquer Ben Laden et Al Qaeda prendra fin cette année avec le retrait des troupes américaines, après 20 ans de guerre.

La plus longue guerre des Etats-Unis se termine sur un bilan plus que mitigé, après des milliers de morts et des milliards de dollars engloutis. La seule victoire dont les Américains peuvent se prévaloir est la liquidation de Ben Laden et l’affaiblissement d’Al Qaeda, mais sur le terrain, les Talibans sont toujours aussi forts et vont sûrement reprendre le pouvoir dès le départ des Américains.

On en reviendrait ainsi à la situation d’avant l’intervention. Dans cette guerre, face à l’armada américaine, les Talibans ont eu un allié de taille : le temps, car ils ont vite compris que la force expéditionnaire ne resterait pas éternellement et qu’une victoire militaire est impossible. C’était presque le même schéma et le même épilogue au Vietnam. Aujourd’hui, toute chose étant égale par ailleurs, nous avons le même schéma au Mali. Le Chef d’état-major de l’Armée française a déjà dit dans une interview au Monde qu’une victoire militaire était impossible au Mali et force est de constater que les jihadistes au Sahel, comme les Talibans, ont le temps comme plus grand allié, car à Bamako on n’a pas encore compris que le «temps ne chôme pas», comme dit Saint Augustin.

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Au Vietnam, en Afghanistan et dans le Sahel, la force expéditionnaire échoue face aux insurgés, parce que cette force qui vient en renfort ne trouve pas d’Armée à la hauteur sur le terrain et est donc obligée de se substituer à elle pour faire la guerre. C’est pourquoi au Vietnam, dès qu’on a vietnamisé le conflit avec le retrait américain, le sud est rapidement tombé. En Afghanistan, dès que les Américains partiront, les Talibans marcheront sur Kaboul pour ouvrir un nouveau cycle de guerres interminables qui ont toujours déchiré le pays, dont l’implication des Etats-Unis n’aura été qu’un épisode.

Comme au Vietnam, les Américains dans leur optimisme instinctif ont été naïfs en croyant apporter liberté et démocratie dans ce pays où les archaïsmes se sont sédimentés depuis des siècles. Au Mali aussi, la force expéditionnaire a été souvent obligée de se substituer à l’Armée pour faire la guerre aux jihadistes, avec Bamako qui fait le jeu de yoyo entre instabilité démocratique et transitions militaires.

Les interventions américaines au Vietnam et en Afghanistan, et celle française au Mali, ont un dénominateur commun qui est aussi un grand enseignement. Les forces expéditionnaires passent rapidement de «libérateurs» à «force d’occupation» aux yeux de la même opinion. Au Mali, on est rapidement passé à la célébration nationale du martyr de Damien Boiteux (le nom de son bébé au premier mort français de l’intervention au Mali), aux manifestations anti françaises. Plus que les forces ou les acteurs autochtones, le temps est l’adversaire le plus redoutable des forces expéditionnaires, en plus de l’évolution de la situation politique des pays qui envoient des soldats, comme on le voit au Tchad ou aux Etats-Unis, avec des alternances qui entraînent des changements de politiques.

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Donc se préparer à la confrontation avec les jihadistes, c’est surtout se préparer à une guerre de longue durée, dont la première bataille est surtout psychologique et dissuasive. Nous y sommes déjà. Une bataille de l’ombre. Une guerre du renseignement d’une part, et d’autre part faire étalage de puissance par les manœuvres ou médiatiser sa force de frappe pour montrer que le pays est prêt à faire face. Nous sommes en plein dans cette «drôle de guerre» avec les jihadistes, tout en profitant du sursis stratégique que nous offre la présence de la force expéditionnaire pour être prêts à toutes les hypothèses







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