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Opinions, Idées et Débats des Sénégalais

Madame La PrÉsidente De La RÉpublique

Pourquoi dans un pays de droits et des libertés qui vise l’émergence devrait-il être tabou d’avoir une femme président de la République ? Le leadership des femmes monte en puissance dans l’espace politique, sur les terrains économique, socioculturel, voire même dans l’espace religieux. Cependant, cette posture continue de faire l’objet d’incompréhension voire de discours agressifs de la part de certains hommes pour cause d’extrémisme socioculturel qui contredit l’avancée du monde, ou bien de complexe de supériorité de certaines catégories d’hommes. Être femme et dirigeant n’est pas en contradiction avec un statut d’épouse, mère et d’être en mesure d’apporter le bonheur à la famille. Il est temps que les femmes prennent leur revanche en sortant de ce carcan dans lequel certaines traditions et pesanteurs socioculturelles les confinent malgré l’évolution du temps. Le chemin parcouru par les femmes est déjà très long et risque de l’être encore si la révolution pacifique qui portera celles-ci à la station suprême tarde à se réaliser.

Femme, président de la république du Sénégal !

Je vois dans mon rêve, ce président, jeune, éduquée, un vrai leader qui a à la fois une approche transformatrice de la société et une vision qui va élever le Sénégal aux stations les plus enviables en Afrique. Cette femme sera comme d’autres en Occident telles les Angela Merkel en Allemagne ou Margareth Thatcher en Angleterre. Je ne suis pas en phase avec ceux qui disent qu’une femme ne doit pas les diriger. Si ces gens-là ne refusaient pas d’avoir un regard de 360 degrés, ils verraient la réalité silencieuse d’en face. Je garde l’espoir que cela arrivera un jour, qu’une fois dirigera mon pays, je le vois dans mon rêve. Certains diront que c’est un rêve. Et rien qu’un rêve tout en oubliant qu’un rêve, un vrai rêve est une indication voire une orientation divine. Toujours est-il qu’avec une femme président de la République, le pays sera porté sur la rampe de lancement de son économie dans la paix et la concorde. L’expérience montre qu’à nombre égal et sur des positions similaires, les femmes leaders réalisent souvent de meilleures performances que les hommes. Cet idéal est d’autant plus logique que les femmes représentent 60 % de la population ; elles gagnent du terrain, elles ont un niveau d’émancipation et d’éducation très respectable, un sens du leadership et de l’organisation sans commune mesure. Au niveau terre à terre, il faut observer le fonctionnement des « tontines ». Les femmes en sont expertes. Rarement, sinon jamais, on voit des hommes gérer des « tontines ». Même s’il n’existe pas d’organisation parfaite, même si par moments les « tontines » peuvent conduire à des polémiques et, éventuellement, atterrir devant la justice, il faut reconnaître les merveilles des femmes à mettre ensemble leurs petits moyens pour réaliser des investissements et permettre aux membres de leurs regroupements de survivre dignement voire de réaliser des profits substantiels qui protègent leur dignité, et même de venir en aide à leurs époux. La femme gère le foyer, un environnement pas si simple, pour le bonheur du mari, des enfants et pour la stabilité de toute une famille proche et élargie. La femme, dans sa modestie, gère l’homme. Son efficacité n’est pas publique, mais ses grandes idées distillées dans l’intimité sont appropriées par l’homme, ce grand monsieur qui, face au monde extérieur, tient un discours remarquable, à l’aise. C’est de là que vient l’idée : « Derrière un grand homme, il y a toujours une grande femme », pour magnifier la grandeur, l’intelligence, le sens de la persuasion de la femme. Il faut visiter l’histoire de notre pays, ensuite jeter un regard sur les avancées politiques du Sénégal pour savoir que la femme a toujours été présente à toutes les étapes de la vie nationale, avec des rôles et responsabilités de grande importance.

Aline Sitoé Diatta, les femmes de Nder, ces héroïnes à qui nous devons tant !

A l’image de Khadija, la première épouse du Prophète Mohamed (PSL), de grandes figures féminines sénégalaises continuent de faire parler d’elles. Khadija était aussi symbole des finances et de la solidarité avec notre vénéré, du fait de sa richesse venant du commerce, on lui donnait le statut de deuxième ou troisième musulmane après le Prophète (PSL). Elle a soutenu son époux de toutes ses forces, avec tous ses moyens et a marqué l’histoire de l’Islam, jusqu’à sa mort, trois ans avant l’Hégire. Aïcha, la deuxième épouse du Prophète, a combattu auprès et après son époux pour faire rayonner l’Islam. La spécificité sénégalaise nous révèle des femmes de valeur qui, a leur manière, on marqué l’histoire de notre pays. Elles sont des références pour les femmes et les hommes. On peut citer, par exemple, Aline Sitoé Diatta, cette héroïne de la résistance sénégalaise, et particulièrement de la Casamance, contre la colonisation française. Il y a aussi les femmes de Nder ont préféré la mort au nom de la liberté et pour sauver leur dignité de femmes que de céder à l’humiliation. La résistance de Nder plus connue sous le terme de résistance des femmes de Nder ou mardi de Nder (Talaatay Nder) est un épisode marquant et symbolique de la lutte contre l’esclavage dans l’histoire du Sénégal. En effet, un mardi de novembre 1819, les populations de la cité de Nder dans le royaume prospère du Waalo opposent une résistance opiniâtre à des esclavagistes marocains, maures dont la tribu vassale des Trarzas et Toucouleurs venus du nord du fleuve Sénégal et conduits par le chef Amar Ould Mokhtar. Cet épisode est connu dans l’historiographie par son issue dramatique et la conduite héroïque des habitantes qui se sont sacrifiées plutôt que d’être emmenées et réduites en esclavage Par ailleurs, d’autres femmes comme Mame Diarra Bousso se sont illustrées par leur spiritualité, leur éthique et l’exemplarité de leur éducation ainsi que la soumission à leur autorité morale. Sokhna Mame Diarra Bousso (1833-1866) est la troisième épouse de Mame Momar Anta Sali Mbacké et la mère de Cheikh Ahmadou Bamba, fondateur du Mouridisme. Elle est l’objet de respect absolu, de haute considération et d’une dévotion particulière dans la communauté musulmane de ce pays, particulièrement dans la confrérie mouride. Il y a beaucoup d’autres de femmes exemplaires qui se sont distinguées au fil du temps. Malgré leur absence sur terre, leur influence continue de se manifester dans la société auprès d’hommes et de femmes qui, pour éclairer leur chemin, s’inspirent des valeurs qu’elles incarnaient. La période pré coloniale sénégalaise a été marquée par des femmes exceptionnelles devenues de grandes actrices politiques. C’est le cas des reines Yassine Boubou, huitième Damel du Cayor entre 1673 et 1677. On peut aussi citer les reines Ndatte Yalla, 1810-1860, et Djembeut Mbodj du Waalo, en 1800-1846. Tous ces exemples montrent que la responsabilité de la femme n’a jamais fait défaut dans l’histoire du Sénégal.

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Mame Madior Boye, première clé de voûte de la Primature

Après les indépendances, le Sénégal connaitra la première femme députée qui deviendra plus tard la première femme ministre. Celle-ci, c’est Mme Caroline Faye. Avec l’arrivée du président Abdou Diouf en 1981, elle sera rejointe par la magistrate Mme Maimouna Kane, deux femmes ministres qui ont beaucoup œuvré pour la promotion de la femme. Elles ont été les pionnières dans les espaces de décisions stratégiques. Progressivement, les femmes gagnent du terrain. Le régime libéral verra l’avènement de la première femme Premier ministre, en l’occurrence Mme Mame Madior Boye, brillante magistrate, qui officiera à la tête du gouvernement de 2001 à 2002. Au mois de mai 2010, une sorte de révolution se produira sous le régime libéral. En effet, avec le vote de la loi n° 2010-11 du 28 mai 2010 sur la parité entre hommes et femmes dans les fonctions électives, le nombre des députés femmes est passé de 33 à 64 sur un total de 150 à l’Assemblée, soit 42,7 %. Cette avancée spectaculaire met en évidence le résultat positif du combat des femmes pour le progrès et le leadership féminin. En avril 2019, le président de la République nomme un gouvernement de 32 ministres et 3 secrétaires d’État dont 25 % sont des femmes. Certes le gouvernement du Sénégal a fait des avancées louables, mais des pays comme l’Éthiopie et le Rwanda sont de loin en avance. En 2019, les femmes rwandaises détiennent 40 % des portefeuilles ministériels et représentent plus de 60 % des députés tandis qu’en 2018, en Éthiopie, le Premier ministre a confié la moitié des postes de son gouvernement (50 %) à des femmes. Les parlementaires éthiopiens ont aussi désigné une femme pour devenir présidente du pays. Même si ce poste est purement honorifique, il est bon de relever cet acte louable. Ainsi, l’Éthiopie et le Rwanda sont les rares pays africains à avoir fait des progrès visibles en matière de parité hommes-femmes. Le dernier exemple en date, c’est l’accession du pouvoir d’une femme à la tête de la Tanzanie. La vice-présidente de ce pays, Samia Suluhu Hassan, a prêté serment, vendredi 19 mars, pour succéder au président John Magufuli qui venait de décéder, devenant la première femme, musulmane en plus, à diriger ce pays d’Afrique de l’Est. Voilà beaucoup d’exemples qui montrent que le leadership suprême de la femme sénégalaise est possible et il faut le soutenir pour qu’on dise enfin, Madame le président de la République du Sénégal.

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La promotion de la femme

Ceci peut ressembler à un rêve pour beaucoup d’hommes et même des femmes astreintes par leur culture, leur éducation, leur niveau d’émancipation ou leur manque d’ouverture au reste du monde. Pour eux, la femme ne saurait diriger des hommes. Sur le plan religieux, tels les moments de prières, ceci se comprend et ne peut point faire l’objet de débat dans notre pays. Cependant, la réalité du terrain montre bien que les femmes dirigent des hommes dans les milieux professionnels, dans les mouvements associatifs, socio-culturels et même politiques. Cela ne les empêche pas d’être de bonnes épouses à l’image de la présidente de la Tanzanie. Dans le système des Nations-unies (ONU), l’objectif ultime est l’effectivité de la parité : autant de femmes que d’hommes dans tous les services. Ceci est en passe d’être une réalité eu égard à la considération que l’ONU accorde à cette cause. Par exemple, en cas de recrutement ou d’avancement, à compétence égale, la femme est favorisée. Il est possible que le Sénégal s’approchât un jour de cet objectif, autant les femmes font parler d’elles de plus en plus. Elles ont décidé de prendre en main leur destin à travers plusieurs associations et mouvements comme l’Association des Juristes du Sénégal (AJS), la Fédération des Associations Féminines du Sénégal (FAFS), le Groupement des Femmes rurales du Sénégal (GFRS), FAWE – Sénégal (Forum for Africa Women Educationalists) qui met en exergue le rôle des femmes dans l’éducation, CLVF (Comité de Lutte contre les Violences faites aux Femmes), Siggil Jigeen (élever la femme), EDEEN (Entente pour le Devenir de l’Enfance et de l’Environnement), le Conseil Sénégalais des Femmes (COSEF) qui focalise son combat contre la marginalisation politique des femmes et qui a joué un rôle déterminant dans la mobilisation de celles-ci en vue de la loi sur le parrainage. La liste des regroupements de femmes engagées est assez longue. Des femmes qui doivent rester persévérantes, combatives, persuasives, pacifiques, ignorer leurs détracteurs pour avancer. Grâce à leurs compétences, les femmes sénégalaises sont de plus en plus présentes dans les cercles de décision politique et sur des positions de responsabilités gouvernementales. Ainsi, elles font parler d’elles à l’Assemblée nationale où elles se battent sans complexe pour imposer leur voix. Sur le plan des contradictions politiques, les femmes des bords opposés ne se laissent pas faire. C’est grâce à leur dynamisme, leur charisme, leur capacité d’influence et de mobilisation qu’elles apportent beaucoup de vitalité à la démocratie. L’image négative des femmes dans la politique, c’est malheureusement l’exploitation et la manipulation dont elles font l’objet de la part des acteurs politiques pour bénéficier de leur effet de masse contre de simples récompenses telles des T-shirts et des sommes d’argent modiques que toutes personnes qui sont dans le besoin sont obligées d’accepter. Pourtant, la réalité est que les femmes élisent les pouvoirs. Avec leur effet de masse, leur force de frappe, elles peuvent faire et défaire le « monde », changer les règles du jeu, si elles sont conscientes de leur puissance et sont organisées. Les femmes sont également représentées dans de grandes structures publiques et privées, notamment dans les secteurs financier, éducatif, de l’ingénierie et du management. Elles contribuent ainsi à rehausser l’image du pays en matière de progrès social et économique. Je rends hommage à Maïmouna Ndour, patronne de presse, elle est l’une des pionnières dans ce domaine. Elle force l’admiration de ses confrères mâles. Anta Babacar Ngom aussi, directrice générale de la Sedima. Elle réalise des performances extraordinaires dans l’agroalimentaire. Son KFC où 100 % de son personnel est féminin, est un exemple de réussite. Ainsi, elle contribue à réduire la discrimination dans le marché du travail qui favorise l’homme au détriment de la femme. Amy Sarr Fall est une autre personnalité de la presse. Jeune, intelligente et ambitieuse, elle ne passe pas inaperçue même si elle n’est pas constante dans les espaces médiatiques. Chacune de ses sorties est un rendez-vous majeur suivi par toute l’opinion. Sa revue, Intelligence Magazine, ainsi que sa stature de grande dame sereine font d’elle un leader respecté qui contribue à la promotion de la jeunesse et du Leadership féminin. Professeure Fatou Sow Sarr est Maître de conférences à l’IFAN, Université Cheikh Anta Diop de Dakar. Cette dame courageuse, engagée et d’esprit ouvert, est auteure de plusieurs ouvrages et articles dont : l’entreprenariat Féminin et la transformation des rapports de pouvoir au Sénégal et Luttes politiques et résistances féminines en Afrique. Elle est également Experte en genre auprès d’Institutions des Nations Unies. Sa consœur, Docteur Fatou Diouf, professeur d’Université, une femme éloquente et intelligente, est parmi les rares femmes distinguées dans le domaine de l’économie maritime au Sénégal et en Afrique. Sans oublier l’ancienne ministre Mme Fatou Blondin Ndiaye Diop, une femme engagée et courageuse dans les combats citoyens. Ces exemples ne représentent qu’une goutte d’eau dans un océan de talents féminins. En somme, les femmes Leaders qui excellent par leur influence, sont nombreuses et présentes dans tous les secteurs d’activité où elles font valoir leurs compétences, à savoir les banques et assurances, l’ingénierie, la presse, les arts et cultures. Sur le plan africain, elles produisent jusqu’à 65 % des biens économiques du continent même si elles ne représentent que 8,5 % des emplois non-agricoles. Cela signifie que leur secteur de prédilection est l’agriculture et ses dérivées. Au Sénégal, les femmes sont des agents majeurs de développement, elles représentent près de 47 % de la force de travail. Néanmoins, elles ont besoin d’être mieux organisées en œuvrant de sorte qu’elles aient plus confiance en elles et les mêmes chances que les hommes dans l’environnement professionnel. Malgré tout ce qui précède, on ne sent pas la manifestation de leur engagement d’arriver à la station suprême. Certainement, la réalité du terrain n’est pas toujours en leur faveur. Celles qui ont tenté leur chance lors d’élections présidentielles se sont retrouvées avec des scores si bas qu’elles n’ont pas eu le courage de poursuivre l’aventure. C’est le cas, en 2012, de la styliste Diouma Dieng Diakhaté et du professeur Amsatou Sow Sidibé qui étaient les seules femmes candidates. En 2019, les trois femmes candidates ont été toutes recalées.

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Le temps a-t-il changé ou, du moins, doit-il changer ?

Pour cela, il faut continuer d’investir dans la promotion humaine de la femme. Elle deviendra un jour une force incontournable qui s’imposera. Avec l’accompagnement des acteurs de la promotion des droits de la femme y compris les organismes financiers, les gouvernants et les agences des Nations Unies, plus de filles vont être scolarisées, les femmes reçoivent un encadrement, des financements et mettent de plus en plus en exergue leur fonction sociopolitique et surtout économique. Les femmes doivent être encouragées à briguer les mairies, le Parlement et au-delà. La parité doit être une réalité grâce à la vision du pouvoir central et son désintéressement. Parallèlement, l’éducation et la sensibilisation des hommes doivent être poursuivies avec une meilleure stratégie afin de susciter respect, dompter les esprits dominateurs, esclavagistes, et violents. Le discours public à l’endroit de la femme doit être empreint d’égard et de respect. La discrimination de la femme africaine doit cesser. C’est un phénomène de société qui nécessite une mobilisation pour un changement qui ne sera que bénéfique. Le chemin peut être long, mais le résultat n’est pas impossible. Tous les hommes et femmes épris de justice, les leaders d’opinion, tous ceux qui ont de l’influence sur le plan politique, culturel, social et religieux, les porteurs de voix, doivent se mobiliser pour rendre à la femme africaine toute sa dignité ; que son intégrité totale soit une réalité.

L’homme et la femme sont d’égale dignité

L’Islam estime qu’honorer la femme est le signe d’une personnalité saine, accomplie et vertueuse. Le prophète Seydina Mohamed (Paix et salut sur lui) a dit à cet effet : « Le croyant dont la foi est la plus complète est celui qui a le meilleur comportement ; et les meilleurs d’entre vous sont les meilleurs envers leurs femmes ». Contrairement à certaines spéculations, l’Islam ne considère pas la femme comme un être imprévisible ou inférieur comme c’était le cas dans la période avant l’Islam. Au contraire, la femme a autant de droits que l’homme et des devoirs qui sont conformes à ses capacités et à sa nature. Dieu s’adresse de la même manière aussi bien à la femme qu’à l’homme pour les mettre face à leurs responsabilités. Sous un autre angle, la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (DUDH) en son article 16 :1 stipule ceci : « Á partir de l’âge nubile, l’homme et la femme, sans aucune restriction quant à la race, la nationalité ou la religion, ont le droit de se marier et de fonder une famille. Ils ont des droits égaux au regard du mariage, durant le mariage et lors de sa dissolution ».







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