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Assises De La Presse

Une corporation qui revendique ses droits, c’est devant le ministère de la Communication que cela se passe. Le rouge est de sortie et les prises de parole aux allures de revendications se succèdent. Devant une forêt de micros estampillés des logos de tout ce que la presse nationale compte d’organes, la parole est à qui veut la prendre.

Tous les corps du métier se retrouvent pour dénoncer les violences, les agressions, les intimidations et autres abus dont ils font l’objet.

Le tout subi dans une précarité toujours dénoncée mais jamais levée. Le 3 mai dernier, la presse sénégalaise a donc répondu massivement à l’appel au sit-in, à l’occasion de la célébration de la Journée mondiale de la liberté de la presse.

Sous le thème : « l’information comme bien public », sur l’ensemble du territoire, les journalistes, techniciens et professionnels des médias, correspondants régionaux etc., ont poussé de la voix devant les autorités. Au-delà des revendications portées par les associations et autres syndicats du métier, il est apparu également toute la dichotomie dont souffre la profession.

Entre les médias dits du service public (RTS, Le Soleil et APS), et les médias dits privés, une ligne de démarcation invisible mais bien réelle est à souligner. Les médias du service public qui sont aussi appelés médias gouvernementaux par leurs homologues et confrères du privé. Comme si la liberté d’expression ne saurait être relevée que du côté des privés et serait absente du côté des médias publics.

Dans une tentative de catégorisation qui ne réussit pas toujours, la presse privée qui se voudrait indépendante, mais qui n’y parvient pas encore, n’a de cesse de se positionner comme une alternative. A la manière d’un miroir à double face, dont chaque presse constituerait une face, c’est au lecteur, téléspectateur ou auditeur de choisir celle devant laquelle il voudrait se voir. Seulement au-delà d’une analyse simpliste, il n’y a point de dupe dans cette démarche. Les règles semblent préétablies et dans la course au lectorat ou à l’audimat, les jeux sont ouverts.

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En revanche, dans une habile tentative de maintenir l’équilibre, de peur de ne pas voir chez les uns (médias publics), ce qui serait traité par les autres (médias privés) et vice-versa, certains ont compris qu’il faut opérer quotidiennement sa propre revue de presse. Dans un monde où l’information est devenue capitale (les médias ne sont-ils pas le quatrième pouvoir ?), il serait alors quelque peu dangereux d’accepter d’être informé que par l’une ou par l’autre presse. La désinformation ou la manipulation pourrait vite s’établir et pas toujours du côté où l’on s’y attend. Chez l’une comme chez l’autre, le traitement de l’information reste tributaire d’une ligne éditoriale qui sert alors de tamis, avant toute transmission ou diffusion auprès du lecteur, auditeur ou téléspectateur. Au rendez-vous de l’offre et de la demande informationnelle, le Sénégalais se fait l’arbitre d’une bataille médiatique qui signe l’armistice le temps d’un sit-in. Seulement, comme pour les revendications syndicales, le patron ne saurait manifester aux côtés de ses agents alors même que les premiers sont généralement dénoncés par les seconds.

Une alliance contre-nature car les intérêts sont souvent loin d’être communs. Sur le plateau de la 7TV, l’émission spéciale, tenue au soir du sit-in de la presse, réunissant le Directeur de la Communication, le Secrétaire général du Synpics, des patrons de presse et des journalistes, a pris des allures d’«Assises de la presse » justement. Chacun a défendu son point de vue, selon la posture qui est la sienne. Lorsque le Directeur de la Communication évoque l’aide à la presse, voici que l’animatrice et non moins patronne de la chaîne éponyme opère une mise en garde. Les conditions et les barèmes de l’aide à la presse ne font jamais l’unanimité du côté des bénéficiaires. Cependant, là encore, le jeu demeure faussé et la règle du « qui paye commande » mérite d’être convoquée.

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L’indépendance tant chantée est aussi une indépendance financière. En revanche, les seuls gagnants dans cette sempiternelle confrontation opposant médias publics et privés sont, à coup sûr, les nouveaux médias. Les réseaux sociaux sont devenus de puissants canaux de transmission de l’information, dans cette ère du numérique. Seulement, sur ces plateformes non plus, les dérives ne manquent pas d’être relevées. Entre le partage viral de « fake-news » et l’absence de règlementation, la liberté peut être aussi synonyme de danger. Alors, anciens comme nouveaux médias sont condamnés à revoir les règles, et les assises de la presse tant évoquées deviennent un impératif. Pour tous.







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