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Projections

Notre pays reverdit à la faveur d’une bonne pluviométrie. Un tapis herbacé d’une rare étendue touche presque tout le pays profond où les paysans semblent retrouver, en le gardant, le sourire des périodes fastes. L’hivernage 2021 est pluvieux. Tout le monde s’en aperçoit. Il s’y ajoute une répartition spatiale qui laisse présager une fin heureuse avec des récoltes records en mil, millet, maïs, fonio, arachides et autres tubercules.

La Sonacos, d’habitude circonspecte à ce stade du parcours de la saison, anticipe sa campagne de collectes de graines en multipliant les points de ramassage. Riche des précédentes opérations, l’huilier saura associer efficacité et diligence pour corriger les imperfections, réduire les incertitudes et dissiper les malentendus souvent source de tension entre acteurs des différentes filières. Il va de soi que de telles perspectives réjouissantes nécessitent en amont des réglages circonstanciés. Le but ultime est de récompenser les efforts pour entretenir le moral paysan, socle d’une sérénité dans un Sénégal tenaillé par une pandémie en léger reflux, une récession flottante à l’origine d’une fluctuation économique presque intenable.

Intenable ! A vrai dire, une telle variation conjoncturelle peut être jugulée et maîtrisée. Les circuits intermédiaires fleurissent dans le monde agricole et l ‘épuisent à force de prélèvements. Du semis à la récolte, le paysan subit des ponctions que rien ne justifie dans l’absolu. Au contraire, celles-ci pervertissent le système agricole à divers échelons, parasitent du même coup les mécanismes par lesquels les agriculteurs devraient obtenir de substantiels gains censés accroître leurs revenus, donc leur pouvoir d’achat.

Ces intermédiaires vivent comme des sangsues et tirent plus profits des fruits que les acteurs eux-mêmes. Un comble ! Il est étonnant que ces pratiques, d’une autre époque, survivent encore. D’autant que l’aspect immoral transparaît.

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La ville sainte de Touba a revêtu ses habits neufs de toujours pour l’édition 2021 du Magal : foi, abnégation et estime de soi. Au cœur du Baol, la cité religieuse renoue non seulement avec la ferveur mais renouvelle son ardent attachement aux valeurs essentielles prônées par le fondateur Cheikh Ahmadou Bamba MBacké.

L’hivernage revigore donc ce Baol jadis bassin arachidier redevenu le bastion cultuel d’un pays en quête de repères. Sur le plan religieux tout au moins le Sénégal paraît bien arrimé. Il présente même une singularité. La fore spirituelle contient les émotions et irrigue les déterminations. Ces dernières rendent fort surtout face aux crises vécues à des degrés divers par des humains que le doute assaille. Les pôles religieux du pays, à l’image de Touba, montrent la voie.

Le retour des pluies, caractérisées par leur abondance et une bonne répartition dissipe bien des angoisses et entretient l’enthousiasme d’une promesse de récolte non moins abondante. L’embellie n‘est pas pour déplaire les autorités politiques au premier rang desquelles se trouve placé le Président de la République. Cet hivernage est assurément un… don du ciel ! Pour sa traditionnelle visite à Touba, à la veille du Grand Magal, Macky Sall a livré un hôpital de référence qui comble d’aise le Khalife Général des Mourides, Serigne Mountakha Mbacké Bassirou. On le devine, le chef repart rasséréné. D’autant que l’opposition arrive à son tour dans la ville sainte dans une surprenante discipline.

« Pas de politique », avait laissé entendre le sage de Darou Miname. Message reçu, entendu et respecté comme il se doit. Ce gain politique est à mettre à l’actif de toute la classe politique sénégalaise consciente que ce rassemblement, teinté de forte ferveur religieuse, transcende les clivages qui s’estompent, le temps d’un Magal. Cette relative accalmie politique nous éloigne des prises de positions tonitruantes qui rendaient les Sénégalais bien pâles.

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A défaut de s’adapter, il revient aux acteurs politiques d’inventer un nouveau rythme qui ne brutalise pas la société habituée jusque-là à de déplorables scènes d’invectives. Un examen minutieux des rapports de tendances révélerait une inadéquation entre l’offre politique et les attentes des Sénégalais qui, faut-il le rappeler, sont des électeurs dans l’âme.

De ce fait, les locales sont pour bientôt. Les choix de proximité ôtent à ce scrutin des consignes de vote dont raffolent les états-majors politiques. Une telle spécificité, non seulement aère le jeu électoral, mais met en compétition des candidats attachés au terroir déterminés à le servir plutôt qu’à s’en servir comme un levier promotionnel.

Pour l’avoir sûrement bien compris, le Président Macky Sall a clarifié sa posture à New York. Devant un public conquis, il a estimé d’abord que les locales auront lieu à date échue. En clair, pas de report d’échéance. Il dissipe ainsi le doute entretenu par des figures cachées mais connues qui caressaient le secret rêve de grouper les locales et les législatives. Pour le président donc, en maintenant le calendrier des prochaines élections, il se donne un temps d’observation et d’analyse des tendances lourdes.

Mieux, ces consultations pourraient constituer un baromètre d’appréciation des forces en présence en même temps qu’une bonne base de lecture des projections qui vont se dessiner. Recomposition en vue ? Alliances et mésalliances ? Enjeux nouveaux ? Par quel chemin passe le salut du pays ? Verra-t-on certains renoncer à ce qu’ils sont pour devenir autres ? Quels chantiers d’avenir pour quel leader ? Quelque part, le sort du quinquennat actuel dépendra de l’issue des élections locales prévues au mois de janvier 2022. Chacun récoltera ce qu’il a semé, à commencer par le chef de l’Etat.

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Son horizon devrait davantage s’élargir avec sa prochaine présidence en exercice de l’Union africaine en remplacement du Congolais Félix Tshisekedi. Au plan international l’agenda s’en trouverait épaissi avec les sujets récurrents, la dette de l’Afrique, la pandémie (et les vaccins), la riposte africaine (concertée), le réchauffement climatique, la déforestation, l’assèchement du Lac Tchad, les populations déplacées, les migrations violentes et déchirantes des jeunes, les crises socio-politiques, les conflits, le terrorisme, l’instabilité dans la sous-région, la Guinée, le Mali, la Centrafrique, entre autres.

Verra-t-on le président Macky Sall davantage s’impliquer en Guinée post Condé ? Lequel, c’est connu, n’était pas en odeur de sainteté avec le Sénégal et voyait en Macky Sall, l’instigateur de « coups répétitifs » adossés à des « amitiés » qui aiguisent les soupçons. Alpha Condé fondait sa doctrine diplomatique sur ces réserves que rien ne venait étayer. Maintenant qu’il est écarté du pouvoir par des militaires excédés par ses tartufferies, une voie royale se dégage pour une implication plus significative du Sénégal dans la transition politique guinéenne. Dakar verrait d’un mauvais œil la Guinée basculer à son tour dans une insoutenable instabilité avec des conséquences socio-économiques incalculables.

Le pays foisonne de richesse. Il aiguise des appétits et attire. Les éperviers et les charognards, connus pour leur rapacité, sont à l’affût, prêts à bondir sur des proies faciles.







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