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De L’indigence À L’emergence

Il y a quelques mois, le Sénégal s’était passionné pour le débat sur le déboulonnage de la statue de Faidherbe dans la vieille ville de Saint-Louis. La réponse se trouve au pont de Foundiougne. La meilleure façon de déboulonner Faidherbe n’est pas dans le verbe mais dans le béton et le goudron. Pour déboulonner Faidherbe, il faut construire un deuxième pont plus grand et plus majestueux, comme l’Etat vient de le faire à Foundiougne.

Ainsi, le vieux pont sera le symbole du passé et le nouveau, celui d’un Sénégal moderne et conquérant. Le Sénégal ne pourra jamais remercier Wade d’avoir ouvert les portes de l’Hubris (démesure) en 2000. Chaque fois que je passe par l’autoroute à péage, je ne peux m’empêcher de penser à l’ancienne minuscule route entre Bountou Pikine et l’ancien immense rond-point de la Patte d’Oie. Cette minuscule route, symbolise un Sénégal indigent. Avec l’autoroute à péage, la route secondaire de Wade (celle que l’on prend à défaut de l’autoroute), est deux fois plus grande que l’ancienne route principale de Diouf. Depuis que Wade a ouvert les portes de l’Hubris, on est en train de passer d’un Sénégal indigent à un Sénégal émergent, en passant des Tata au Ter, d’une route nationale minuscule aux autoroutes, des bacs aux ponts, d’un port toujours congestionné et qui remonte à la colonisation, au port de Ndayane.

Au fond, en termes simples, c’est ça l’émergence. C’est juste penser que rien n’est jamais suffisamment grand pour son pays, comme le pensent les habitants de Dubaï, qui sont passés sans transition de l’indigence du désert et de la pêche à l’incarnation de la prospérité. Il y a un certain nombre de constantes dans l’Emergence, et l’une des plus importantes est que le leadership politique ne doit pas être à la remorque du peuple par populisme. Imaginez un peu ce que le Sénégal serait aujourd’hui si Wade avait arrêté ses grands travaux, à commencer par l’autoroute, en écoutant le peuple et quelques populistes qui attaquaient ces projets sous prétexte que «l’on ne mange pas le béton et le goudron, et le Peuple a faim».

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Wade avait raison de continuer, parce que ses grands travaux contribuent à la croissance, parce que le béton et le goudron se mangent, car chaque nouvelle route, autoroute ou pont, crée de nouvelles opportunités économiques. Il avait aussi raison de ne pas renoncer au Monument de la renaissance africaine, devenu aujourd’hui symbole et la carte de visite de Dakar, et qui a surtout relégué dans les poubelles de l’histoire, la fameuse statue coloniale Demba et Dupont. A l’instar du Monument de la renaissance, devenu la carte de visite de Dakar, Diamniadio doit devenir celle d’un Sénégal émergent et conquérant, reléguant ainsi Dakar à sa place : l’histoire, notre passé, comme c’est le cas en Malaisie, entre Kuala Lumpur et Putra Jaya ou entre Dar es Salam et Dodoma en Tanzanie.

 Tout à Dakar, le cœur de l’Etat, est vestige colonial, à commencer par le Palais présidentiel. Mais heureusement, le cannibalisme du béton et de l’immobilier débridé comme dans tous les pays émergents, est en train de se substituer à la volonté politique, en effaçant les traces du Dakar colonial. Dans quelques années, avec le cannibalisme du béton, ne restera du Dakar colonial que le Palais, l’Assemblée nationale, la marie et le ministère des Affaires étrangères, car le Building et Sandaga ont déjà changé de siècle.

Dans notre marche du Sénégal indigent vers le Sénégal émergent, on entendra toujours des arguments comme, «on ne mange pas le béton» ou tout le monde n’a pas les moyens de payer le billet du Ter ou le péage du Pont. C’est fort normal car, comme disait Winston Churchill, «le vice inhérent au capitalisme consiste en une répartition inégale des richesses. La vertu inhérente au socialisme consiste en une égale répartition de la misère». L’histoire lui a donné raison, car aucun pays n’a émergé avec la vertu inhérente du socialisme. Même les Chinois ont été obligés de recourir au «vice inhérent» du capital, pour trouver le chemin de l’Emergence.

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