Le nombre de cas d’infection par le variant Omicron a explosé partout sur la planète au cours des deux derniers mois. Dans de nombreux pays, le pic de cette vague a même dépassé ceux des vagues précédentes, causées par d’autres variants. Depuis quelque temps, des patients se retrouvent infectés par un sous-variant d’Omicron, baptisé BA.2. On pourrait avoir tendance à imaginer que BA.2 est le descendant de BA.1 (aussi appelé B.1.1.529), mais il est plus juste de le considérer plutôt comme un « variant frère ».
PETIT RAPPEL SUR LES VARIANTS
Les virus, et en particulier les virus à ARN tels que le SARS-CoV-2, font de nombreuses erreurs (ou mutations) lorsqu’ils se reproduisent. Ils ne peuvent corriger ces erreurs (même si les coronavirus possèdent un mécanisme de correction des erreurs, son efficacité n’est pas parfaite, ndlr), et de ce fait sont constamment en train d’évoluer. Lorsque ces mutations se traduisent par des modifications de l’information génétique portée par le virus, on parle de « variant ». Si l’on suppose que ces modifications peuvent avoir un impact sur les propriétés du variant, et risquent de le rendre plus dangereux que les versions précédentes du virus, et si de surcroît l’on constate qu’il se transmet significativement plus dans certains pays, il est alors classé en « variant d’intérêt » et surveillé. Si les modifications d’un variant d’intérêt se traduisent par des changements remarquables d’une ou plusieurs de ses caractéristiques (contagiosité, virulence, échappement mmunitaire, symptomatologie ou résistance aux antiviraux, impact sur les performances des tests de détection… ), il est requalifié en « variant préoccupant ».
Omicron est un variant « hautement divergent », car il a accumulé plus de 30 mutations dans sa protéine Spike. De ce fait, la protection conférée par une précédente infection ou par la vaccination a diminué tandis que, en parallèle, sa transmissibilité a augmenté. Omicron a un taux de réinfection plus élevé que les précédents variants, est plus contagieux, et limite la protection que procurent les vaccins : c’est pour toutes ces raisons que l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) l’a rapidement classé en « variant préoccupant » le 26 novembre 2021.
QU’EST-CE QUE LE LIGNAGE ?
Un lignage est un groupe de variants génétiquement proches, qui dérivent d’un ancêtre commun. On parle aussi de sous-variants. On dénombre trois sous-lignages pour le variant Omicron : B.1.1.529 ou BA.1, BA.2 et BA.3. Si l’OMS n’a pas requalifié BA.2, le Royaume-Uni l’a, lui, étiquetté « variant en cours d’investigation ». Ce statut signifie que BA.2 n’est pas encore un variant d’intérêt ou préoccupant distinct, mais qu’il est attentivement surveillé. Omicron n’est pas le premier variant à avoir des sous-lignages. L’an dernier avait émergé le variant « Delta plus » (ou AY.4.2), puis Omicron a émergé.
EN QUOI BA.2 EST-IL DIFFÉRENT ?
Bien que les premières séquences de BA.2 aient été soumises par les Philippines – et que des milliers de cas d’infection par ce variant aient été observés, y compris aux États-Unis, au Royaume-Uni ou en Australie – son origine précise demeure inconnue. Ses propriétés font également l’objet de recherches. Bien qu’il n’existe pour l’instant aucune preuve qu’il provoque des formes plus graves de la maladie, plusieurs choses préoccupent les scientifiques.
1. BA.2 EST PLUS DIFFICILE À DIFFÉRENCIER
L’un des marqueurs qui permettait de différencier Omicron version BA.1 des autres variants du SARS-CoV-2 lors des tests PCR était l’absence, dans les résultats desdits tests, du signal correspondant au gène S (on désigne cette absence de détection par l’acronyme SGTF, pour « S gene target failure »). Mais ce n’est plus le cas pour BA.2. L’incapacité de détecter ce souslignage de cette façon a mené certaines personnes à le qualifier de « sous-variant furtif ». Cependant, cela ne signifie pas que nous ne pouvons plus utiliser les tests PCR pour détecter BA.2. Cela signifie simplement que les échantillons testés positifs doivent désormais être séquencés pour déterminer à quel variant nous avons affaire. Cela prend davantage de temps, mais c’était déjà le cas avec les variants précédents.
2. BA.2 POURRAIT ÊTRE PLUS INFECTIEUX
Ce point est peut-être plus préoccupant : des preuves indiquant que BA.2 pourrait être plus infectieux que l’Omicron originel (BA.1) s’accumulent. Une étude préliminaire réalisée au Danemark, où BA.2 a largement remplacé BA.1, suggère que la susceptibilité à l’infection des personnes non vaccinés a augmenté (elle est un peu plus de deux fois supérieure à ce qu’elle était avec BA.1).
En outre, selon ces travaux, les personnes entièrement vaccinées (deux doses) sont 2,5 fois plus susceptibles de contracter BA.2 que BA.1. Cette susceptibilité à BA.2 est presque trois fois plus importante pour les individus qui ont reçu une troisième dose (les auteurs précisent que chez les personnes qui ont reçu cette troisième dose, la susceptibilité et la transmissibilité est réduite par rapport aux personnes qui n’ont reçu que deux doses, ndlr). Les auteurs ont analysé plus de 2 000 cas d’infections primaires par BA.2 au sein de foyers danois durant le mois de décembre, enregistrant le nombre de cas survenus sur une période de suivi de sept jours. Ils ont également évalué le taux d’attaque secondaire (autrement dit, la probabilité, au sein d’un groupe spécifique – foyer, contacts proches – qu’une infection survienne chez des personnes sensibles). Leurs résultats indiquent qu’il serait de 39 % dans les foyers où circule BA.2, contre 29 % dans le cas de BA.1. Cette étude danoise est encore au stade de « preprint », ce qui signifie qu’elle n’a pas encore été revue par des scientifiques indépendants. D’autres recherches sont donc nécessaires pour confirmer le fait que BA.2 est réellement plus infectieux que BA.1.
DE NOUVEAUX VARIANTS SONT SUSCEPTIBLES D’ÉMERGER
Nous devons nous attendre à ce que de nouveaux variants et sous-variants continuent à émerger. En effet, avec de tels taux de transmission, le SARSCoV-2 a d’innombrables opportunités de se reproduire, et donc de subir des mutations. Un moyen de limiter les conséquences de cette situation est bien évidemment de ralentir la transmission virale et de diminuer la taille des populations susceptibles, dans lesquelles le virus peut se répliquer sans entrave. Les approches basées sur la distanciation sociale et le port du masque, ainsi que l’augmentation de la couverture vaccinale globale, restent donc d’actualité pour ralentir les émergences de nouveaux variants.
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