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La DÉrive Mafieuse D’un Mouvement IndÉpendantiste NommÉ Mfdc

En pleine forêt d’un village frontalier situé entre la Gambie et le Sénégal, sept militaires sénégalais du contingent de la Cedeao avaient été capturés le mois dernier avant d’être libérés. Sains et saufs ! Ici, il nous plait de magnifier les fruits des négociations diplomatiques ayant abouti à la libération de nos braves « diambaars ».

Des tractations secrètes dont le seul objectif, dans le cas d’espèce, était le sauvetage de vies humaines. Pour ce genre d’opérations, en effet, la diplomatie « parallèle » reste le meilleur moyen d’aboutir à des résultats concrets. C’est-à-dire à une issue heureuse. Et apparemment, Dakar s’était mis à l’écart des négociations ayant débouché sur la libération de nos soldats. La raison en est sans doute que le président de la République est dépité et dégoûté par les agissements audacieux et criminels du Mfdc (Mouvement des forces démocratiques de Casamance). A preuve par le communiqué de l’Armée nationale prenant acte de la libération de ses soldats. Un communiqué dans lequel l’Etat-major a pris soin de préciser que l’attaque de son contingent s’était bien déroulée en territoire gambien, contrairement aux allégations propagandistes du Mfdc relayées par des médias numériques. « Aussi, les armées restent plus que jamais déterminées à préserver l’intégrité du sanctuaire national, à poursuivre la lutte contre les trafics illicites et à participer aux initiatives régionales de maintien de la paix » lit-on dans le communiqué de la Direction de l’information et des relations publiques des Armées (Dirpa).

Mais encore une fois réjouissons-nous du fait que cette fameuse diplomatie parallèle a pu sauver des vies. Car si les forces de la Cedeao avaient tenté de mener une opération commando visant à libérer les otages, il aurait pu y avoir un carnage. Les experts militaires vous le diront, les opérations de libération d’otages sont parmi les plus complexes et les plus périlleuses à réaliser. Ce bien que, en ce qui le concerne, le Sénégal soit doté d’une unité d’élite nommée Groupe d’Intervention de la Gendarmerie Nationale (Gign) dont les « superhommes » sont équipés et entrainés pour des missions concernant les prises d’otages et les enlèvements. Mais nous n’en étions pas là ! Tout est bien qui finit bien. Mais pour combien de temps ? Car au vu de la sérénité, de l’audace et la détermination avec lesquelles le chef rebelle Salif Sadio avait kidnappé des soldats sénégalais pendant trois longues semaines jusqu’à pousser la Cedeao à négocier, tout indique qu’il pourrait recommencer à tout moment. Sauf si l’armée sénégalaise ou l’armée gambienne décrète les villages squattés et conquis par le Mfdc comme étant une « zone rouge » dans laquelle il ne faut plus s’aventurer ou patrouiller.

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De l’indépendantisme au banditisme…

« Indépendantisme » et « séparatisme » : si ces mots ne font plus partie du vocabulaire des acteurs et auteurs de la crise casamançaise, c’est parce que, tout simplement, le Mouvement des forces démocratiques de Casamance (Mfdc) a perdu son âme et ses idéaux originels. Car l’indépendantisme comme le séparatisme, c’est une aspiration minoritaire à l’indépendance ou à la souveraineté. C’est pour cela que ces mots sont souvent utilisés dans un cadre politico-diplomatique pour revendiquer ou négocier un territoire tout en manifestant une désobéissance collective à l’autorité d’un Etat.

Le Mdfc, comme la plupart des mouvements indépendantistes connus dans le monde, a pour origine des revendications territoriales, ethniques et historiques. Et chaque mouvement de ce genre a sa manière d’exprimer celles-ci par diverses formes de lutte : terrorisme, guerre, dialogue, campagne médiatique, prise d’otages, attentats etc. Malheureusement pour les populations casamançaises, dès le départ en décembre 1982, le Mdfc de feu abbé Diamacoune Senghor, pour ce qui le concerne, avait opté pour un conflit armé.

Lançant par là un défi gravissime à l’autorité de l’Etat sénégalais. D’où l’attaque contre la gouvernance de Ziguinchor et la mise à feu du drapeau national remplacé sur le mât de la gouvernance par « celui » de la Casamance. Ces rebelles pionniers des années 80 étaient convaincus qu’ils allaient obtenir l’indépendance. Au moins, ils croyaient à un idéal. D’où le début d’un très long conflit armé causant des centaines de morts et des centaines de milliards de francs de dégâts.

Après presque 40 ans de lutte armée ayant dérivé ces dernières décennies vers le banditisme, de nombreux membres fondateurs vivants ou décédés avaient très tôt pris conscience du fait qu’ils n’obtiendraient jamais l’indépendance de cette région naturelle du Sénégal. Cette désillusion des pionniers a favorisé la dérive mafieuse du mouvement sur le terreau duquel ont essaimé des gangs qui coupent des routes, braquent des véhicules avant de dépouiller les passagers avant de leurs biens, cambriolent des commerces etc.

 Lors des attaques, les victimes qui tentent de résister sont froidement abattues à la Kalachnikov. Mais, aussi graves fussent-elles, ces attaques étaient jusque-là circonscrites sur le territoire national. Mais voilà que le « combattants » du Mfdc, faisant preuve d’une cupidité et d’une audace jusque-là inconnues, vont jusqu’à attaquer des patrouilles de la Cedeao. Et sur un territoire étranger ! Non contents d’avoir tué quatre soldats sénégalais en mission communautaire, ils en ont capturé sept ! Ignorant que, certes, les soldats ainsi attaqués sont de nationalité sénégalaise mais qu’ils agissaient sous la bannière de la Cedeao ! S’en prendre à eux était donc aussi grave qu’attaquer des soldats de l’ONU. Mais cela, Salif Sadio, un homme peu cultivé, l’ignorait. Sans oublier, par le passé, le nombre croissant d’assassinats politiques ou de règlements de comptes. Des assassinats dont ont été victimes, entre autres, des responsables politiques régionaux ou des faiseurs de paix comme Chérif Néma Aidara et l’ex-président du Conseil régional de Ziguinchor, Oumar Lamine Badji, froidement tués chez eux.

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Avec ces exactions barbares, aucun observateur sérieux ne pouvait plus considérer le Mdfc comme étant un mouvement indépendantiste. A partir de ce moment, l’armée sénégalaise devait traiter ses émanations comme des gangs et autres associations de malfaiteurs. Ce qui est regrettable, c’est que la passivité et l’impuissance de l’Etat du Sénégal s’ajoutant à la complicité de la Gambie ont fini d’installer une impunité totale en Casamance devenue une région de non-droit. On se demande en effet comment la Gambie, lovée à l’intérieur même du Sénégal, peut-elle laisser des éléments du Mfdc occuper des villages entiers sur son territoire ? Pourquoi ce pays dirigé par l’allié du Sénégal qu’est Adama Barrow peut-il permettre à des bandes criminelles d’utiliser son territoire comme base arrière pour attaquer nos soldats ? Des sanctuaires terroristes qui pendant des années ont prospéré sous l’œil tolérant et conciliant de l’armée gambienne ! Ou de ce qui en tient lieu…

Gambie, un pays receleur de malfaiteurs !

Bref, la Gambie n’est rien d’autre qu’un receleur d’Etat de malfaiteurs. D’ailleurs, la Dirpa dit cela en termes diplomatiques dans son communiqué en soulignant que l’attaque rebelle contre le contingent de l’armée s’est bien déroulée en territoire gambien. A bien des égards, la tolérance, la passivité et le laxisme de l’Etat du Sénégal contre ces bandes armées font apparaitre des discriminations territoriales.

Au constat, on se demande même si la Casamance est-elle réellement une région naturelle du Sénégal comme Saint Louis, Thiès, Fatick, Dakar, Kaolack ou Tambacounda ? Autrement dit, une région ordinaire où doivent s’appliquer rigoureusement les lois de la République.

En effet, le Sud du pays bien qu’étant la zone la plus militarisée est devenue le centre de gravité de la criminalité transfrontalière où des preneurs d’otages se replient dans des villages sans être traqués ou délogés par la Gign ou la Bip (Brigade d’intervention polyvalente, l’équivalent policier du Gign). Car si la prise en otages de nos militaires s’était déroulée à Keur Massar, Guédiawaye, Mbour, Gokhou-Mbathie (Saint-Louis) ou Mboro, le chef suprême des Armées ou le procureur de la République allait sans tarder actionner les éléments du Groupement d’intervention de la gendarmerie nationale (Gign) ou de la Brigade d’intervention polyvalente (Bip) pour donner l’assaut et les libérer.

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L’exemple par la bande à Alioune Abatalib Samb alias Ino et Alassane Sy dit Alex qui avait été démantelée par le GIGN. Et pourtant, les crimes qu’avaient commis ces malfaiteurs étaient beaucoup moins graves que ceux qui sont à l’actif de Salif Sadio et de ses gangs. Une chose est sûre et regrettable, la Casamance ainsi que les villages gambiens situés à la frontière avec cette région sont la seule zone de non-droit au Sénégal. Une zone dans laquelle des malfaiteurs, se prévalant de la « qualité » de membres du Mfdc, règnent sans partage et tuent, kidnappent, volent ou braquent en toute impunité des civils n’hésitant pas aussi à s’en prendre à des soldats de la Cedeao….

Il est vrai qu’au début de l’année 2021, l’Armée avait mené de grandes opérations militaires pour déloger les combattants du chef rebelle César Atoute Badiate et reprendre les sanctuaires et villages qu’ils occupaient près de la frontière avec la Guinée Bissau. Mais qu’en était-il avec les bases arrière se trouvant en Gambie et utilisées par l’autre chef rebelle du nom de Salif Sadio et ses ravisseurs ?

La réponse se trouve peut-être dans cet entretien que le président Macky Sall avait accordé à une radio allemande et diffusé il y a quelques jours. Après s’est félicité du dénouement heureux de l’affaire des soldats sénégalais capturés, le chef de l’Etat a remercié au passage « toutes les personnes qui ont rendu cela possible » ce happy end avant de manifester sa détermination à lutter contre le trafic de bois, notamment en Casamance. « Quel que soit le prix à payer, le Sénégal va préserver ses forêts », avait-il martelé. A la suite de cette déclaration guerrière, souhaitons que la mort des soldats sénégalais de la Cedeao ne soit pas passée par pertes et profits au nom d’une soi-disant paix en Casamance.







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