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Ancien Monde

Les armes tonnent à l’est de l’Europe. La Russie a envahi l’Ukraine. Un tel scénario n’était plus envisagé sous notre ère en dépit de la puissance de feu de certaines grandes nations dotées, de surcroît, de l’arme nucléaire à plusieurs têtes d’ogive. Il faut appartenir au monde ancien pour ne pas dire à l’ancien monde pour franchir le Rubicon et s’installer sans coup férir dans un pays autre que le sien.

Notre époque est certes trouble, instable et même peu sûre, mais elle ne mérite pas ces oukases venus du grand froid russe où règne en maître absolu et inamovible le « loup solitaire » qu’est Vladimir Poutine, ancien de la KGB et adepte de la roulette russe, son jeu favori.

Son poker menteur a désarçonné tout un monde, y compris l’Occident qui a pourtant les yeux de Chimène pour l’Ukraine, tant pour ses richesses fabuleuses, sa centralité géostratégique et sa proximité avec l’ogre russe. L’éclatement de l’URSS en 1991 libère l’Ukraine de l’étau de Moscou. Mais le pays vit dans une permanente hantise d’annexion (Crimée), d’occupation (Empire Ottoman) ou d’invasion (Russie) dont sa trajectoire historique reste fortement imprégnée depuis la lointaine période médiévale.

Sur ordre de Poutine donc, les chars russes entrent dans le pays slave et prennent la direction de Kiev, la capitale. Sur le chemin, ils rencontrent une farouche résistance des Ukrainiens héritée de la vaillance de ce peuple depuis les invasions mongoles au XIIIème siècle. L’Europe observe impuissante la pénétration des forces armées russes. Elle étale à la face du monde son incohérence, ses turpitudes et ses hésitations face à un Poutine orgueilleux, déphasé et très nostalgique du faste impérial de la Russie des tsars.

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Personne ne peut lui contester ses soucis de sécurité face à une Ukraine désireuse de rejoindre l’Europe politique (adhésion) et par ricochet d’intégrer l’OTAN, l’organisation politico-militaire de pays signataires du traité de l’Atlantique Nord avec des obligations de « sécurité et de défense collectives ». A cette fin le président d’Ukraine veut hâter le processus d’adhésion immédiate de son pays à l’UE dans le cadre d’un procédure spéciale. Le contexte s’y prête-t-il ?

L’arsenal militaire européen aux portes de la Russie ! Inadmissible. Insupportable. Impensable. Et même suicidaire ! La cinglante réplique du Chef du Kremlin équivaut au blocus de Cuba imposé par les Etats-Unis qui ne supportent pas que sur leur flanc sud flotte un drapeau soviétique hier, russe aujourd’hui. En invoquant le parallélisme des formes, Moscou rejette toute velléité de rapprochement de Kiev avec Bruxelles et justifie son raidissement par le refus catégorique de toute menace, si minime soit-elle à ses frontières septentrionales.

Sa résolution se traduit par une ferme intention, passée aussitôt à l’acte, d’occuper l’Ukraine, de renverser le régime en place, d’installer un nouveau pouvoir accommodant avant d’envisager un éventuel retrait. Les Russes poussent à la roue en exigeant une neutralité de la France, de l’Angleterre et dans une moindre mesure de l’Allemagne qui, à la différence des deux premières, n’est ni membre du Conseil de sécurité de l’ONU, ni détentrice de puissance nucléaire.

Rien ne stoppe ni ne freine l’offensive militaire russe. Pas les Européens en tous les cas. Le sachant, Poutine redoute plus les sanctions économiques et financières dont les premiers effets se font sentir par la décision de la Banque centrale russe de rehausser de 20 % ses taux directeurs avec une évidente crainte d’une flambée des prix et de la pénurie de devises découlant d’un décrochage de sa monnaie, le rouble, vis-à-vis du dollar, du yen, de la livre sterling et de l’euro.

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Malmené sur ce terrain, Moscou voit également s’accentuer son isolement diplomatique. Privé de beaucoup de leviers, Poutine voit se rétrécir sa marge de manœuvre d’autant plus étroite que la Chine se tait et observe l’enlisement russe dans ce bourbier. Faut-il y voir les facteurs de désescalade en cours ces dernières quarante huit heures ? Les deux parties en conflits s’accordent pour amorcer un dialogue dont l’ordre du jour n’est même pas connu des protagonistes.

Pour autant des colonnes blindées se rapprochent de Kiev. L’autre géant nucléaire, les Etats-Unis, peaufine sa stratégie militaire combinée à l’efficacité des sanctions concertées (et coordonnées) prises par le camp occidental. Du fait du gel des avoirs des dirigeants en vue de la Russie, la rupture de ses propres banques avec le prestigieux réseau bancaire européens prend de court l’univers financier moscovite réduit à sa plus simple expression faute de relais international.

On le voit, la vie des gens ordinaires s’en trouve fortement impactée. A ce rouleau compresseur s’ajoute la pression mondiale qui fustige la brutalité de l’invasion russe suivie de morts de civils en grand nombre et un exode massif d’Ukrainiens vers la frontière polonaise. Situation ubuesque : dans cet indescriptible flux de réfugiés se trouvent des Africains, étudiants pour la plupart, victimes d’ostracisme et de racisme primaire par l’administration polonaise.

Ses actes prémédités indisposent la communauté internationale qui demande un traitement digne et humain de tous ceux qui sont en situation détresse. En sa qualité de Président en exercice de l’Union Africaine, Macky Sall et le Président de la Commission de l’UA ont sévèrement dénoncé ces pratiques racistes frappant les jeunes Africains dans les pays limitrophes de l’Ukraine que tentent de quitter tous les étrangers y vivant.

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« Même en temps de guerre les racistes trouvent le moyen d’afficher leur discrimination à l’égard des Noirs », se lamente un jeune ukrainien métissé. Il déplore la différence de traitement et crie au scandale en prenant l’opinion publique internationale à témoin.

Contre toute attente, l’ancien monde reste encore vivace symbolisé par ces vives tensions aux frontières. Quand Poutine demande la démilitarisation de l’Ukraine, sa lecture des enjeux du monde frise l’irréalisme…







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