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Lettre D’outre-tombe De Mandela Au PrÉsident Macky Sall

Lettre D’outre-tombe De Mandela Au PrÉsident Macky Sall

Tu seras le premier surpris par cette lettre que tu n’attendais pas surtout que ce n’est pas habituel qu’un homme qui n’est pas de ce bas monde prenne sa plume pour écrire. Mais comme on dit, les voies du Seigneur sont insondables.

 

Quand on appartient à cette race d’élus, aimée des Dieux, on a des faveurs que les autres n’ont pas.

 

Cela dit, les occurrences à la fois pénibles et dramatiques dans lesquelles ce continent-mon continent- se débat, ne m’ont laissé aucun choix. Je ne pouvais ne pas t’adresser ce mot !

 

Tu voudrais bien excuser l’utilisation du pronom personnel, tu. Je l’utilise parce que je me sens proche de toi et que j’ai une haute estime de ta personne. Mais encore, entre frères qui s’estiment, on doit pouvoir se passer de protocoles assez lourds et inhibiteurs. 

 

Ces précisions faites, je dois dire que le geste que tu as posé en donnant mon nom au pont de Foundiougne m’a énormément fait plaisir.

 

Ton geste, Excellence, t’honore et te grandit aux yeux du monde entier. Honorer, au-delà de ma modeste personne, le symbole que je représente, c’est honorer toute l’Afrique, voire le genre humain dans son ensemble. En effet l’humanité a besoin d’hommes-symbole, d’hommes-étendard pour se ressourcer en permanence et se rappeler que la seule direction qui vaille pour l’homme est la voie de la grandeur.

Avant d’aller plus loin, permets moi cher collègue, ami et frère de partager avec toi un mot d’un de tes concitoyens, célébrant mon nom : « Mandela, un nom, mais pas n’importe quel nom ; un nom connu et reconnu dans toutes les langues du monde. Un nom qui va figurer en bonne place dans tous les livres d’histoire. Un nom qui aura une place de choix dans le panthéon réservé aux hommes qui auront marqué d’une pierre blanche l’histoire de l’humanité.

Un nom qui suscite émotion et passion dans tous les coins du monde. Un nom qui va défier le temps et l’espace parce que se conjuguant avec l’histoire, la grande histoire. Un nom accroché à une étoile qui brille au firmament du ciel. Un nom qui résonnera comme un hymne à la justice sociale pour tous les déshérités de la terre ».

Et quoi dire encore ? A cette interrogation, s’empresse de répondre l’histoire, la grande histoire, celle qui sait déifier et récompenser les justes par ces mots : « un nom qui va retentir pour l’éternité comme la manifestation vivante des valeurs positives les plus hautes de l’humanité. Un nom dont les générations présentes et futures se plairont à magnifier les vertus dont il est porteur. Un nom qui aidera sûrement à réconcilier l’humanité avec la morale et l’éthique par le refus de l’injustice et de la discrimination sous toutes ses formes. »

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Cette Afrique là-Notre Afrique-qui fait la risée du monde mérite un autre destin que celui qu’il connaît présentement. Et cela par la faute, principalement de ses dirigeants politiques.

Face à la situation douloureuse et humiliante qui est celle de l’Afrique, Mandela nous invite à une introspection afin que son rêve d’une Afrique plus juste, plus humaine, plus solidaire, plus respectée de par le monde par sa praxis chevillée à un humanisme charriant les valeurs de tolérance et de démocratie véritable se réalise.

 

Ce rêve de grandeur pour l’Afrique qui a toujours habité Mandela le poursuit encore et lui impose cette nouvelle posture là où il est ; celle d’un patriarche préoccupé par le devenir de sa nation. »

C’est à mon tour cher collègue, frère et amide remercier de vive voix ce sénégalais dont les paroles si aimables me sont allées droit au cœur. Il est vrai que des lettres du genre, j’en ai reçu des centaines de millions, venant de tous les continents de la part d’hommes et de femmes appartenant à tous les horizons. Tout cela pour dire qu’une belle œuvre ne meurt jamais.

 

Que sont devenus aux yeux de l’histoire ces sinistres individus que sont, Idi Amin Dada, Mobutu, Macias Nguéma, Bokassa, Samuel Doe, Sani Abacha, Hissein Habré ? Je n’oublie pas certains vivants de sinistre réputation. Je pense à Yaya Jammeh, Charles Taylor et tant d’autres qu’il serait fastidieux de citer ici.

 

Tous ces individus qui ont manqué de grandeur et de classe en se comportant comme de vils bandits à la tête de leurs Etats respectifs sont installés et à jamais dans les poubelles de l’histoire. Chaque fois qu’on évoque leurs noms chargés d’infamie, c’est pour les abreuver d’injures et de sarcasme. Ils l’ont mérité ! Par leurs faits et gestes, révélateurs de personnalités totalement disloquées intérieurement, ils représentent une honte pour la race humaine.

 

Vivement que de nouveaux paradigmes fondateurs d’une nouvelle gouvernance, adossée aux valeurs de justice, de transparence, de probité morale, s’incrustent au cœur de l’Etat africain qui a trop souffert de la désinvolture d’hommes et de femmes uniquement préoccupés par leur désir de pérenniser leur règne.

 

A mes frères africains, je dis et redis que de là où je suis, j’ai de la peine et de la tristesse face au spectacle de désolation qui s’offre à mes yeux avec ces guerres civiles interminables, ces chefs d’Etat qui s’éternisent au pouvoir, ces dénis de justice et autres calamités dont l’Afrique est le théâtre.

 

Ne soyons nullement surpris et cela en rapport avec nos comportements farfelus et totalement irresponsables que la presse internationale présente souvent l’Afrique sous les traits les plus hideux. Et quand il en est ainsi, on crie au racisme et au mépris mais à y regarder de plus près, c’est nous qui prêtons le flanc. Et comme j’ai l’habitude de dire : le respect se mérite !

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La preuve par ce qui m’est arrivée : le concert de louange dans tous les coins du monde pour saluer et célébrer ma mémoire.

 

Ecoutez, écoutons, Jean Daniel, l’une des plus brillantes plumes de France, mort à l’âge de 99 ans-que Dieu l’accueille dans son paradis le plus élevé-sanctifier dans un accent digne d’éloge ma personne : « J’aurais été attristé qu’on pût, un jour feuilleter une collection de ce journal sans y trouver ma signature la semaine de la disparition d’un homme comme Mandela. ( …) Dans l’album de mes souvenirs, je ne trouve pas de héros aussi lumineux. Mandela n’a pas libéré les siens par les armes. Il a obtenu que les siens se libèrent par le pardon. (…) Comment un homme tel que Mandela a-t-il été possible ? Comment cette créature est-elle sortie immaculée de toutes fautes des mains de son créateur ? C’est une question à laquelle il est bien difficile de répondre. Sinon peut être par cette certitude rousseauiste : la foi dans l’homme » in Le Nouvel Observateur 12 Décembre 2013, N° 2562.

 

Après ces développements qui permettent de camper le personnage historique que je suis et ces quelques mots consacrés au continent africain, il est venu l’heure de me focaliser sur la politique intérieure de ce pays phare du continent africain, je veux nommer le Sénégal dont tu as l’insigne honneur de diriger les destinées.

 

Excellence, cher ami et frère, je sais de science certaine –la station bénie dans laquelle je me trouve en compagnie d’hommes et femmes taillés dans l’étoffe des dieux, me permet de lire dans les cœurs et dans les esprits- que ton rêve le plus fou, que dis-je ton vœu le plus cher, c’est de faire un troisième mandat. Vouloir rempiler pour un troisième mandat va t’exposer à la vindicte populaire. Je ne te le souhaite pas !

 

Et puis mon frère, c’est toi qui as dit et répété à la face du monde qu’on ne peut pas faire plus de deux mandats consécutifs. Voilà qui est clair et net ! Toujours dans ton désir de rassurer tes compatriotes, tu as dit qu’on peut mêler ton nom à certaines querelles mais jamais dans les querelles liées au troisième mandat. Et tu ne t’es pas arrêté en si bon chemin. Dans ton ouvrage : « Le Sénégal au cœur », tu as écrit noir sur blanc qu’on ne peut pas faire plus de deux mandats consécutifs.

 

Ces beaux discours que j’aimais entendre de toi, c’était peut-être dans une autre vie. Les jouissances et autres douceurs du pouvoir t’ont peut-être complètement changé.

 

Mais quoi qu’il en soit, je te demande, cher frère et ami, de renoncer à ce funeste projet consistant à vouloir briguer un troisième mandat. Tu me diras que ce n’est pas toi qui décides en la matière et que la décision finale relève des institutions judiciaires compétentes. Un peu plus de sérieux, mon frère : tu sais, je sais comment fonctionnent ces institutions-là un peu partout en Afrique? Elles sont malheureusement, toutes à la solde de l’Exécutif. Au fait, ce sont des coquilles vides à de très rares exceptions. C’est cela la vérité !  Combien d’acteurs de la Justice, et pas des moindres, se sont levés pour dénoncer les multiples dysfonctionnements de cette institution ? Pour autant, il serait injuste de mettre tous les juges dans le même sac.

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On trouve des magistrats vertueux. Et Dieu sait qu’ils sont nombreux ! Je pense à feu Kéba Mbaye, Isaac Forster. Je n’oublie pas le jeune, Ibrahima Hamidou Dème pour son courage et son sens de l’honneur. Sois mon interprète auprès de lui pour lui dire toute l’admiration et l’estime que j’ai pour lui.

 

Excellence, fais un effort sur toi et abandonne définitivement le projet de rempiler pour un troisième mandat. Pour ce faire, il te faut triompher de ton égo et des pouvoiristes qui sont à tes côtés.

L’histoire te regarde ! L’histoire t’écoute ! L’histoire t’observe !

 

Suite à des accusations gravissimes et totalement inqualifiables portées contre toi et ta famille, tu es sorti de ta réserve pour bomber le torse en disant que tu appartenais  à une lignée de guerriers. Cette appartenance t’impose une ligne de conduite : le guerrier a un code d’honneur qu’il ne transgresse jamais.

 

Excellence, quand vous avez le pouvoir en Afrique, vous êtes entouré d’hommes et de femmes liges sans aucune consistance morale. Ils ne disent que ce que vous voulez entendre. De tels hommes sont dangereux ! Il faut s’en méfier comme de la peste. Ecoute les rares voix de courage, de dignité, de lucidité qui osent aller à contrecourant de tes désirs.

 

Je te laisse méditer ces mots de Jack Lang, ancien ministre de François Mitterrand, parus dans le numéro hors-série de Jeune Afrique, spécial Mandela, N° 33, année, 2013 : « Au-delà de la disparition physique, Mandela ne peut mourir :sa légende restera plus que jamais vivace, et il continuera à vivre à travers elle, à la différence de beaucoup de chefs charismatiques. Et pour les plus jeunes, il restera l’illustration que la politique ne se conjugue pas nécessairement avec les bassesses, les calculs ordinaires et la petite tactique des trahisons. Il incarne une forme de noblesse, de hauteur de vue, et la politique, c’est d’abord ça : des idées, des visions, une ouverture d’esprit. Mandela sera un enseignement permanent pour la compréhension de l’histoire comme pour l’avenir. »







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