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Le Marketing Agroalimentaire Pendant Le Ramadan

(…) En 2012, j’écrivais dans Sud Quotidien “Le marketing dans la filière agroalimentaire entre logique de marché et santé des consommateurs”, ce qui est d’actualité, car il y a une meilleure compréhension, des comportements des consommateurs, une mondialisation des systèmes de productions, des consommateurs non avertis, des informations plus complexes, une utilisation effrénée des media et ses collaborations entre « l’esprit et le pouvoir », les réseaux sociaux… L’industrie agroalimentaire, a un grand potentiel, pour stimuler la croissance économique et l’innovation, créer des emplois et satisfaire l’évolution de la demande des consommateurs, dans les pays en développement.

En même temps, la consommation accrue d’aliments transformés, a soulevé des préoccupations, quant à l’impact de cette industrie moderne, sur la santé mondiale et la nutrition. (IFPRI, 2018), elle doit être « encadrée ». Les “ prescriptions” alimentaires/nutritionnelles, durant le Ramadan, s’imbriquent avec la promotion des produits néfastes à la santé (boissons/jus sucrés avec additifs, mayonnaises, Ketchup, laits reconstitués, bouillons, huiles de cuisson, beurres, pâtes chocolatées à tartiner, semoule de blé dure, saucisses «  nitratées  » …), avec des recettes culinaires, utilisant les mêmes produits des sponsors, préparées par une cuisinière “moderne”, avec ses gants en latex, son bonnet…,

Les traditions, n’ont plus droit de cité, en cette ère de la conformation, de standardisation alimentaire, d’une « alimentation déconnectée » Les recettes sénégalaises, racontent des histoires complexes, sur notre intégration dans un système alimentaire mondialisé et hautement inégalitaire, mais aussi des effets imprévisibles, des changements au sein de ces systèmes, ce qui pose la question de nos capacités à répondre aux défis alimentaires, dans notre contexte. Dans cet imbroglio, quelle merveille, aurait été, un plateau avec Epicure, Hippocrate (qui a aussi beaucoup écrit sur l’activité physique et l’a diététique, avec Aristote, au 14e e siècle avant J.C.) et Karl Popper, pour nous entretenir, sur la complexité de l’alimentation, avec “ ses soubassements anthropo-sociologiques, renvoyant aux concepts, d’identité, de religion, de classes sociales de terroirs, une alimentation rattachée à la notion « d’espace social alimentaire » (Poulain).

L’alimentation n’est pas que science, elle est fondamentalement de l’art, indescriptible à l’image des caractères organoleptiques, pour la « qualifier », c’est toute une construction, un vécu, une conceptualisation, avec son subjectivisme … ! Même si, dans la “gastronomie moderne”, on utilise les nanotechnologies, comme la programmation neurolinguistique, en marketing. Un monde de folie ! Nous devons réfléchir, sur des questions profondes (historiques et ontologiques), liées à nos modes de consommation, car les media, ne donnent pas opportunité de Co-construire des recettes (avec les outils de recherche qualitative), en fonction des terroirs, des contraintes, des identités…

Ils peuvent contribuer à la sensibilisation, avec des acteurs indépendants, qui peuvent, contribuer à la « décolonisation des esprits », loin des contradictions symboliques de corps, identitaires, de notoriété, c’est à dire et d’intérêts au sens (interesse de Heidegger). L’anthropocène (ère géologique où, l’humain est la force dominante, sur le changement de la planète), offre une opportunité, dans le contexte de la globalisation des idées, à des prescriptions alimentaires/nutritionnelles, mondialisées/ « planétaires » à l’image de Willett (The Eat Lancet Commission, 2019) qui préconisé que “ La transformation vers une alimentation saine d’ici 2050, nécessitera des changements alimentaires substantiels. La consommation mondiale de fruits, de légumes, de noix et de légumineuses devra doubler, et la consommation d’aliments tels que la viande rouge et le sucre devra être réduite de plus de 50%. Une alimentation riche en aliments d’origine végétale et avec moins d’aliments d’origine animale confère à la fois de meilleurs avantages pour la santé et l’environnement.”

Pour le monde entier,  ! Des inepties qu’on veut faire consommer au monde entier jusqu’à la fin du monde ! Ce qu’on dit à la TV, dans les réseaux sociaux… à un public, devenu des consommateurs passifs, «  mangez moins sucré, moins salé, moins gras… », est devenue, la triade de survie, déconnectée de la réalité, d’une construction, entretenue par Profs/Experts…qui ne comprennent pas que : « l’alimentation est bien plus que l’infrastructure biologique qui la supporte et qui pointe de façon grandissante la nécessité du dialogue interdisciplinaire », on ne doit pas « médicaliser l’alimentation »

En l’absence d’une dynamique alimentaire endogène, et en réponse au « Lan cet Commission  », d’autres mouvements en occident, se sont soulevés comme « Yes2meet », (Oui à la viande), avec les lobbies de la soutenus par « d’experts/ Professeurs », les media occidentaux et souvent des émissions du genre « priorités… », pour le marché local, Africain L’alimentation est idéologique, politique, au cœur de l’Economie Politique, des politiques et choix économiques, alors : Est-ce que nous faisons assez, pour la promotion de la consommation du poisson, de ses dérivés…avec des familles de pêcheurs appauvries ? Des licences de pêche bradées à l’Union Européenne ? Est-ce qu’on taxe ces « mauvais laits » (la majorité dans le pays), à l’huile de palme, qui nous viennent de l’Europe, sans soutenir les acteurs de la filière locale ? Est-ce qu’on taxe les produits, trop sucrés, trop gras, trop salé (bouillons surtout même avec des vitamines et minéraux), pour financer la recherche et la prise en charge des maladies chroniques liées à l’alimentation, comme recommandé par La Sous-Commission des Nations Unies pour la Nutrition (dont OMS), et le High Level Panel of Expert pour la Sécurité Alimentaire Mondiale ? Allons, nous dans le court terme, « tuer » le secteur de l’élevage, à cause « d’une prescription de 200 grammes la semaine ? (Il n’y a pas de consensus) … Est-ce que nous donnons des évidences scientifiques à nos décideurs, pour prendre les bonnes décisions politiques, au-delà des interventions par voie de presse, qui ne contribuent pas à protéger nos pauvres consommateurs, mais juste pour son positionnement, sa notoriété ? 

Notre pays, comme ceux, à faibles revenus et à revenus intermédiaires, font face à la sous nutrition, à la surnutrition (maladies de l’opulence hier, de la pauvreté aujourd’hui) et aux changements climatiques (The Global Syndemic) ; La reconnaissance de cette transition nutritionnelle (Pokin& Omran), doit être au cœur de notre quête de souveraineté alimentaire. C’est encore loin ! Au lieu de livrer nos communautés, aux « Capital du privé et titres des experts », nous devons repenser à l’application de certains acquis juridiques, notamment, le Droit à l’Alimentation, « un droit humain fondamental (Déclaration de 1948), inséparable de la justice sociale. Nourrir les communautés, est un des principaux objectifs de tout gouvernement, et fait partie de la souveraineté nationale ».

 Le Sénégal est signataire du Pacte International sur Droits Economiques, Sociaux et Culturels, (entrée en vigueur en 1976), la Déclaration de Rome sur la sécurité alimentaire (1996) et de La Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, (adoptée en 1981, entrée en vigueur en 1986) laquelle reconnaît aussi implicitement, le droit à une alimentation adéquate et saine. Cependant, et c’est dommage étant un droit économique et social (non civil et politique), il n’est pas contraignant. On ne peut plus, on ne doit plus, laisser notre alimentation avant, pendant et en après le Ramadan, entre les mains du pouvoir Marché-Experts/Professeur Media, avec une publicité non règlementée. Notre souveraineté alimentaire, dans un monde ouvert, ne se fera qu’avec une volonté politique avec des ressources, pour soutenir les organisations de producteurs, l’agriculture familiale, la recherche et l’innovation, le développement des systèmes alimentaires diversifiées et durables, une protection des groupes vulnérables…tout en respectant les principes fondamentaux de gouvernance, surtout celle de la sécurité alimentaire et nutritionnelle.

Par Dr THIAM Ismael 

 UFR SCIENCES DE LA SANTE/NUTRITION DIPLOME EN MARKETING & COMMUNICATION UNIVERSITE GASTON BERGER







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