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On Ne Changera Pas Le Visage Du SÉnÉgal Pour Plaire À Sonko

Depuis le 2 février 2022, le collège électoral est convoqué pour la tenue des élections législatives le 31 juillet 2022. Ce scrutin va permettre le renouvellement de l’Assemblée nationale dont le mandat des députés arrive à terme. C’est un rendez-vous républicain conforme au calendrier institutionnel et aux exigences de la vie démocratique. Tous les préparatifs sont au point et la campagne électorale sera ouverte dès le week-end prochain. Malheureusement, comme dans chaque élection, des acteurs seront laissés en rade, n’ayant pu satisfaire aux conditions légales pour pouvoir participer à la compétition. Il n’y a donc rien de nouveau qui n’ait déjà été vécu ou expérimenté dans la marche assez éprouvée de la démocratie sénégalaise. Seulement, des voix et peut-être pas des moindres, s’élèvent pour demander le report des élections dans l’esprit, disent-elles, de permettre une participation la «plus inclusive». Une telle proposition apparaît surréaliste car on serait curieux de savoir dans quel pays au monde, tous les citoyens qui le désireraient seraient autorisés à participer aux élections nationales. Tout processus électoral est organisé, normé, de manière stricte et c’est justement cela qui rend dans un système démocratique, les citoyens égaux devant la loi et en droits.

Mais au Sénégal, de «bons esprits» préconisent de reporter les élections de juillet 2022, pour permettre à des citoyens, qui se sont disqualifiés pour s’être écartés de la loi du fait de leurs propres turpitudes ou carences, de pouvoir corriger leurs fautes, mieux, de se préparer à nouveau et revenir dans le jeu politique. Franchement quel esprit qui se voudrait tant soit peu juste, pour ne pas dire qui ne se voudrait pas hypocrite, accepterait une telle démarche ?

En effet, reporter des élections pour de tels motifs serait donner une prime à la médiocrité et au manque de sérieux et de rigueur. Pourquoi ne devrait-on pas permettre aux autres citoyens vertueux à l’aune de la loi électorale, consciencieux et rigoureux dans la préparation de leurs candidatures, d’être sanctionnés positivement, d’autant que tous les acteurs politiques ont bénéficié des mêmes conditions d’accès aux informations relatives aux élections et ont participé à tout le processus. Mieux, comment des acteurs qui, par le passé, avaient pris le soin de se mettre dans les conditions de participer régulièrement à des élections et qui ont failli cette dernière fois, par leur désinvolture, dans le respect des conditions fixées par la loi électorale, peuvent-ils reprocher au système électoral ou au juge constitutionnel, leurs propres manquements alors même qu’aucune des règles n’aurait été changée.

Dans le cas d’espèce, les listes de candidatures rejetées par le Conseil constitutionnel, juge électoral, n’ont pas principalement satisfait au respect de la parité homme/femme dans les assemblées élues. Une règle pourtant instituée au Sénégal depuis 2010, sous le magistère du président Abdoulaye Wade. Des élections législatives ont été organisées en 2012 et 2017 sur la base de la parité électorale et des élections locales en 2014, 2017 et 2022, sur les mêmes bases. Comment se fait-il alors que la coalition Yewwi askan wi (Yaw), qui se dit victime, avait pu, trois mois auparavant, c’est-à-dire aux élections locales du 23 janvier 2022, satisfaire aux exigences de la parité et se retrouver aujourd’hui à se plaindre pour avoir «commis des erreurs, des fautes fatales», pour reprendre le mot même de son leader Ousmane Sonko ? Est-il besoin de rappeler que plusieurs sessions de dialogue politique ont été déroulées pour revoir les règles de la compétition électorale mais qu’aucune formation politique n’avait estimé devoir remettre en cause la règle de la parité.

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D’autres listes de candidatures ont été recalées pour n’avoir pas pu réunir le nombre de parrains nécessaires pour être qualifiées aux élections. Depuis le Code électoral de 1992, cette règle du parrainage par des électeurs existait au Sénégal pour les candidatures indépendantes alors que les formations politiques en étaient dispensées. La généralisation du parrainage citoyen en 2018 avait été une mesure plus équitable dans la compétition électorale car de nombreuses personnalités, notamment de la Société civile, se plaignaient d’une telle disposition alors que des partis politiques «cabines téléphoniques», avec des capacités moindres de mobilisation, pouvaient présenter des candidats sur la simple base d’un récépissé délivré par le ministère de l’Intérieur. Dans d’autres pays, il existe d’autres formes de parrainages. En France par exemple, ce système de parrainage par des élus rend très difficile la participation aux élections nationales et constitue un gros obstacle qui recale ou freine des ambitions politiques prometteuses. C’est d’ailleurs un combat de Jean-Luc Mélenchon qui, dans son projet politique de la 6ème République en France, préconise d’opérer une réforme du système de parrainage pour en faire un parrainage par des citoyens-électeurs.

C’est dire qu’aucun système électoral ne saurait faire l’unanimité et donc nul ne saurait privilégier les desiderata ou même les caprices circonstanciels d’un acteur politique au détriment des autres. Assurément, les responsables de la coalition Yaw ne devraient pas avoir plus de droits ou de privilèges que leurs homologues de Benno bokk yaakaar (Bby), de Wallu Senegaal, de Bunt-bi, d’Aar Sénégal, de Gueum sa bopp ou d’une toute autre coalition électorale déclarée.

Qui accepterait que le président Macky Sall s’offre un rabiot ou un «mandat cadeau» ?

En vérité, les tenants de la thèse de la nécessité d’un report des élections législatives invoquent le souci de ramener la paix dans le climat politique. En effet, voudrait-on céder à des menaces, à des chantages à la violence, proférés par Ousmane Sonko et ses alliés de la coalition Yaw ? Si chaque fois qu’un acteur politique arrivait à semer le désordre et des troubles en mobilisant des groupes de partisans, on devrait remiser au placard la vie des institutions et le processus électoral, on ferait le deuil de la démocratie dans notre pays. D’ailleurs, ce serait instaurer le désordre et le chaos si ceux qui pourraient arriver, plus que d’autres, à faire peur, imposaient leurs volontés et s’affranchissaient des règles communes. La tension politique ambiante est bien moins aiguë que les situations vécues au Sénégal en 2012, 1993, 1988, 1983 ou 1962, et pour autant les élections avaient été, à chaque fois, tenues à bonnes dates.

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Le président Macky Sall a d’ailleurs fini de trancher définitivement la question en indiquant, sur tous les tons, que les élections se tiendront à date prévue, c’est-à-dire le 31 juillet 2022. On peut alors considérer les demandes de report comme des élucubrations qui cependant, appellent à être fustigées sans concession. La proposition de repousser les élections législatives apparait comme dangereuse, nocive pour le système démocratique, et provoquerait le chaos qu’elle prétendrait éviter. En repoussant les élections de juillet 2022, on instituerait une Assemblée nationale qui tiendrait sa légitimité de la seule volonté d’une autre institution, le président de la République. Mieux, quelle serait la légitimité des députés dont le mandat aura été prolongé par le président de la République ?

Toutes choses égales par ailleurs, ne crierait-on pas au coup d’Etat si le même président de la République, dans les mêmes formes et conditions, décidait de prolonger son mandat d’une quelconque durée ? Au demeurant, quelles sont les circonstances exceptionnelles engendrant un chaos généralisé au Sénégal, qui amèneraient le président de la République à «prendre une loi d’exception» ? Que Dieu nous en garde car le Sénégal ne se relèverait pas de sitôt d’une telle situation ! En France, cette situation avait été vécue en 1940 avec le Maréchal Pétain qui était à la tête d’un pays envahi et occupé par l’Allemagne nazie. En Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo avait pu bénéficier d’un «mandat cadeau» en faisant reporter, d’une année à une autre jusqu’en 2010, l’élection présidentielle qui était prévue pour l’année 2005. Le pays était en proie à une féroce guerre civile.

Du reste, les voix qui demandent le report des élections législatives au Sénégal, avaient été les mêmes qui demandaient, en 2019, le respect scrupuleux du calendrier électoral quand il s’était agi de reporter les élections locales. C’est dire simplement que ceux qui demandent le report des élections le font simplement pour permettre à Ousmane Sonko de pouvoir postuler à la députation, une opportunité qui lui a échappé du fait des turpitudes de son propre camp politique.

Macky Sall refusait une année de plus à Wade en 2012

On a noté la dernière sortie de Me Doudou Ndoye qui apporte sa voix au concert très peu audible du reste, demandant le report des élections législatives. On peut sourire en relisant l’édition du journal Walfadjri du 20 mars 2002 sous la plume de Momar Dieng. Me Ndoye qui préconise le report des élections prochaines, parce que la loi électorale est imparfaite et que le Conseil constitutionnel aurait mal jugé, disait, le 19 mars 2002, qu’en dépit du fait que le processus électoral n’était pas conforme à la légalité et le juge électoral était disqualifié, son parti l’Union pour la République allait participer aux élections. Il avait également continué à faire les mêmes constats et prenait pour autant part aux joutes électorales en tant que candidat à la présidentielle en 2007 et en 2012. C’est dire !

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Pour sa part, en 2012, le président Macky Sall avait clairement indiqué qu’il combattait farouchement la candidature de Me Wade à l’élection présidentielle mais que si d’aventure le Conseil constitutionnel, qui a la mission de juger de la recevabilité des candidatures, acceptait celle du président Wade, il irait l’affronter et le battre dans les urnes. Cette posture avait valu à Macky Sall d’être mis au ban d’une bonne frange de l’opposition qui continuait de se rassembler à la Place de l’Obélisque. Macky Sall était ainsi accusé de «traitrise» ou d’être le «plan B de Wade» sur tous les murs du Sénégal couverts de graffitis. Il avait pris acte de la décision du Conseil constitutionnel, autorisant la candidature du Président sortant et avait démarré sa campagne électorale qui finira par être victorieuse. D’autres candidats travaillaient sur un autre schéma, encouragés en cela par des acteurs de la Société civile sénégalaise qui avaient bénéficié du renfort de l’ancien Président du Nigeria, Olusegun Obasanjo, dépêché à Dakar pour essayer de calmer le jeu politique. C’est ainsi qu’il avait été préconisé un report de quelques mois de l’élection présidentielle, pour permettre au Président Wade de «quitter le pouvoir sans perdre la face» en acceptant de ne pas se représenter. Pour la petite histoire, le candidat Macky Sall était l’un des rares à opposer une fin de non-recevoir à ce projet. C’est ainsi qu’il avait demandé à Me Alioune Badara Cissé et Samba Diouldé Thiam de le représenter à une conférence de presse organisée par le patron du groupe Walfadjri, Sidy Lamine Niasse, qui dénonçait ce projet qu’il considérait comme funeste et porteur de gros dangers pour le Sénégal. Le texte introductif à cette conférence de presse avait été rédigé par Abou Abel Thiam qui était sur le terrain de la campagne, dans la caravane de la coalition Macky2012. Le projet de report de l’élection avait été tué dans l’œuf et le président Obasanjo bouda et reprit son avion, surtout que son hôtel avait commencé à être assailli par des manifestants hostiles à toute idée de report de la Présidentielle.







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