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La Sagesse Doit PrÉvaloir !

La guerre en Ukraine a révélé au monde que le problème de sécurité se pose aussi en Europe. Jusque-là, cette préoccupation intéressait les autres peuples, les pays hors de l’occident. Il est certain que c’est un réveil brutal pour beaucoup d’européens qui découvrent en cette année 2022 que dans la vieille Europe aussi, il est possible de tuer, de massacrer, de faire des exactions qui ne venaient que d’outre-mer. Comment en est-on arrivé à cette situation ? Cela était prévisible depuis la fin de la guerre froide avec le démentiellement du bloc soviétique et la création de « micro états » que l’Europe s’est empressée d’engloutir en son sein. N’oublions pas qu’en créant cet espace européen, on a voulu avoir d’abord un marché important, viable et capable de tenir tête aux grands de ce monde : les Etats Unis, la Russie, la Chine qui étaient devenus de « véritables ogres » capables d’engloutir « tout petit état » isolé en lui dictant leurs lois. Ensuite un espace politique pour avoir un cadre institutionnel à même de réguler l’Union Européenne et surtout une alliance militaire pour assurer la sécurité de l’Europe en accord avec leur allié de toujours : les Etats Unis avec l’alliance Atlantique (OTAN).

La Russie, parce qu’elle a une frontière commune avec 14 pays : l’Ukraine, la Finlande, la Biélorussie, la Géorgie, l’Estonie, la Lituanie, la Lettonie, la Pologne, la Norvège entre autres, dont certains appartenant à l’ancienne Union soviétique, devait se prémunir contre des états devenus membres à part entière de l’Europe De plus la Russie ayant 1572 km de frontière terrestre avec l’Ukraine et une frontière maritime de 567 km, comment pouvait-on imaginer qu’elle allait permettre que l’Ukraine serve de base à l’Europe pour menacer son intégrité ? Et c’est pourquoi dès 2014, avec les velléités d’intégrer l’Ukraine à l’Union Européenne, à la suite de l’annexion de la Crimée, il y a eu une accélération des évènements qui a abouti à la situation actuelle. En effet le traité signé entre Kiev et Moscou pour sécuriser les bases russes à Sébastopol en Georgie ne semblait plus suffire.

Pour la Russie, l’entrée de l’Ukraine dans l’Union Européenne signifiait avoir les forces de l’Otan à ses frontières et perdre le contrôle d’une partie de sa sécurité. C’est aussi permettre à l’Europe d’avoir une possibilité stratégique de surveillance à sa frontière. Car, ne nous voilons pas la face, la guerre froide est finie sans doute mais les « grands » de ce monde continuent à s’épier. On serait tenté de dire que c’est bien légitime de la part de la Russie d’avoir la position qui est la sienne simplement par réalisme et pour sauvegarder sa sécurité aux portes de l’Europe. Mais il serait naïf pour la Russie de penser, de croire que ce qu’elle refuse aux pays européens, ces derniers vont le lui permettre. On verrait mal, en effet, comment l’Europe pourrait accepter que la Russie occupe l’Ukraine pour en faire une base à partir de laquelle elle pourrait surveiller les faits et gestes des pays de l’Alliance Atlantique ?

Alors ne continuons pas à nous faire peur : avec la Russie qui poursuit ses bombardements ciblés et destructeurs, tuant des civils ou mettant en danger leur vie ou alors détruisant des usines considérées comme dangereuses ou aggravant les motifs des crises en Europe et dans le monde. Il est sans doute aisé de comprendre les craintes de M. Poutine pour la sécurité de son pays quand l’Europe veut intégrer l’Ukraine en son sein et se donner les moyens sinon de menacer du moins de surveiller la Russie. Mais de la même manière, l’Europe ne saurait tolérer que la Russie occupe l’Ukraine, à la suite de la Crimée, de la Géorgie et du Donbass pour avoir les coudées franches et pouvoir surveiller les faits et gestes des européens.

La stratégie qui consiste à « bomber le torse » en intensifiant les frappes qui psychologiquement démoralisent dans des villes que l’on pouvait prendre en une journée pour les russes d’une part, les différentes visites de personnalités occidentales (européennes ou américaines) dont celles symboliques de Madame Roberta Metsola, Présidente du parlement européen, Madame Ursula von der Leyen, Présidente de la commission européenne promettant « un avenir européen » à l’Ukraine, celle du secrétaire d’Etat américain Anthony Blinken et le ministre de la défense Lloyd Austin, comme les intentions de fournir de armes à l’Ukraine d’autre part ne suffiront pas à nous convaincre que la guerre pourrait arranger quelqu’un. Au-delà des destructions déjà significatives de structures stratégiques pour le pays, l’impact de la crise consécutive à la guerre dans le monde entier, l’option des européens comme de la Russie ne peut être qu’un embrasement de cette partie de l’Europe.

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Faire prévaloir la sagesse…

Alors il faudrait faire prévaloir la sagesse et déclarer l’Ukraine zone démilitarisée n’appartenant ni à l’Europe ni à la Russie jouissant d’un statut spécial. Un pays où il sera interdit d’entreposer des armes ou une quelconque base permettant de s’épier de part et d’autre. Le monde a déjà raté un virage important à la fin de la guerre froide : il y avait comme qui dirait « un vainqueur » (le monde occidental libéral) et « un vaincu » le bloc soviétique prônant le socialisme qui s’était effondré. Deux solutions se présentaient au « vainqueur » :faire une bonne lecture des erreurs faites par les uns et les autres ( la compétition poussée à outrance, la recherche effrénée du profit même si cela écrasait une partie importante de notre planète, l’enrichissement indécent de minorités au détriment de la grande majorité des populations du monde, le déséquilibre intolérable en manière d’éducation , de santé, d’alimentation, de bien être pour vivre décemment) ; en tirer les leçons et changer de cap, c’està-dire humaniser les rapports dans notre monde.

Ou alors continuer la loi de la jungle et continuer, grisé par cette « pseudo-victoire » à serrer davantage la vis et laisser la majorité des populations du monde dans une paupérisation exécrable. On a fait la deuxième option et installé notre planète dans la tourmente qui se traduit aujourd’hui par : l’émigration, le racisme à fleur de peau, le rejet de l’autre, les inégalités de tous ordres. Une infime minorité continue à mener notre monde selon ses seuls intérêts, dans l’indifférence totale, sans tenir compte de la souffrance d’une grande majorité d’hommes, de femmes et d’enfants qui n’ont ni où se coucher, ni de quoi manger encore moins de moyens de se soigner .

Et le pire, c’est que la fortune des premiers se fait toujours sur l’augmentation de la misère des seconds. C’est dans cette tourmente incroyable n’est-ce pas qu’Elon Musk a racheté pour la somme de 43 milliards de dollars le réseau social Twitter, mais rappeler aussi qu’un milliard c’est mille millions- beaucoup de gens ne le savent pas-, et que quelque part sur notre planète, des hommes survivent avec moins d’un dollar (628 F CFA) par jour. La guerre en Ukraine est aujourd’hui un autre tournant où la sagesse des dirigeants du monde est encore mise à l’épreuve. Est-ce qu’il est juste pour des questions de stratégies militaires, d’imposer au reste du monde les affres que nous vivons aujourd’hui sur notre planète terre même si on a bien le droit de protéger son pays et ses populations, ces affres dis-je avec :

– l’augmentation du prix du carburant puis la pénurie de « l’or noir » avec les conséquences incalculables à l’échelle du monde ; (et la chose est suffisamment sérieuse pour amener l’administration américaine à ordonner de puiser s’il le faut dans les réserves fédérales pour faire face à la situation)

– les perturbations dans la distribution du gaz surtout en Europe. Il y a une dépendance incroyable de ces pays par rapport à la Russie : les pays Baltes ou la Slovaquie dépendent entièrement du gaz russe, la Pologne pour 80 %, l’Autriche pour 65%, l’Allemagne et l’Italie pour 37% et la France pour 24%; déjà beaucoup de ménages dans ces pays souffrent de l’augmentation de ce produit due à sa raréfaction.

La guerre économique, une donnée importante des conflits

La guerre économique est aujourd’hui une donnée importante des conflits de notre monde, mais combien de victimes collatérales engendre-t-elle ? Combien de familles aujourd’hui font face à une augmentation de leurs charges pour des dépenses liées au chauffage ou au carburant ? On vient de couper le gaz à la Pologne et à la Bulgarie, qui sera le prochain sur la liste ? ;

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– les restrictions financières qui sont aussi des représailles sur des personnalités de part et d’autre, dérèglent le système bancaire mondial et imposent des tracasseries aux simples gens qui n’ont rien fait pour le mériter. On a vu en Russie les conséquences des différents embargos sur les simples citoyens désemparés ;

– l’augmentation du prix du blé ukrainien qui a une répercussion incalculable surtout dans les pays en développement où on a imposé des habitudes alimentaires aux populations ; et on pourrait continuer à énumérer les malheurs que cette guerre va encore nous causer.

Alors, il faut arrêter ce conflit absurde, faire preuve de sagesse et cesser cette surenchère dérisoire que nous notons de part et d’autre pour montrer qu’on fait du mal à l’autre alors qu’on s’auto flagelle. La dernière « grosse trouvaille » est la possibilité d’adhésion de la Finlande et de la Suède à l’OTAN, alors que ces deux pays bien qu’appartenant à l’Europe avaient su garder une certaine neutralité par rapport à la Russie.

La Finlande déjà en 1920 a signé avec l’Union Soviétique un accord de paix le 14 octobre à Dorpat et avec la Guerre froide, la Finlande adopte ensuite une politique prudente pour ne pas contrarier Moscou. Dès le printemps 1948, Helsinki signe un « traité d’amitié » et de coopération avec Moscou. Après l’effondrement de l’URSS en 1991, la Finlande s’ancre logiquement à l’ouest et adhère en 1995 à l’Union européenne, tout en choisissant de rester en dehors de l’Otan. La Suède quant à elle aussi après le traité de Teusina conclu avec la Russie, a choisi la « neutralité » pendant la première comme la seconde guerre. Elle a même participé à l’élaboration du traité sur les forces armées conventionnelles en Europe (FCE), sur les mesures de sécurité et de confiance, traité né de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).

Ces précautions multiples, ces traités entre les différents pays européens qui étaient signés pour élaborer un « modus vivendi », une ligne de conduite pour garantir une cohabitation pacifique en Europe, manifestement, reposaient sur la sagesse des hommes et femmes qui avaient en charge les destinées de l’Europe en ce moment-là. Ils ont su, malgré les difficultés et les crises, tenir le cap, renoncer à certaines de leurs convictions et intérêts, d’une part et exiger aussi des autres des renoncements pour maintenir la paix. Alors l’erreur énorme, fatale et capitale serait de dérégler ces fragiles équilibres en remettant en cause tous les traités qui étaient garants de la paix et de la sécurité dans la vieille Europe.

Ne tentons pas le diable

Pourtant tous les actes posés ces dernières semaines tendent à jeter de l’huile sur le feu : augmentations des budgets d’aides à l’armement pour l’Ukraine avec les Etats Unis et la France, dénonciations des accords séculaires par la volonté de certains pays à intégrer ou l’Union Européenne ou l’Otan. Ne tentons pas le diable. Un regard même sommaire sur notre monde d’aujourd’hui, nous fait voir les dérèglements multiples que ce conflit a causés et les problèmes auxquels nous devons faire face si la guerre en Ukraine continue.

Alors arrêtons de nous faire mal et tournons-nous vers les sérieuses difficultés que nous vivons et qui ont noms : inégalités multiformes et criardes qui génèrent déplacements, conflits régionaux, haines, rejets et racismes d’un autre âge, dérèglements climatiques, problèmes de la faim et de la population qui s’enfonce de plus en plus dans une misère indigne de l’humain. Il est temps donc d’arrêter le conflit entre la Russie et l’Ukraine et ne pas rater aussi la chance que nous offre cette cruelle réalité de la guerre comme ce fut le cas à la fin de la guerre froide. Notre monde a de sérieux défis auxquels devraient faire face nos dirigeants en premiers. – C’est l’inégalité criarde synonyme d’injustices, de rejet et de haine. Le déséquilibre est trop flagrant pour être digéré et paradoxalement ce sont ceux qui en sont coupables qui s’emploient à faire étalage de leur richesse notamment à travers les films qu’ils diffusent pour attirer la jeunesse des pays pauvres.

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Pourtant, il suffisait de construire des usines de transformation des produits tirés des pays pauvres, généralement les pays de départs de l’émigration pour endiguer ces flux de jeunes qui déferlent sur l’Europe et l’Amérique, au prix de leur vie le plus souvent. Mais non, on veut le beurre et l’argent du beurre. On prend les matières premières des pays pauvres, on les amène en occident pour assurer un emploi aux travailleurs occidentaux et on ramène les produits finis en Afrique surtout pour les vendre au prix cher et pendant ce temps, les masses laborieuses des pays pauvres s’enfoncent davantage dans la pauvreté. Cela ne continuera pas. Ce sont les problèmes de climat aussi qui ne semblent pas nous inquiéter et à chaque sommet des « grands », les échéances de solutions sont reculées comme si la nature nous laissait le choix.

Pourtant, les conséquences des catastrophes qui découleraient de ce que tous les scientifiques consciencieux admettent, ne feront pas de différence de race, de peuples et de couleur de peau. Les ouragans, les cyclones et autres avancées inexorables de la mer sur tous les continents sont là pour nous le rappeler. Pourquoi nous abimer alors dans des querelles partisanes et corporatistes ou raciales, si nous pouvons nous dresser tous ensemble face à ces dégradations de la nature qui ne risquent pas de nous épargner. La pandémie que nous venons de vivre avec cette covid sournoise et meutrière surgie dont ne sait où aussi nous interpelle lourdement ; ou peut-être avons-nous déjà oublié les souffrances de nos différents peuples, des morts par dizaine qu’on sortait de nos morgues pour nous en débarrasser au plus vite craignant une contamination qui pouvait nous être fatale ?

 Non l’oubli est impossible car la souffrance est encore perceptible. Ya-t-il une famille dans le monde qui n’a pas perdu un membre ou un proche ou un voisin ? Or la recherche effrénée et désordonnée avec une concurrence extraordinairement amorale et incompréhensible qui a abouti à des vaccins dont on n’est pas sûr de la fiabilité à 100% devait nous amener à mettre tout en œuvre au plan mondial pour que nos différents résultats dans cette recherche, puisse nous permettre de mieux résister face à un tel mal : .en termes de savoir, de savoir-faire, de bonnes pratiques pour combattre ce fléau . Que tous ces moyens disponibles soient mis ensemble pour que notre monde puisse faire face. Mais on ne semble pas comprendre que nul n’est à l’abri et il y a une naïveté à croire que l’essentiel c’est de tirer la couverture de son côté. L’intelligence dicte que l’on tire les bonnes leçons de ce qui s’est passé, à la suite des mauvais calculs et des pronostics incongrus et accusations politiques, se dire comme le personnage d’Albert Camus dans la « Peste » :« Il ne faut jamais oublier ce que nous avons vécu, le malheur qui nous est arrivé, et tout ce qui s’est mis en place dans notre capacité à être solidaire dans les temps d’épreuve, à sortir de nos égoïsmes… ».

C’est pour cela que le Docteur Rieux prévient : « Le bacille de la peste ( entendez le mal, les fléaux) ne meurt ni ne disparaît jamais. ». Et je voudrais ajouter, faisons en sorte que le prochain fléau ne nous surprenne pas au lieu de gaspiller notre énergie dans des conflits sans lendemain.. Ces trois défis qui font naitre en nous, simples administrés, une épouvante sans mesure devraient suffire à montrer à ceux qui dirigent notre monde et qui ont des informations très avancées sur notre avenir, toute la responsabilité qui pèse sur leurs épaules s’ils ne changent pas de cap, car leurs noms à eux tous seront liés à cette partie de notre histoire.

Cheikh Adramé DIAKHATÉ

Email : adramed@yahoo.fr







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