«Ce que je retiens de Babacar Toure ? D’abord qu’il n’aurait pas aimé ces pages spéciales que Sud Quotidien lui consacre ! Babacar n’a jamais aimé, ni jugé nécessaire de se mettre en avant ! Et Dieu sait qu’il en avait mille et une fois l’occasion. Il avait une philosophie assez particulière qu’on ne voit que chez les personnes intellectuellement généreuses comme Souleymane Bachir Diagne et Boubacar Boris Diop : toujours pointer la lumière sur les autres et magnifier leurs performances sociales, politiques, intellectuelles, religieuses, musicales et je ne cite pas tout car Babacar s’intéressait, comme qui dirait, à tout ce qui donne de la grandeur à l’être humain.
Comme je l’ai dit de notre regrettée consœur Eugenie Rokhaya Aw décédée récemment, Babacar n’aimait pas la médiocrité, surtout celle venait de gens pour qui il avait de l’estime. Je crois que, comme plusieurs personnes qui l’ont fréquenté plus ou moins assidument dans son aventure syndicale et professionnelle, dans sa vie, nous avons, je crois, tous et toutes, toujours cette question dans notre pensée dans le déroulement des événements depuis qu’Allah l’a rappelé : « Qu’aurait dit ou écrit Babacar devant cette situation ». Babacar ne savait pas se taire et c’était cela l’intérêt de sa compagnie avec le Sénégal. Le piédestal sur lequel il avait mis son peuple ne lui permettait de souffrir en silence des pratiques abjectes qui pouvaient provenir de son élite : il criait, il vociférait et, par-dessus tout, il écrivait. Il prenait position, en général contre le puissant, mais aussi contre le populiste annonçant le paradis sans effort et même, en avril 89, contre la populace dansant autour de cadavres maures au Sénégal, ou nègres en Mauritanie, sa seconde patrie. Je retiens de Babacar les blagues qu’ils me racontaient et de sa façon de commenter des faits anodins lors nos conversations de grand-place dont l’une des derrières fut avec Babacar Diagne, lors du mariage du fils de Madiambal Diagne !
Parlant de deux mes bajeen, toutes deux Mamarame, l’une Ndiaye, l’autre Dia, une femme a eu cette réflexion : « Dañu baaxoon ci Ndar » que je n’ose pas traduire par un « Elles étaient bonnes pour Saint-Louis », au risque d’appauvrir le sens de ce qui est dit en Wolof. Alors de Babacar Touré, je dis simplement « Dafa baaxoon ci askan wi » pour faire référence aux multiples et divers collectifs sur lesquels il portait son regard.
Plus égoïstement, je dis aussi que Babacar Touré « dafa baaxoon ci mann comme mes bajeen Mamarame» ! Et c’est pour l’imiter maladroitement que j’ai cité autant de personnes dans cette conversation car il aimait rassembler et tirer le meilleur des autres. Comme mes deux bajeen…