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Seneplus Solidaire De Serigne Saliou Gueye

ÉDITORIAL SENEPLUS – Depuis le 26 mai 2023, notre confrère, collègue et éditorialiste de SenePlus, Serigne Saliou Gueye, est injustement emprisonné pour avoir publié dans le quotidien Yoor-Yoor dont il est le directeur de publication, une chronique dénonçant l’absence de volonté de la justice sénégalaise à préserver l’État de droit et les libertés. Cette situation préoccupante suscite une profonde solidarité et un appel à défendre la liberté de presse dans notre pays.

SenePlus aurait pu publier cet article d’opinion intitulé « Chers Collègues Magistrats, Ressaisissons-nous ! » en préservant l’anonymat de son auteur. Le contenu de cette chronique n’a rien d’offensant ou de préjudiciable envers la justice. Il se contente de participer au débat public, tout à fait légitime dans une démocratie, sur l’indépendance du pouvoir judiciaire.

L’auteur de l’article incriminé exprimait simplement son aspiration à un contre-pouvoir exercé par la justice. Même si cet appel était formulé avec une pointe de satire, même s’il concernait un procès contre un opposant politique, qu’a-t-il fait de plus ou de mal par rapport à la dénonciation publique de l’ancien procureur, Alioune Ndao, à l’encontre du président Macky Sall et de sa supposée ingérence dans l’affaire Abdoulaye Baldé devant la CREI ?

Même si Serigne Saliou Gueye est soupçonné d’être l’auteur de l’article incriminé, sa détention est manifestement injustifiée au regard du contenu du texte. Cela donne un écho tout particulier à la célèbre Tribune des 104, où d’éminents intellectuels du monde entier avaient signé une déclaration publiée par SenePlus le 21 mars 2023 pour dénoncer l’instrumentalisation politique du système judiciaire par l’administration du président Macky Sall.

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La justice sénégalaise a un rôle essentiel à jouer dans la protection des journalistes, notamment en empêchant toute ingérence de l’exécutif dans l’exercice de leur travail. Lorsque cela ne se produit pas, c’est la liberté de la presse elle-même qui est durablement menacée.

Nous, collègues de Serigne Saliou Gueye, condamnons avec la plus grande fermeté les violations flagrantes de ses droits en tant que journaliste.

L’incrimination de discrédit envers la justice et les institutions publiques retenue contre Serigne Saliou Gueye est une copie conforme du code pénal français, restreignant la liberté d’expression et promouvant une conception contestable de la démocratie. L’application de cette loi franco-sénégalaise, en lieu et place des accusations d’outrage ou de diffamation (absentes dans l’article litigieux), vise uniquement à intimider les journalistes critiques comme Serigne Saliou Gueye.

En plus de son emprisonnement arbitraire, le gouvernement cherche à humilier notre confrère en l’accusant d’usurpation de la fonction de journaliste. Serigne Saliou Gueye est indéniablement un journaliste émérite reconnu par toute la profession. Il remplit toutes les conditions énoncées à l’article 4 alinéa 2 de la Loi n° 2017-27 du 13 juillet 2017 portant Code de la Presse. Conformément à l’article 22 de cette même loi, bien que la rédaction puisse prêter à confusion, la carte de presse n’a aucune incidence sur la qualification de journaliste. Elle vise simplement à accorder certains avantages à son titulaire.

Notre incompréhension face au traitement judiciaire réservé à Serigne Saliou Gueye ne fait que croître à la lecture du rapport final de l’UNESCO et du Conseil intergouvernemental du Programme International pour le Développement de la Communication, qui, les 22 et 23 mars 2012, ont défini comme journaliste toute personne générant un volume important d’informations d’intérêt public. Notre éditorialiste de SenePlus, fort de ses plus de 20 ans d’expérience dans les médias sénégalais, correspond parfaitement à cette définition.

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Nous rappelons également que de nombreux journalistes éminents au Sénégal n’ont jamais détenu de carte de presse ni fréquenté une école de journalisme. Par ailleurs, la liberté d’expression, quelle que soit l’affiliation idéologique ou partisane, ne devrait pas être restreinte. C’est l’un des principes les plus sacrés de la démocratie, que nous devons défendre et préserver à tout prix. SenePlus a toujours été un média pluraliste : si la majorité de nos éditorialistes sont non-partisans, certains sont affiliés à différents partis politiques du Sénégal, dans l’opposition ou au pouvoir, y compris l’APR, le parti du président Macky Sall.

L’arrestation arbitraire de Serigne Saliou Gueye s’inscrit dans une détérioration inquiétante de l’environnement de la liberté d’expression qui règne au Sénégal depuis quelques mois. Dans le contexte de l’élection présidentielle de février 2024, marquée par une possible troisième candidature anticonstitutionnelle du président sortant Macky Sall, de nombreux journalistes sont confrontés à une insécurité juridique et judiciaire inacceptable.

Face au harcèlement judiciaire croissant et à la pression exercée sur les journalistes, nous, confrères et collègues de SenePlus, demandons ce qui suit :

  • La libération immédiate de Serigne Saliou Gueye et de tous les autres journalistes emprisonnés pour l’exercice de leur métier, ainsi que l’abandon de toutes les poursuites judiciaires engagées contre eux ;
  • L’abrogation de la loi franco-sénégalaise relative au discrédit envers la justice, qui représente une arme redoutable entre les mains d’un exécutif de mauvaise foi, via le parquet ;
  • Le rétablissement d’un environnement libre et sûr pour les journalistes sénégalais.

En plus de 10 ans d’existence de SenePlus, c’est la première fois que nous publions un éditorial engageant entièrement notre plateforme. Cela témoigne de la gravité de l’offense faite à l’encontre de Serigne Saliou Gueye, mais aussi de notre consternation face à cet acte d’intimidation de la part de l’administration Sall.

Serigne Saliou Gueye rejoint la longue liste de journalistes brutalisés ou emprisonnés pour avoir exercé leur liberté d’expression et d’opinion. Il est de ceux qui considèrent que leur métier consiste à « porter la plume dans la plaie », sans chercher à plaire ou nuire. À tous ceux qui se reconnaissent dans cette qualité de journaliste, nous les invitons à prendre la parole et à proclamer haut et fort : Ne touchez pas à la liberté de presse !

 







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