L’évidence est toute faite, nul ne pourra y échapper. Le mot a longtemps été tus, enfoui dans l’inconscient collectif. Aujourd’hui le refoulement n’est plus possible, ils le savent, ils en sont conscients. Des bruits assourdissants, menaçants, presque inconnus à ce foyer jadis de la paix, font peu à peu taire tam-tam et rires. Les nuages ont troqué leur blancheur de perle d’antan contre un gris de spleen. Ils font naître aux yeux des rivières et dans les gorges des brumes Et les pluies ne sont plus, qu’ éclats de bombes et balles perdus, cocktails enflammant et odieuses injures. Au vent, se mêlent les cris d’une hordes de mécontents, de partisans, de loups affamés de vérité et de droits. Les temps ont changé …
Est-ce un mauvais décor théâtral ? Ou la révolte éclatera ?
Le peuple s’est redressé ; il a dit non aux carcans, à la chicote mais surtout, et avant tout au mensonge. Son intellect, sa force bafoués, il a choisi d’ôter sa muselière, ses sangles et ses cache-œil.
Il se révolte. Il est presque camusien, car il a également changé le cours de son esprit. Il est sorti dehors, dans les rues, comme un seul Homme. Sang et violence sur fond de soucis politiques, sont en réalité, les conséquences des maladies sociales et injustices gangrenant depuis beaucoup trop longtemps la nation. Ceux qui sont dehors, braves et méprisés, critiqués mais déterminés, ce sont les rejetons de la Teranga. Ils ont faim, ils ont soif, ils sont volés ou privée de leur dignité, de leurs droits, de la liberté qui sied a tout être humain. Ce n’est au nom de personnes que les faits sont ; cela est plutôt au nom de la Justice.
Depuis trop longtemps, les maux jetés dans le ventre du volcan, faut il s’étonner que ce dernier entre en irruption ? Considérés comme des animaux, ils se comportent comme tels, en macaques avides de destruction car étant la seule option, décidés à faire entendre les cris de leurs estomac , de leurs âmes, à faire résonner les echos du vide de leur main, privée de leur dû.
J’accuse. J’accuse de tous les maux, de tous les crânes éclatés, des feux allumés, des membres par les balles percées, non pas les dirigeants, les pillards, les corrompus, le roi ou les destructeurs … Non, ils sont tous innocents. Les coupables, les vrais, ceux sont les accumulateurs de papiers, les porteurs de robes blanches et noires, d’autoproclamant “guides” mais qui ne sont qu’adeptes du rien et de l’érotisme intellectuel. « Muets et cois », malhonnêtes et spectateurs volontaires. Ils ont failli, tous à leur rôle ; qui est celui de l’intellectuel. Les seuls partis devant être pris par celui ci sont celui de l’honnêteté, de l’appel à la réflexion et non de l’inertie. Ne savent-ils pas qu’une épée est suspendu au dessus de leur têtes ? Que leur conscience bientôt se transformera en fardeau ? Ne savent-ils pas que leur silence ne s’inscrit pas dans le néant, mais plutôt qu’il annonce leur position, qui est celle de la masturbation, de la prostitution intellectuelle ? Ils font une ablation de ce qui les détermine. Mais que sont-ils ont alors, sans conscience ? Animaux ! Rien de plus. Nous leur parlons de solidarité avec les oppressés, et ils nous parlent politiques et inconscience. Ce sont des aptères dont l’existence mérite d’être remise en cause, car alors quel sens ? Question existentielle … Et cette Justice, toujours la plus nue des complices, renforce la bêtise et la destruction .
Mais par une quelque grâce, nous pouvons nous passer d’eux. Ainsi, peuvent t’il continuer à être courtisanes, à exploiter les pauvres âmes, enfants et adultes, à se murer dans le silence de leur salon, de leur églises, dans le tohu-bohu de leur palais, construits au seul jeu d’apparence opéré dans leurs mosquées, aux vols dans les trésoreries.
Maintenant, faite attention au remuement des lèvres, c’est le même mot qui revient constamment, incessamment : révolution.
Le peuple veut faire sonner le gong de la Révolution. Il sort de sa “servitude volontaire”. Ce n’est plus qu’une impression. Elle fait trembler la terre de ses pas tonitruants. Elle n’a pas que la violence comme front ; elle est de partout, physique comme intellectuelle. Quoi qu’il en soit, elle est marquée du fer de la violence. L’inévitable, l’inarretable. C’est elle qui détermine l’évolution ou l’effondrement d’un État, d’une nation. C’est le point de non retour, certes déplorable mais inévitable.
A la querelle sartrienne et camusienne nous mettons fin ; la révolution doit être précédée de la révolte. Il n’y a pas sécularisation, mais plutôt union . Car c’est d’abord la “revendication par [les] Hommes de la justice dont on [les] prive» qui a fait descendre dans les rues, en colère, cette marée humaine. Et c’est en changeant radicalement nos esprits, en laissant pénétrer la lumière de la plus douloureuse des manières qui soit, en démontrant notre puissance de frappe qui est celle du peuple, mais surtout, en étant mû uniquement de b onne foi que le Graal nous appartiendra. Ensemble, parlant d’une même voix, d’un même Esprit, fils du brassage de nos volontés communes, marchant d’une même jambe vers l’unique direction qu’est le bien, d’un même coeur mû de bonne foi, nous seront enfin alors un peuple, ayant un but et une foi. Que nul ne redoute l’inévitable. Fuir la révolte et la révolution est similaire à la fuite face à la mort ou à la négation même de soi, de sa dignité d’homme. Absurde et vain. La révolte tout comme la révolution sont des humanismes. N’est-ce pas du chaos qu’est naît la lumière ? N’est-ce pas le but de la lutte que d’atteindre la paix ? Alors notre bien commun naîtra de ce que nous ferons les prochains jours. Choisissez la révolte, choisissez la révolution, peu importe, car tous ces chemins mènent à la libération. La lutte est d’abord intellectuelle et spirituelle. Dites non ; non pas d’une manière nihiliste, mais avant de dire Oui. Oui aux droits, oui à lalLiberté, oui à une nation sénégalaise prospère. Dénoncez, écrivez, accusez, pointez … La victoire sera notre. Et que nul n’oublie que, “ […] la révolte ne mourr[at] qu’avec le dernier homme”.