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Opinions, Idées et Débats des Sénégalais

Une Folie MeurtriÈre Et Absurde

Boris, Felwine et Bougar ont parlé. Yoro a répliqué. Les rappeurs avaient prévenu.

« Nous étions dans la ferveur des évènements malheureux de mars 2021 et le pays était à feu et à sang. Le Sénégal venait de traverser l’une des périodes les plus sombres de son histoire. Les rappeurs du pays avaient vu venir. Ils pensaient qu’il n’y a jamais un sans deux. Comme à l’accoutumée, ils avaient averti en faisant tonner leurs voix.

Voici quelques extraits de leurs discours qui rappellent à bien des égards les slogans mobilisateurs du mythique groupe anglais, les Beatles dans leur riposte musclée contre la guerre du Vietnam, avec des tubes comme « Power to the people » (Le pouvoir au peuple) et « Give peace a chance » (Donner la chance à la paix) qui ont été repris en choeur par les étudiants américains à l’Université de Berkley.

Le symbolisme et la portée de ces deux textes sous la belle incarnation du légendaire et emblématique chanteur John Lennon, renvoient à la pertinence et l’engagement de ces rappeurs sénégalais qui, à la place des pierres, des pneus brûlés et autres matéraux que les jeunes utilisaient dans les rues, avaient préféré les mots pour fustiger la violence et les dérives qui sont intervenues sous la gestion du pouvoir de Macky Sall. Ils s’étaient très clairement exprimés, sans porter de gants, à travers leur slogan  » Free Sénégal ». Un opus où Dip, Canabasse, Bril, Ngaka Blindé, Hakill, Jeeba, PBS, MC Yaram, Jahman Express n’étaient pas du tout tendres avec le pouvoir en place.

A LIRE  RÉDEMPTION

Il est retenu dans leurs phrasés des refrains comme, « ce qui me fait mal c’est de voir les jeunes mourir et que nos mères n’ont que leurs yeux pour pleurer… » qui figure dans le tube « Khekh you bess » du rappeur Dip Dound Guiss, au moment où Canabasse se plaignait en disant, « Ce qui tu veux nous faire, ça n’ira pas. C’est nous qui t’avons élu et maintenant tu nous as oubliés, et aujourd’hui la police se met à tirer sur nous. Nous avions confiance en toi président Macky Sall…, la démocratie sénégalaise est en perte de vitesse ». 

Dans « lettre au président » et dans un style qui se veut moins virulent, Brill se fait avocat, « Je suis mandataire de la population, cette dernière m’envoie pour vous dire que le sang coule, les parents pleurent…Le pays ne t’appartient pas, tu ne peux pas en faire ce que tu veux…. ». Quant à Ngaka Blindé, il écrit : « Sunu drapeau » et les mots débités par le rappeurs sont pathétiques. (Je trempe ma plume dans ton sang avec le coeur lourd et prie le bon Dieu pour qu’il nous vienne en aide. Nous sommes du côté du peuple quand il a besoin de nous. Tout le pays est à feu et à sang, l’heure est grave car les policiers nous tuent et pleurent ». C’est ainsi que le rappeur de la banlieue s’était questionné sur ce qui se passe dans ce pays. Alors que Jahman Express ne put s’empêcher dans « Lu Tax » de s’interroger à son tour sur ce qui ce passe au Sénégal en disant : « Pourquoi notre pays a changé de visage pour que tout le monde se mette à prier pour que la paix revienne, pourquoi tous ces morts ? Perplexe et dubitaif Jeeba se demande dans « mon rêve » (Est-ce ça la destinée du Sénégal ?). Revenant à la charge comme à son habitude le mythique groupe PBS avait encore élevé la voix. Pour dire cette fois-ci, à travers un discours de sagesse, et dans « Bayil mu sedd » (faire descendre la pression et la température sociale), un discours qui semble sermonner le président Macky Sall. Et c’est par le biais d’un coup de fil qu’ils ont préféré dire à leur président : « Allô, Àllô monsieur le président, je ne suis pas un partisan ni un ennemi, mais un simple citoyen qui parle librement, on doit discuter, tu dois mécouter sereinement. Rien ne va plus dans le pays, j’ai vu des scènes de guerre.. » Quant à MC Yaram, il enfonce le clou trop loin dans des propos que nous préférons taire par décence.

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Bref on est est tous complices. On a laissé faire. On a été laxiste et calculateur. Les rappeurs ont finalement eu raison sur nous tous. Contrairement à ceux qui avaient minimisé la situation, défendant mordicus que les évènements de mars 2021 étaient dus au couvre-feu. Or la question était éminemment politique. Il faut encore souligner l’incapacité de nos hommes à tirer les leçons de l’histoire. Dans un pays quand les artistes ne sont pas contents, les pauvres sont fâchés, les jeunes se lamentent, les hommes d’affaires qui créent les emplois et les richesses sont inquiets, là on est pas loin de l’instabilité politique. Les politiques ont alors à comprendre, quelle que soit la pertinence des réalisations ou des investissements dans un pays, ils pourront sembler insignifiants à cause de l’insécurité sociale, du déficit démocratique et de la rupture de communication entre les différents acteurs de la société. Il est vrai que les gens ne peuvent pas être d’accord sur tout mais quils s’accordent au moins sur l’essentiel. Car un pays a besoin d’un consensus sur un minimum de choses pour exister.

Babacar Papis Samba est auteur et adepte de la pensée complexe.







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