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Alliances Et Coalitions Politiques Au SÉnÉgal

Le système et l’antisystème

Le système politique d’un État définit son mode de fonctionnement, qu’il soit démocratique, autoritaire ou totalitaire. « Faire partie du système » fait référence à l’adhésion ou à l’intégration dans un système existant. Il peut être perçu d’une manière positive ou négative. Le bon côté du système est la normative, incarné par des politiciens expérimentés, efficaces, bien connectés et qui ont un impact positif sur le système à même d’en assurer la sécurité et la stabilité. Le côté négatif du système implique chez les individus qui l’incarnent une conformité excessive à des intérêts avérés ou à des attentes préétablies, une perte d’autonomie et d’individualité (les gens se tiennent pour peu ou prou), ainsi que la perpétuation d’inégalités ou d’injustices inhérentes au système lui-même.

L’antisystème quant à lui désigne généralement tout ce qui s’oppose à cette expression négative des systèmes. En politique, c’est la rengaine des rénovateurs, des anticonformistes et révolutionnaires. Il s’exprime de manière variable allant de la dénonciation, à la contestation parfois violente en passant par des initiatives et projets pacifiques. Le principe est de bien se démarquer, et le faire savoir. Il peut être servi comme modèle au peuple principal victime des pratiques dénoncées aux fins de gagner sa sympathie et renverser démocratiquement un régime.

Malheureusement au Sénégal, opposition et pouvoir s’abreuvant à la même fontaine, brandir l’antisystème à des fins politiques et électoralistes a ses limites et ne constitue le plus souvent qu’un leurre, une belle ruse ou de la pure démagogie. On dit généralement qu’ils sont tous pareils. Ces nuances sont bonnes à saisir pour ne plus se faire avoir tout temps par nos politiciens attitrés.

Un système politique dévoyé par des pratiques corruptrices, l’accaparement, l’opacité et la mauvaise gouvernance

Au Sénégal malheureusement en ces temps qui courent ‘’le système ‘’ n’est plus perçu que péjorativement par les populations et désigne tous ceux qui au tour du pouvoir maintiennent et perpétuent directement ou implicitement à leurs profits, des méthodes de gouvernance considérées comme blâmables ou infructueuses au détriment du peuple, se basant sur le clientélisme, l’accaparement des ressources et le partage de privilèges.

Qu’on l’accepte ou pas les politiciens ont terni l’image de la politique en tant qu’art de gérer la cité, par leurs mauvaises pratiques, faites de fourberies, de tromperies, de mensonges, de manipulations, d’accaparement de profits et de gains très souvent indus. Nous assistons au sein de la classe politique, de façon crescendo depuis deux décennies à une multiplication d’actions et de comportements décrédibilisant la posture et l’image de démocratie mature qu’on attribue au Sénégal. Le laxisme, l’impunité, la mal gouvernance pour ne pas dire la corruption ont atteint des niveaux insoupçonnés aussi bien au niveau du pouvoir que de l’opposition.

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La politique est aujourd’hui stigmatisée par un concept dénommé ‘’le système’’ où les partis au pouvoir et l’essentiel des partis d’opposition semblent bien s’entendre pour gouverner moyennant des concessions de partage d’intérêts et de privilèges. L’État et ses démembrements sont comparés à un gâteau dont les parts : ministères ; agences ; directions ; conseillers ; représentations locales et diplomatiques, ressources diverses et avantages sont réservées à un petit cercle d’initiés, d’amis et de collaborateurs excédant à peine le millier, de manière partisane et opaque. Dans ‘’ le système’’ la faute, l’incompétence ou l’insuffisance n’existent plus, tout est couvert, tout s’arrange. Cette gestion bienveillante ne s’encombrant d’aucune rigueur, favorise l’enrichissement personnel au détriment du bien-être de la population et alimente le sentiment de désillusion et de méfiance envers les dirigeants politiques.

Le complot contre le peuple par théorisation du partage du pouvoir pour régner sans rendre compte

Dans ‘’le système’’, le complot savamment ourdi contre le peuple pour valider ce pacte du partage, se singularise par le slogan : ’’aucun parti ne peut plus seul gagner des élections’’. Théorisé et mis en pratique, sa fin est de justifier le besoin de se coaliser pour gagner des élections et de se donner une légitimité usurpée de diriger un peuple berné, en se tenant les uns les autres et de cette posture se donner les possibilités de partager les biens et prérogatives du contribuable, ou tout simplement de régner sur le dos du peuple sans se sentir en devoir de rendre un jour des comptes, grâce à la toute-puissance forgée et entretenue autour d’une impunité sans limites.

Les coalitions ou les sur-coalitions de partis politiques sont les réceptacles bien désignés pour jouer ce pivot central, qui fédère les protagonistes engagés à la conquête des pouvoirs qui leur permettent de gouverner en toute tranquillité en veillant minutieusement à leurs intérêts. Ainsi le nombre de partis alimentant ces coalitions est passé en de de 41 en 2000 à plus de 335 en 2023. Les mêmes hommes politiques occupent le devant de la scène et perpétuent les mêmes méthodes de gouvernance, malgré les alternances du pouvoir en 2000 et en 2012

Les élections municipales de 2022 et législatives de 2023 ont fini de montrer que les coalitions et sur-coalitions puissants leviers pour gagner des élections n’étaient pas toujours viables, car ne reposent sur aucune base solide et durable comme une idéologie commune ou un programme partagé de gouvernance. Une fois les élections révolues ces groupements de partis n’ayant plus que peu de choses en commun, révèlent leurs antagonismes primaires ou sont attirés par d’autres centres d’intérêts qui font qu’ils s’affaiblissent et disparaissent au grand dam des populations qu’ils ont ensemble courtisé, qui les ont fait confiance. Il apparait évident que les nouveaux partis politiques tels qu’ils sont conçus et dirigés ne pouvant point aller seul à la conquête d’aucune forme de pouvoir ne sont plus crédibles. Il faut tout changer. Nos politiciens ont échoué et maintenant tentent de noyer le pays dans la violence, le sang, le feu, et la peur pour espérer régner. Le peuple y gagne quoi ?

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La nécessité de réformer le système :

Ces méthodes opportunistes de prise du pouvoir ou de gouvernance ne permettent pas d’apporter les changements nécessaires à résoudre les multiples problèmes d’existence, de sécurité et de bien être dont font face les populations. Tant que ce paradigme restera le principal outil et moyen de conquérir le pouvoir on ne s’en sortira pas. On ne crée plus de parti pour conduire ses militants à assumer un pouvoir dans la société, pour gouverner, mais pour participer au banquet des alliés, au partage du gâteau quel qu’en soit le prix.

Il est nécessaire d’engager une rupture profonde avec le clientélisme politique, d’impliquer les populations dans la réflexion, la formulation et l’adoption de grands mouvements politiques mus par une vision claire, soutenus par d’ambitieux programmes de société et son développement durable. Cela suppose la promotion de nouveaux visages politiques, de nouveaux modèles éprouvés, porteurs de valeurs morales et éthiques, et la mise en place de mécanismes de gouvernance transparents et responsables. Une véritable révolution pacifique à la portée des cartes d’électeurs de nos concitoyens, dont plus de 50% ne se sont pas exprimés depuis fort longtemps et qui forcément sont impatients de jouer les arbitres pour relancer ce pays en panne d’idées et de décisions courageuses, un véritable désordre.

Il faut absolument casser cette dynamique qui alimente et entretien ‘’le système’’ en créant sans limite des partis pour seulement, rentrer dans des coalitions, des mutuelles d’intérêts politiques et attendre son retour d’investissement à court terme. Cette course ou cette propension à profiter du pouvoir est le socle de la transhumance ou migration politique régulièrement observée à chaque changement de régime au pouvoir, quelles que soit ses orientations ou idéologies politiques. Oui en politique au Sénégal on ne vit que pour soi, et le peuple en a vraiment marre, du pouvoir pour ses limites mais aussi de l’opposition pour son immaturité et ou son manque profond de discernement.

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Démocratiser la gestion des partis principe élémentaire en démocratie

Il faut réformer et rationaliser le système démocratique au Sénégal en remettant la politique au service exclusif des populations, de la cité, et non celui des chefs propriétaires-actionnaires de partis qui gèrent leur organisation comme bon leur semble. Au Sénégal le parti appartient au chef président ou secrétaire général. Sa gestion autocratique y favorise la dissidence et la duplication. Comment s’imaginer dès lors, que ces pratiques ne prospèrent pas au niveau supérieur qu’est le pouvoir, quand il est finalement conquis par ces types d’organisations. Le chef de parti au pouvoir possède et gère finalement le pays comme il possède et gère son parti, en ménageant intelligemment la quadrature, ses groupes de partis associés ou coalisés. Il s’arroge les droits principaux, d’agir, de faire et faire faire, de profiter sans être inquiétés du système bien contrôlé et verrouillé.

Il est impératif de redonner son sens noble à la politique qui est une affaire de groupe, de société et non d’individu. Les intérêts personnels et partisans doivent être relégués au second plan, et les politiciens doivent se concentrer sur le bien commun et la gestion vertueuse de la société. La gestion du pays doit être basée sur la reddition de comptes, la transparence et la responsabilité envers le peuple, et non sur la satisfaction des intérêts personnels par le truchement de coalitions sans grandes ambitions politiques mues simplement par le but de grappiller quelques menus fretins du gâteau-butin subtilisé au peuple resté naïf.

Au Sénégal les alternances politiques se succèdent et se ressemblent car ne sont que le fruit d’un système qui s’auto entretien par la création incessante de micros partis politiques qui coalisent pour arriver au pouvoir sur la base du cercle vicieux du partage de privilège et d’intérêts constituant les parts du gâteau républicain.  En perpétuant ainsi les mêmes méthodes de gouvernance basées sur le clientélisme et l’accaparement des ressources, le jeu des coalitions de partis sans véritables ambitions n’a cessé de trahir les attentes légitimes du peuple. Il est urgent de réformer ce système en remettant la politique au service exclusif des populations qui l’animent et de la cité. Il est primordial de favoriser l’émergence de nouveaux leaders et de grands partis politiques, qui remplaceront les coalitions dépourvues de programme cohérent et d’idéologie claire, pour une gouvernance transparente, responsable et orientée vers le bien-être de la population. Seul un tel changement pourra restaurer la confiance du peuple envers ses dirigeants et permettre un réel développement du pays.

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