Senexalaat - Opinions, Idées et Débats des Sénégalais
Opinions, Idées et Débats des Sénégalais

Un Choix CornÉlien À Haut Risque

La décision de Macky Sall de choisir le prochain candidat de Benno Bokk Yaakaar (BBY) pour la prochaine présidentielle, risque de se transformer en opération de sauvetage de l’APR en voie d’implosion. Ainsi, ce choix risque d’aggraver les divisions et autres dissensions au sein du parti présidentiel, dont plusieurs responsables sont pressentis pour prendre la place de Macky Sall à la tête de la coalition. De potentiels candidats qui, malgré la décision attendue du chef de l’État, pourraient s’affranchir de l’onction de Macky Sall et aller à l’aventure de la présidentielle en dehors de Benno.

C’est un choix cornélien qui peut s’avérer crucial pour l’avenir de la coalition au pouvoir Benno Bokk Yaakaar, en particulier de l’Alliance pour la République (APR).  Macky Sall qui, avec l’aide de Moustapha Niasse, vice-président de la Conférence des leaders de BBY, doit choisir le prochain candidat de la coalition, semble être pris au dépourvu par le choc des ambitions au sein de sa propre formation politique. Les candidats pressentis pour lui succéder (Abdoulaye Diouf Sarr, Amadou Ba, Aly Ngouille Ndiaye, Abdoulaye Daouda Diallo et Mahammad Boun Abdallah Dionne) sont passés sous les fourches caudines du grand maître Moustapha Niasse chargé par Macky Sall d’auditionner les potentiels candidats de BBY.

À la suite de cet épisode, le chef de l’État, de retour de sa tournée en Afrique de l’Est, devra choisir le nouveau champion de la coalition présidentielle. 

Les dernières scènes de violence à la permanence du parti, entre les partisans d’Amadou Ba et d’Abdoulaye Diouf Sarr, viennent confirmer cette montée des tensions. Des militants déchaînés, sous le regard des responsables politiques républicains, ont mis à sac le siège de l’APR, à l’occasion d’une rencontre organisée dans le but de sceller l’unité autour du choix de Macky Sall. Sans compter les multiples invectives et autres appels de différentes structures appelant à nommer tel ou tel candidat.

A LIRE  LE REFOULÉ D'UN SCANDALE MORAL ET DÉMOCRATIQUE

Des ‘’apéristes’’ de Ziguinchor ont appelé à la nomination d’Abdoulaye Daouda Diallo, tandis que d’autres ne veulent pas d’un Boun Abdallah Dionne considéré comme non représentatif au sein du parti. 

Selon plusieurs spécialistes, le retard dans la nomination du candidat ne fera qu’accentuer les tensions et les clivages interpartisans. Car les responsables ‘’apéristes’’, au fil du temps, vont de plus en plus s’incarner dans le costume de candidat et qu’il sera difficile de les ramener dans les rangs. Des rumeurs du côté du palais de l’avenue Léopold Sédar Senghor font état d’une possible candidature de cadors de l’APR comme Amadou Ba avec ou sans l’approbation de Macky Sall. 

Le Premier ministre, qui a toujours refusé d’afficher ses ambitions, apparaît comme quelqu’un d’incontournable au sein du parti et même au-delà.

Néanmoins, son attitude effacée et trop discrète, surtout face à l’opposant farouche au régime Ousmane Sonko, lui vaut une certaine inimitié au sein de l’APR où il était même accusé de téléguider en sous-main le tonitruant leader de Pastef.  

Macky Sall semble être au pied du mur. Toute décision qui devrait faire l’unanimité risque d’imploser un peu plus la coalition. Déjà, Abdou Aziz Diop, conseiller spécial à la présidence, a annoncé sa démission de son poste et son départ de l’APR.

Le numéro d’équilibriste de Macky Sall face au risque de scission des partis alliés

Des personnalités issues de la coalition présidentielle comme Alioune Sarr, ancien ministre du Commerce (AFP), Arouna Coumba Ndoffène Diouf et Idrissa Seck, ancien président du Cese (Rewmi) ont déjà annoncé leur candidature. Macky Sall, qui a appelé à l’unité au sein de son parti, semble être de plus en plus débordé par ces rivalités internes qui, à terme, risquent d’affaiblir la mouvance présidentielle. La chape de plomb qui a sauté avec la non-candidature de Macky Sall a semblé libérer la parole et faire émerger les ambitions au sein d’un APR en mal de structuration. Un parti considéré comme une armée mexicaine avec beaucoup de dirigeants et peu d’exécutants, et qui pourrait échapper à son maître.

A LIRE  La Constitution, un instrument au service d’un parti ?

Conscient du risque de démobilisation des autres responsables de son gouvernement, Macky Sall a lancé un brin d’avertissement à ses troupes, lors de son adresse à la Nation : ‘’D’ici la transmission du pouvoir le 2 avril 2024, j’assumerai avec responsabilité et fermeté toutes les charges qui incombent à ma mission’’, avait-il lancé. 

Selon l’analyste politique Mamadou Sy Albert qui s’exprimait hier dans nos colonnes, cette situation de perte d’autorité risque de s’accentuer dans les prochains mois, car les membres de la majorité savent que le président Sall ne détient plus les clés concernant leur avenir politique. D’après lui, l’autorité de Macky Sall risque de s’effilocher dans les prochains mois, d’autant plus qu’il ne possède plus les leviers pour imposer ses décisions à sa majorité. 

Dans cette course contre la montre, Macky Sall doit aussi jongler avec la susceptibilité des partis alliés. Même si le LD, le PIT, le PS et l’AFP lui ont donné carte blanche pour le choix du prochain candidat de Benno, on note une scission entre l’élite des partis et la base. Les militants ne supportant plus cette domination de l’APR accusé de phagocyter tous les postes politico-administratifs et d’imposer leurs candidats à l’occasion des investitures, risquent de manquer à l’appel au soir du 25 février 2024. Cet électorat, frustré par une décennie de domination ‘’aperiste’’, pourrait s’exiler vers d’autres candidats issus de leur mouvance : le PS vers Taxawu Sénégal, l’AFP vers le Grand parti. 

Macky Sall devra tenir compte des forces en présence au sein des partis alliés, d’où l’option prise d’associer Moustapha Niasse à cette décision afin de mieux contenter les partis alliés. Cet état de fait pourrait aussi jouer sur la prise de décision du chef de l’État.

A LIRE  Sénégal : un président en sursis

Dans tous les cas de figure, la décision du chef a intérêt à ne pas tarder, au risque de faire monter la température dans un APR qui prend de plus en plus l’aire d’une cocotte-minute.







Laissez un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *