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Sortez Les Chapelets, Un Salafiste Au Palais !

Le 2 avril 2024, on y est : c’est un salafiste qui s’installe au Palais. Sa barbiche coupée au cordeau ainsi que le point noir sur le front, qui atteste de son assiduité aux prières, rassurent les électeurs. Son éternel sabador étriqué, son pantalon un peu court et ses marakiss élimées laissent certes planer des doutes. 

Non, il n’est pas pauvre, juste économe. 

Le gaspillage, ça ne le connaît pas : nos deniers seront entre de bonnes mains. D’ailleurs, dans son quartier, les témoignages sont unanimes : jamais un trou suspect dans la caisse de la mosquée sous sa comptabilité sourcilleuse… 

Comme directeur de campagne, histoire de rassurer les bonnes vieilles cent familles wolofes qui font le Sénégal, Oustaz Candidat a le bon goût d’exhiber un père de famille qui présente une tête d’avis de décès : ce monsieur est des leurs. 

Depuis plus d’un demi-siècle, El Hadj directeur de campagne, un charmant mouskalaf obtus et madré, pourfend le vice, chante la vertu, casse de l’animatrice dépravée, censure du cinéaste impudent, sermonne du chanteur canaille… 

Le gardien de nos authentiques valeurs, en résumé, ouvre les portes, essuie le fauteuil, cire les marakiss, rajuste le sabador d’Oustaz Candidat. 

Si ça ne tient qu’à lui, sur terre, il n’y aura que des mâles impuissants et des femelles frigides : ça vous simplifie le monde. 

Rien que de s’afficher avec «Monsieur la Vertu Incarnée» de ce dernier quart de siècle, Oustaz Candidat gagne une place au deuxième tour devant toutes sortes de vendeurs de miracles. 

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Les électeurs se font une religion lorsqu’Oustaz Candidat, lors de son meeting de clôture, exhibe quatre épouses en rangs disciplinés, couvertes de la tête aux pieds. On ne saura jamais vraiment qui il y a en dessous… 

Oustaz Candidat est surtout le symbole de l’autorité, de la virilité, de l’opulence. 

Au deuxième tour, le peuple des analphabètes frustes, qui compose la large majorité de nos concitoyens, le préfère de loin au p’tit fonctionnaire qui n’ose ni ramener la peine de mort ni condamner l’homosexualité. 

C’est lors de leur face-à-face que tout se décide, devant les caméras des télévisions locales et des sites internet. 

Oustaz Candidat ne cherche pas ses mots : les homos, comme les francs-maçons, il faut les pendre haut et court, les découper en morceaux, les jeter dans un trou, y mettre de l’essence et gratter une allumette… 

La France ? Qu’elle dégage avec sa langue officielle, ses costumes et ses cravates ! Le porc, l’alcool et les capotes seront interdits de séjour s’il s’installe au Palais. 

Etudier le latin et le grec deviennent, sous son mandat, des crimes passibles de bastonnades et d’emprisonnement, tandis que les lauréats du Concours général auront des bourses d’excellence pour parfaire leur savoir islamique au Caire. 

L’hymne national et le drapeau, promis, ils vont aux poubelles. A la place, une belle chanson d’Oum Kalthoum, «Le Rossignol du Nil», pour chanter le Sénégal, et une étoffe verte avec une lune au milieu pour nos équipes nationales qui n’iront plus nulle part : il y a des affaires plus urgentes dans la vie que le foot et le basket. 

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Et le premier ministre des Sports qui lui parle de lutte avec ou sans frappe est déjà un homme mort ! 

Son adversaire, quant à lui, se glorifie des chiffres de la Banque mondiale et du Fmi, se gargarise des taux de croissance à trois chiffres qu’il promet, de ponts et autoroutes dont il présente les maquettes en trois D, de financements non remboursables pour les femmes et les enfants, de sécurité sociale et autres combines bassement humaines. 

Son costume est huilé, ses godasses cirées et sa crinière gominée : les Sénégalais croient voir un extraterrestre suspect en face d’Oustaz Candidat qui, lui, veut, pour sa jeunesse, non seulement de la droiture sur terre mais une place au Paradis dans l’Au-Delà. 

Y’a des propositions qu’on ne peut pas refuser… Bien entendu, ce sont les savants perses et égyptiens qui seront au programme dans l’enseignement supérieur dont la première année consacrée à la biographie de l’Imam Khomeyni et la deuxième à celle de Oussama Ben Laden… 

A compter de son élection, le Blue jean, comme tout ce qui vient d’Amérique, n’entre plus chez nous. Les télés remplaceront les programmes de variétés musicales par des sermons et Dj Boubs ira à la retraite, malgré son serment de ne désormais promouvoir que des musiques sacrées. 

Youssou Ndour, qui a plus d’un album dans son sac, refera cent fois des remix de son album «Allah», en précisant sur la couverture l’année de sa diffusion et effacera sa consécration aux sataniques Grammy Awards. 

On a beau tenter de le lui rappeler, il ne se souvient plus de ce fameux… Grammy quoi ? Le centre du monde se déplaçant de l’Ouest à l’Est, inutile de préciser que l’ambassadeur israélien quittera le territoire sénégalais vingt-quatre heures après la prestation de serment d’Oustaz Président qui, la main sur un Coran, jure devant Dieu et les musulmans de protéger la foi, la vertu et la propagation des principes de l’islam… 

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Son excellente mémoire, qui ne le trahit jamais, sera là, durant tout son premier quinquennat, pour lui rappeler que les khalifes des confréries, pendant les élections, sont restés neutres, ayant même l’air de préférer le défenseur de l’hypocrite laïcité. 

Au bout de quatre années de nettoyage de la morale nationale à grands renforts de ses sermons les vendredis, synchronisés sur toutes les chaînes et sites, d’exécutions et de lapidations publiques, quand Oustaz Président propose par voie référendaire que la présidence de la République, suprême manifestation de la volonté divine, devienne une fonction à vie, les Sénégalais y adhèrent à cent cinquante pour cent. 

Il y en a qui voteront deux fois pour qu’Oustaz Président ne doute pas une seconde de leur loyauté… 

Que veut de plus le Peuple ? Dites, désormais, Al Oustaz Président illa yaw mi dîni !







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