Senexalaat - Opinions, Idées et Débats des Sénégalais
Opinions, Idées et Débats des Sénégalais

Fin De L’illusion D’une Cedeao Des Peuples

La décision est qualifiée par une grande partie de l’opinion de malheureuse, de n’être ni dans l’intérêt de ceux qui restent dans la CEDEAO, ni dans l’intérêt de ceux qui sont sortis, le Niger, le Burkina Faso et le Mali regroupés dans un cadre dénommé l’Alliance des Etats du Sahel (AES).

Les conséquences lourdes dont les civils seraient les premières victimes sont souvent évoquées. Comme elles l’ont été déjà depuis l’embargo imposé à l’AES au lendemain des putschs militaires. 

Quid des coups d’Etat constitutionnel et institutionnel qui ont fait le lit de tout ce désordre en Afrique de l’Ouest déjà fortement éprouvé par le péril terroriste, les changements climatiques, les épidémies, etc. ? Nous en reparlerons plus bas.

La CEDEAO des peuples clamée sur tous les toits est une réalité de façade. D’abord l’épidémies d’Ebola en 2015 concentrée notamment en Guinée, au Liberia et en Sierra Leone, puis la pandémie à Covid-19, ont montré à quel point le multilatéralisme et la solidarité ne sont qu’un vœu pieux. Au contact de la réalité, les faits sont tout autres.

Ne nous voilons point la face.

Depuis quelques années, on assiste à la montée de ce qui s’apparente à du nationalisme dans nombre d’États membres de la CEDEAO. La démographie galopante, combinée à la pauvreté à cause du chômage des jeunes notamment, irritent de plus en plus les populations. Les exemples de scènes de xénophobie en Afrique du Sud contre les Nigérians, et plus près de nous, les mêmes actes entre Burkinabè et Ivoiriens, en sont quelques illustrations. La circulation des personnes et des biens, obligatoire en vertu du protocole de la CEDEAO sur la question, ne connait pas une application rigoureuse. La célèbre phrase qui veut qu' »en Afrique on est partout chez soi » s’effrite chaque jour un peu plus. Le nationalisme est de plus en plus chuchoté, avec pudeur, même dans le cercle des intellectuels africains qui ne croient presque plus aux idéaux d’une Afrique unie. La vocation première de la CEDEAO, soulignons-le, était de mettre en œuvre des politiques cohérentes pour une intégration économique de ses Etats membres.

A LIRE  LES COUPS FOURRÉS DU MACKY

Au niveau de l’élite politique, on note une absence de leadership au sein de cette organisation créée depuis 1975. S’y ajoute une division issue, entre autres, et plus récemment, des sanctions de la CEDEAO contre les régimes militaires dans la région. Des sanctions qui visent d’abord les populations civiles, faut-il le rappeler. 

Mais comment ses militaires sont parvenus à s’imposer dans leur pays respectif et semblent recueillir l’adhésion et le soutien des populations ? Les scènes de liesse populaire qui accompagnent les chutes de régimes civiles, au Burkina Faso, au Niger et au Mali renseignent suffisamment sur la rupture profonde et le manque de confiance de ces populations vis-à-vis de leur gouvernant, de l’élite politique plus généralement.

Le protocole additionnel de la CEDEAO sur la démocratie et la bonne gouvernance, pourtant document de référence, est peu ou pas considéré par les dirigeants qui, au lieu de mettre en place des mécanismes juridiques, réglementaires et législatifs pour son application effective, trouvent toujours les moyens de rester au pouvoir au-delà de leurs mandats légaux. Des actes anticonstitutionnels qui ne sont presque jamais condamnés par la CEDEAO désormais considérée comme une organisation moribonde, au service de puissances étrangères, la France plus précisément.

Constat : les mécanismes régionaux au sein de la CEDEAO ont montré leurs limites dans de nombreuses situations. Souvenons-nous-en, alors que le Mali et tout le Sahel étaient menacés en 2012 par des groupes armés terroristes, l’organisation n’a pas pu apporter avec célérité une réponse forte et coordonnée à la hauteur de la menace, montrant ainsi des défaillances profondes dans les systèmes de défense collective. Ce qui a été à l’origine de l’intervention de la France rejointe par d’autres puissances et finalement de ce bousculement de forces étrangères dans le Sahel.

A LIRE  Les menaces rampantes qui guettent le Sénégal !

Que nos dirigeants se le tiennent pour dit. L’Afrique, sa population, ses armées, ne nourrissent plus de complexes vis-à-vis de l’Occident. Les temps ont changé. Plus rien ne se décidera sur le dos des Africains de plus en plus conscients que tout ce qui se fait sans eux est contre eux, conscients également que leurs nombreuses ressources minérales et leur forte et jeune démographie pèsent sur la balance.

C’est aussi une question de dignité.

Mon avis est qu’il nous faut de grands chocs pour après rebâtir de bonnes choses avec et pour nos populations. La souveraineté ne se proclame pas. On doit aussi mettre en place des réformes endogènes, structurantes et résilientes pour faire face aux chocs exogènes. Nous devons prendre notre destin en main. Ce ne sera pas facile. Nous n’en verrons certainement pas les résultats immédiats. Mais l’avenir et la dignité des générations futures en dépendent.







Laissez un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *