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Regard Critique Sur L’intervention De L’economiste Kako Nubukpo Sur Rfi

Nous avons suivi avec intérêt sur la Radio France Internationale (RFI) une intervention de Monsieur Kako Nubukpo, économiste reconnu et par ailleurs Commissaire en charge de l’Agriculture, des Ressources en eau et de l’Environnement à la Commission de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA). Celle-ci, actuellement largement partagée sur les réseaux sociaux, a porté sur plusieurs sujets notamment économiques dont entre autres, la question relative au franc CFA. Commentant la récente volonté exprimée par les nouvelles autorités sénégalaises tendant à envisager le lancement d’une monnaie nationale, il a, dans ses développements, esquissé des reformes qu’il juge nécessaires sur le franc CFA à savoir :

1- le changement de nom

2- l’abandon de la garantie de convertibilité

3- l’instauration de règles de rotation au poste de Gouverneur en ce qui concerne la BCEAO

4- la modification des règles de gouvernance notamment l’articulation des politiques monétaires et budgétaires

5- l’ouverture de concertation sur la question du régime de change mais en relation avec la CEDEAO.

Mon avis est que des réformes focalisées sur ces seuls paramètres évoquées par l’économiste ressembleraient à des réformettes. Le problème du franc CFA et les nombreuses contraintes qu’il fait peser sur nos économies demandent plutôt des modifications structurelles.

Monsieur Kako Nubukpo a, me semble-t-il, omis dans son argumentation 5 mesures de fond que nous avions du reste rappelées dans une de nos dernières communications publiée dans la presse le 28 mars dernier.

1- Changer la parité fixe actuelle au sein de l’UEMOA et non pas en attendant d’en discuter avec la CEDEAO comme il le préconise, ce qui risquerait de retarder l’agenda. Ce régime de change gagnerait à être déterminé par rapport à un panier de monnaie caractéristique de notre structure de commerce extérieure. Une monnaie arrimée à l’euro, comme c’est le cas actuellement pour le franc CFA nous confine dans une position d’importateur, gêne considérablement nos exportations, notre balance commerciale et au-delà, l’impérieuse nécessité de transformer nos matières premières locales sur place grâce à de bonnes politiques d’industrialisation. Il faut une transformation structurelle de nos économies. Pour rappel, selon la Banque Africaine de Développement (BAD), l’Afrique enregistre 35 milliards de dollars d’importations nettes de denrées alimentaires par an, un chiffre qui devrait atteindre 110 milliards de dollars à l’horizon 2025, si les tendances actuelles persistent. Au niveau de l’UEMOA, les importations de biens et services ont atteint 36 511 milliards de FCfa en 2022 soit 32.9% du PIB.

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2- Imprimer nos billets de banque sur place ou à défaut sur la base d’appel d’offre international au lieu que ce soit toujours en France. L’impression des francs CFA, se fait à Chamalières par la Banque de France depuis sa création en 1945. Il est temps que les chefs d’État des pays de la Zone franc apprécient de manière optimale l’intérêt et l’opportunité du lieu de fabrication.

3- Modifier les règles de fonctionnement des organes de gouvernance des banques centrales des 3 zones concernées par le dispositif (UEMOA, CEMAC, COMORES) de manière à rendre les décisions entièrement africaines.

4- Revoir les missions de ces banques centrales en leur donnant une vraie mission de plein emploi au lieu des seuls objectifs réellement poursuivis de lutte contre l’inflation. Ce qui signifie en d’autres termes, desserrer l’étau de politiques monétaires restrictives et de ratios prudentiels calés sur ceux de la zone euro, lesquels handicapent l’accès au financement des acteurs économiques.

5- Faire circuler dans les 3 zones les mêmes signes monétaires afin de favoriser leur intégration. Rien ne peut justifier le fait que le franc CFA d’Afrique centrale ne soit pas interchangeable avec le franc CFA d’Afrique de l’Ouest.

Magaye GAYE

Économiste international Ancien Cadre de la BOAD et du FAGACE







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