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Opinions, Idées et Débats des Sénégalais

Fuite En Avant Ou Courage De Reculer ?

S’il veut bien se dépêtrer de l’étreinte des apprentis-sorciers et flagorneurs à deux sous qui l’ont quasiment pris en otage, Macky Sall, chef d’Etat en exercice, a encore la chance d’ouvrir les yeux et les oreilles pour revenir à la réalité. Mais le veut-il vraiment ? Le peut-il seulement ? 

C’est l’histoire d’un petit garçon de dix ans pris en flagrant délit de vol de tartine de chocolat avec laquelle il voulait beurrer le petit morceau de pain qu’il avait pris soin de garder après le petit-déjeuner. Surpris par la domestique dans la cuisine, il l’a gentiment suppliée de ne rien dire à papa ou à maman. Attendrie, elle le sermonne et lui enjoint de ne plus recommencer, tout en le félicitant d’avoir été franc et courageux. Le garçon lui répond alors : «si tu ne m’avais pas pris en flagrant délit, j’aurai certainement nié mordicus…» Toute ressemblance avec une certaine actualité n’est que pure coïncidence, comme disent les cinéastes.

A entendre ce qui se lit et s’entend dans la presse, on est sidéré et abasourdi par le torrent de mauvaise foi qui enrobe les prises de position de hauts responsables de la majorité présidentielle sur cette histoire de promesse violée. Qu’ils soient ministres, DG de sociétés, députés, transhumants recyclés ou autres phénomènes en voie de disparition du landernau, leurs argumentaires sont si précaires qu’ils en évacuent le sujet par la tactique de la généralisation, celle qui met tout le monde dans le même sac, mais aussi par des insultes pures et simples, des allusions non assumées, etc.

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Pensée unique

Ils sont la preuve vivante que quand on n’a pas raison, et que l’on manque de modestie, on sombre très vite dans le terrorisme intellectuel. Imam Mbaye Niang, député et homme politique responsable et mesuré, méritait-il cette charge violente et lâche venue de Moustapha Diakhaté, président du groupe parlementaire Benno Bokk Yaakaar ? Pourquoi les uns sont si libres de s’accrocher à leurs privilèges (logement gratuit, téléphone gratuit, voiture de fonction, gasoil gratuit, passeport diplomatique, autres petits avantages, etc.), quand d’autres ne sont pas en droit (et en devoir) d’assumer leurs désaccords en jugeant éthique de démissionner de certains postes ? N’est-ce pas de l’intolérance sans cause ? N’est-ce pas la preuve aussi que le pouvoir corrompt et corrompt absolument ?

Il n’y a aucun doute qu’il existe des hommes politiques qui ont perdu une grande partie de leur crédibilité dans l’opinion après leurs turpitudes dans une autre vie, dans un autre pouvoir. Ceux-là, les électeurs sénégalais les ont pris en repérage depuis longtemps et n’ont pas manqué de les sanctionner quand l’occasion s’est présentée à eux, et en attendant peut-être de les envoyer à la retraite. S’ils ont plus ou moins fini de payer leurs dettes, c’est le peuple souverain qui en décide.

Coupable d’aujourd’hui

Mais là, les Sénégalais sont en face d’une autre forme de turpitude qui s’appelle déshonneur et dont l’acteur principal n’est malheureusement personne d’autre que le Président de la république. On est donc dans un registre de responsabilité autrement plus grave car il s’agit de la première autorité politique et morale du pays, de la nation, de l’Etat. En surfant très fortement sur une vague inespérée offerte sur un plateau d’argent par le chef de l’Etat, l’opposition politique d’aujourd’hui joue «son rôle». Ils le font exactement comme Ousmane Tanor Dieng, Moustapha Niasse, Idrissa Seck, Amath Dansokho, Abdoulaye Bathily, Cheikh Bamba Dièye et…Macky Sall avaient pris d’assaut le «despotisme éclairé» d’Abdoulaye Wade. Qui s’en était plaint parmi ceux qui jacassent et tempêtent dans les médias aujourd’hui ?  

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La réalité est que Macky Sall, après s’être dédit et noyé dans les arguties juridiques préparées par des apprentis-sorciers, est tombé dans le piège de la solitude dans le pouvoir. Entre l’activisme de ses thuriféraires classiques, le discours va-t-en-guerre de ses séides, les «conseils» des flagorneurs à deux sous, le risque est grand qu’il ne perçoive pas la clameur populaire contradictoire et vigilante qui le rappelle à l’ordre, des charretiers aux cadres d’administration, des balayeurs de rues aux fonctionnaires anonymes, des femmes de ménage aux commerçants de Sandaga.

Tous souhaitent qu’il revienne humblement à la Politique, la politique comme art de servir les intérêts fondamentaux de la Cité contre les tribus de politiciens professionnels et assoiffés de pouvoir qui lui content fleurette matin et soir. Des plumes plus indiquées que la nôtre lui ont suggéré des solutions de sortie de crise qui l’extirperaient de ce «Petit soir» tragi-comique du 16 février 2016, point de départ d’une fuite en avant débridée dont personne ne sait où elle s’arrêtera. Lui peut-être sait où il va, mais le croirait-on s’il voulait bien nous le dire ?

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