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La Planification Participative, Condition D’une Bonne Gouvernance Des Territoires : 2iéme Partie

La Planification Participative, Condition D’une Bonne Gouvernance Des Territoires : 2iéme Partie

Plus ma réflexion sur la pauvreté de ma nation asservie évolue, plus cette affirmation prend sens à travers cette croyance absolue que j’ai en nos territoires comme l’unique solution pour la sortie du sous-développement.

La première partie de notre article nous a permis de nous interroger sur le pourquoi de la planification territoriale , et les formes de planification qui peuvent exister au Sénégal, dont celle radicale.

Dans cette seconde partie, Moussa Bala Fofana illustre sa théorie par un exemple concret, la Casamance. Une bonne politique de planification territoriale ne repose pas seulement sur une approche fondée sur l’innovation. En effet, au plan technique, il faut faire le choix de la catégorie de planification adaptée au fait territorial. Un rapide survol des quatre catégories de planification répertoriées (Marc Urbain Proulx) par la sociologie des politiques publiques nous montre l’existence de la planification rationnelle globale (PRG). Ici se sont les valeurs générales de la vision politique énoncée qui déterminent les options stratégiques qui s’offrent aux planificateurs. Le recoupement entre les valeurs de la vision et les options stratégiques identifiées est l’étape clef de cette forme de planification. Ensuite, nous avons la planification par petits pas éclatés (PPP) dont la mission essentielle est de corriger les erreurs du passé. Ainsi se sont les résultats et les options du passé qui dictent la logique planificatrice. La planification d’allocation ne s’appuie donc pas sur une vision et il faut préciser que la correction des options du passé est en fonction des moyens disponibles. L’élément structurant de la planification stratégique, qui est la troisième catégorie de planification, est la division des finalités de la vision en axes stratégiques composés chacun d’objectifs spécifiques. Dans ce type de planification les orientations stratégiques potentielles deviennent des programmes et les objectifs spécifiques des projets. D’ailleurs, c’est cette logique d’une gestion axée sur les résultats que le Sénégal essaye d’appliquer et chaque année des ministères quittent la gestion par ligne budgétaire (qui date des indépendances) pour aller vers la gestion par budget programme. C’est le fameux CDS-MT (cadre de dépense sectoriel à moyen terme) qui se compose de programmes d’action budgétisés. Les actions budgétisées ont un temps d’exécution précis, un acteur identifié comme le responsable de l’action (principe d’imputabilité), un indicateur pour l’évaluation de chaque action et le moyen de vérification pour chaque indicateur.

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Enfin, la dernière catégorie est la planification dite interactive, que je préconise pour le Sénégal et qui est en parfaite harmonie avec la vision innovatrice préconisée un peu plus haut. Cette planification s’adapte au fait territorial évolutif et à la dimension sociétale de la notion de territoire. Par l’interaction, les acteurs locaux en charge de la gouvernance sont responsabilisés et impliqués au tout début du processus de formulation. La planification interactive est ce qui se rapproche le plus du concept de développement durable. Comme son nom l’indique, elle repose sur une mobilisation sociale comme base de la planification territoriale. L’analyse des problèmes et l’ouverture aux critiques doivent guider la définition des objectifs partagés par l’ensemble des acteurs du territoire considéré. La planification interactive doit engendrer une prise en main collective par le dialogue et l’échange. Au-delà des objectifs spécifiques à atteindre au niveau du projet de territoire, cette forme de planification va permettre la création d’une véritable gouvernance territoriale. Les acteurs doivent être en équilibre entre la structure statique en charge de la gouvernance et la dynamique évolutive impulsée qui s’occupe quant à elle de la gestion du projet de territoire.

Pour le Sénégal, l’adoption de cette logique interactive serait une prise de conscience des limites de l’option bureaucratique et de la posture de commandement des administrés qui ne peuvent s’appliquer dans des exercices avant-gardistes d’observation, de veille stratégique et de formulation d’une méthodologie spécifique à un territoire donné. Nous devons impérativement consacrer des efforts dans la planification, la gestion et l’évaluation des politiques publiques pour une gestion rigoureuse et heureuse de nos capitaux collectifs.

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Ma pensée va vers la Casamance où une telle logique planificatrice aurait l’avantage de créer une mobilisation territoriale forte autour d’un projet de territoire porté par les fils du terroir avec deux premières orientations stratégiques évidentes :

1- la Casamance terre de paix et de sécurité

2- la Casamance base d’une industrie agro-alimentaire sénégalaise.

Nous ne devons pas avoir peur de restructurer le Sénégal en des entités éco-géographiques et de responsabiliser les acteurs locaux autour d’une gouvernance socio-économique territorialisée. Car développer le Sénégal, c’est développer ces territoires. Un territoire est dit développé quand ses résidents ont un niveau de vie satisfaisant, un cadre de vie attrayant et un milieu de vie source d’épanouissement. Ces conditions de vie attrayantes ne peuvent être l’objet du hasard. Mais elles sont plutôt des résultats souhaités, recherchés et programmés dans chaque territoire du Sénégal. En réalité, il s’agit de permettre aux fils de la Casamance de reconstruire leurs terroirs, aux Foutankés de raviver leur terre, aux Baol-Baol de reconstruire leur économie, aux Dakarois de renforcer la durabilité de leur milieu urbain. Bref, il faut donner à chaque entité territoriale le droit, les moyens et la voie pour assumer et entreprendre son propre développement. Car un président et 30 ministres ne peuvent égaler le rendement d’une politique territoriale assumée par une équipe territoriale performante, organisée, engagée, triée sur le volet, contrôlée et évaluée de manière systémique et sur chaque domaine de compétence municipale par l’État central, la société civile et les populations.

Conclusion :

En somme, nous pouvons dire que le Sénégal doit opter pour une forme de planification territoriale qui fera de l’innovation l’aptitude vectrice d’une adaptabilité vis-à-vis des mutations perpétuelles. Par la technique dite interactive, cette planification innovatrice pourra réunir les forces vives du territoire autour d’un processus de mobilisation sociale pouvant garantir la construction d’un territoire fort, conscient et capable de maitriser ses enjeux et ses défis. Cette volonté politique louable nécessite avant tout un cadre juridique consacré à la territorialité, des stratégies de développement économique adaptées aux formes et forces des milieux du Sénégal et enfin une Gouvernance territoriale forte. À bien y regarder, c’est ce fil d’Ariane que j’ai voulu respecter dans les trois articles publiés à date :

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– Le cadre juridique instaurant la territorialité par l’Acte III de la décentralisation,

– La question des méthodes et techniques de diagnostics et d’intervention par le biais des SDT (Les Stratégies de Développement Territorial).

– L’application de la planification territoriale innovatrice et interactive pour asseoir une gouvernance territoriale apte à porter le développement durable et équitable de nos territoires.

Tout au long de l’élaboration de mes textes, une affirmation d’un de mes anciens professeurs M. Amady Aly Dieng, m’est souvent revenue comme une hantise. Il soutenait dans le cadre d’une discussion avec Maitre Abdoulaye Wade que « dans l’histoire de l’humanité, les capitaux étrangers n’ont jamais été à l’origine du développement économique d’une nation pauvre ». Plus ma réflexion sur la pauvreté de ma nation asservie évolue, plus cette affirmation prend sens à travers cette croyance absolue que j’ai en nos territoires comme l’unique solution pour la sortie du sous-développement.

Moussa Bala Fofana

 

Moussa Bala FOFANA

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