Au terme de l’an 1 de l’Acte 3 et après l’euphorie suscitée, les ambitions déclinées, les campagnes électorales à l’américaine déroulées, les professions de foi présentées lors des élections locales du 29 juin 2014, il importe d’établir quelques constats, de tirer des enseignements et de mener des réflexions sur le mode de gestion et les orientations à donner aux collectivités locales.
D’autant plus que, des premières réactions notées et débats enregistrés, il ressort que, la nouvelle réforme sur la décentralisation (Acte 3) n’est pas encore assimilée et beaucoup de ses dispositions prêtent à confusion ou présentent encore des limites certaines pour créer les conditions d’un développement local harmonieux et durable.
Toutefois, il demeure une constante : le Maire continue à être « le chef d’orchestre » qui va impulser la politique municipale apte à placer la commune dans les rampes du progrès. Mesdames, Messieurs les Maires, vu votre position centrale et le rôle déterminant que vous confère la loi sur la décentralisation concernant le développement local, la production de communes ou villes fonctionnelles où, les populations pourront vivre épanouies, est de votre ressort.
En effet, en ce 21ème siècle, la gestion municipale doit, impérativement, connaître des mutations et prendre d’autres orientations, différentes de celles qui consistaient à entretenir une clientèle politique tel que constaté depuis leur création à nos jours. Les communes servaient, essentiellement, à recruter massivement parmi ses travailleurs, des militants sans se soucier de leurs aptitudes professionnelles et à les appuyer financièrement ou en natures lors des cérémonies religieuses ou traditionnelles.
Ces pratiques d’un autre âge, même si une certaine frange de la population y trouvait son compte, sont à dépasser le plus rapidement pour céder la place à une gestion municipale qui rime avec les exigences de la modernité faisant que toutes les barrières et frontières ont été levées grâce au progrès fulgurant réalisé dans le domaine des Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (NTIC).
Ce changement de cap doit, aussi, accompagner la nouvelle réforme sur la décentralisation ou « Acte 3 » qui a consacré la « communalisation intégrale », l’érection de départements en un autre ordre de collectivités locales, la création de quelques villes pour favoriser l’intercommunalité et l’incitation à la mise en place de « pôles urbains » pour susciter un développement local intégré. Toutes ces réformes ne produiront les effets escomptés que si, les Maires sont capables de définir des visions de développement de leur territoire basées sur des stratégies claires, des objectifs précis et des actions cohérentes, réalistes et réalisables.
Les défis sont d’autant plus grands que, les villes sénégalaises sont caractérisées par l’ampleur et la complexité des problèmes urbains à solutionner ; d’ailleurs, la plupart d’entre-elles ont du mal à revêtir les caractéristiques d’une ville véritable où, comme la célèbre Charte d’Athènes le stipulait, il est possible de : « Habiter-Travailler-Circuler-Cultiver le corps et l’esprit ». A l’exception de quelques rares zones urbaines, la quasi-totalité des établissements humains sénégalais ont été bâtis de manière spontanée et anarchique de telle sorte que l’occupation spatiale est décousue, les rues étroites et les espaces pour l’implantation d’équipements collectifs inexistants.
Toutes ces raisons obligent à une gestion municipale marquée par le professionnalisme, l’organisation et la méthode, l’ingéniosité, la planification, l’ouverture à différentes compétences et sensibilités et la diversification des ressources budgétaires. Dorénavant, le Maire et son équipe auront à définir un projet de développement territorial cohérent, adossé aux réalités locales en mesure de booster l’économie et la fiscalité locales, de gérer durablement l’Environnement, d’améliorer nettement le système de transports et de la mobilité urbaine, de promouvoir un aménagement harmonieux de l’espace, d’accorder une attention particulière à l’Urbanisme et à l’Architecture, de créer les conditions d’un accès meilleur aux services de santé et d’éducation, de mettre en œuvre des projets structurants.
Mesdames et Messieurs les Maires, une telle démarche vous hissera au rang des illustres hommes et, occasion vous est donnée d’entrer dans l’histoire par l’impulsion de politiques clairvoyantes de la ville, la réalisation de grandes œuvres qui traverseront les époques et léguées à la postérité.
Une reconnaissance historique de cette envergure passe, impérativement, par un refus de l’ordinaire ou de la gestion municipale classique axée sur uniquement l’ordonnancement des recettes et dépenses, la distribution de secours ou d’enveloppes lors des grandes fêtes, le remplacement des ampoules grillées des lampadaires ou d’autres actions routinières de ce genre. C’est pourquoi, la priorité devra, plutôt, être accordée à des projets et programmes découlant d’une planification participative qu’à des actions désarticulées, par coup, ne profitant qu’à un groupuscule mû que par les profits de « l’investissement électoral » à engranger.
De cette manière seulement, les objectifs de développement endogène visés à travers le renforcement des politiques de décentralisation (régionalisation en 1996 et Acte 3 en 2014) seront atteints, en majorité ; rien que pour, exclusivement, le bien-être des populations quel que soit leur localisation sur le territoire national.
En définitive, la réussite d’un Maire reposera sur ses aptitudes à concilier les dimensions sociales et techniques, voire politiques (valables pour ceux investis par des partis politiques) ; autrement dit à trouver l’équilibre nécessaire à un bon management de la commune. Mais, il demeure de plus en plus évident que les populations deviennent exigeantes par rapport à une bonne prise en charge de leurs besoins en services urbains qui ne saurait s’offrir par des semblant de gestion municipale digne de l’époque des balbutiements des communes sénégalaises.
Mamadou DIENG
VISION GUEDIAWAYE
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