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Concours Général Sénégalais : Où Est L’égalité Des Chances ?

Concours Général Sénégalais : Où Est L’égalité Des Chances ?

Cette image illustre bien le décalage existant entre les écoles publiques/privées et celles dites bilingues concernant l’épreuve d’anglais au Concours général sénégalais. De plus en plus, le Concours général demeure l’un des moments forts de la célébration de l’excellence pour les autorités de l’école, les enseignants, les parents et les élèves. Cependant, si le Concours général, dans beaucoup de matières en compétition, permet de départager les élèves des classes de Première et Terminale dans notre système éducatif, il n’en est pas de même pour l’épreuve d’anglais qui rassemble les élèves des établissements pu­blics/privés d’une part, et ceux/celles des établissements dits bilingues. Dans les établissements du moyen et secondaire, les crédits horaires alloués à l’anglais varient entre trois et quatre heures pour les séries scientifiques et entre quatre et cinq heures au maximum pour les séries littéraires.

Au même moment, dans les écoles bilingues, les élèves peuvent faire plus de dix heures en sus de faire l’anglais dans des matières comme les mathématiques, les sciences, la géographie, l’histoire etc. Il se pose ainsi une question essentielle : comment est-ce que les autorités de notre système éducatif peuvent-elles accepter d’évaluer dans un même format des élèves qui n’ont pas les mêmes curricula et les mêmes profils ? Est-ce qu’il serait juste d’évaluer des élèves des séries scientifiques faisant neuf heures de mathématiques par semaine avec des élèves des séries littéraires faisant un maximum de trois heures par semaine en mathématiques ? Est-ce qu’aujourd’hui les principes fondamentaux pour toutes les évaluations, consistant à mettre un accent particulier sur des notions comme la fiabilité, la validité, la transparence, l’équité, la sécurité, la discrimination etc. dans nos différents concours sont pris en compte ? La réponse peut laisser penser le contraire.

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Au moment où le ministère de l’Education prône l’équité, la transparence, l’inclusion etc. à travers tous ses programmes à l’instar du Paquet (Programme d’amélioration de la qualité, de l’équité et de la transparence), l’on ne peut que se désoler de voir chaque année le scénario d’une évaluation biaisée au départ, sans qu’on ne tire la sonnette d’alarme. Je ne voudrais toutefois pas enlever le mérite à nos jeunes et brillants élèves récipiendaires des écoles bilingues qui sont méritants. Toutefois, il est temps de faire une évaluation des différents résultats en anglais et lancer des pistes de réflexion avec les acteurs du système.

En fait, étant moi-même membre de la Commission du Concours général, nous avons eu à attirer l’attention des décideurs sur ce fait en le mettant chaque année dans les procès-verbaux, mais en vain. Il nous faut donner les mêmes chances à nos enfants évoluant dans un même pays, mais ayant des systèmes différents. Je voudrais donner l’exemple du concours appelé Global spelling event ou «Epelle-moi» en français, que l’association Ates (Association des professeurs d’anglais du Sénégal) a organisé entre 2010 et 2013 avec le concours de l’ambassade des Etats-Unis au Sénégal et Tesol (une association internationale à laquelle l’Ates est affiliée). Pour ce cas précis, les organisateurs n’admettaient ni les enfants nés dans des pays anglophones, ou ceux nés de parents parlant anglais, ou étant issus d’établissements bilingues. L’autre disposition étant que les établissements faisant plus de huit heures la semaine en anglais ne pouvaient pas concourir dans cette épreuve. Cela, pour garantir une égalité de chances à tous les candidats en compétition. A l’issue de cette épreuve, les vainqueurs partaient à New York pour la finale réunissant beaucoup de pays, accompagnés d’un parent (tous frais payés par le sponsor Franklin). J’estime humblement que cette compétition a pris en charge l’équité et la transparence, afin de ne pas favoriser certains apprenants issus de familles anglophones, étant nés aux Usa ou y ayant grandi.

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Donc, il ne nous paraît pas juste, ni opportun de mélanger tous les élèves pour une même épreuve qui favorise d’emblée les élèves issus des écoles bilingues qui, depuis un certain nombre d’années, raflent presque tous les prix mis en compétition. Pour preuve, encore et encore, cette année, le premier prix est revenu à une élève de Waca (West african college of the atlantic) répondant au nom de Ndèye Fatou Kounta. L’année d’avant, c’était encore le même scénario. Les années passent et se ressemblent. Il n’est pas rare de voir dans le classement de tête les écoles bilingues (Waca, Yavuz Selim etc.) avoir la part belle et réserver des miettes aux autres établissements.

Pourquoi alors l’Etat n’organiserait-il pas un Concours général en anglais mettant aux prises les écoles bilingues d’un côté et les autres établissements de notre système qui pourraient avoir leur concours à eux. Il ne sert à rien de réunir dans un même terrain de jeu des athlètes ou boxeurs professionnels s’entraînant à temps plein à des amateurs ne faisant de la pratique qu’à leurs heures perdues. De même, le bon sens ne pourrait concevoir que l’on puisse mélanger les écoles bilingues et les autres établissements au Concours général en anglais au risque de pénaliser les autres élèves de notre système éducatif qui arrivent tant bien que mal à arracher certaines places dans le classements du concours.

Chères autorités académiques, il n’est pas tard pour bien faire et la raison et le bon sens voudraient que les personnes étant à des postes de décision puissent rectifier cette insuffisance et accorder la même chance à nos valeureux apprenants qui, si le système continue à les évaluer de la sorte, leur fera penser qu’ils/elles ne sont pas aussi intelligents ou compétents que leurs autres camarades, et pourraient être tentés de se considérer comme des idiots (voir image ci-dessus). Albert Einstein a montré la voie à suivre, et à nous de faire le reste du chemin. Loin de moi l’idée de rejeter ou combattre les établissements bilingues (mon propre enfant y est). Par contre, mon propos vise plutôt à corriger une injustice pendant qu’il est encore temps, et d’éviter de décourager les apprenants issus des établissements non bilingues qui à la longue, si nous n’y prenons garde, vont se décourager et se dire qu’il n’est pas utile de s’aligner sur une course le plus souvent perdue d’avance. Encore une fois, mon article ne vise qu’à corriger et à améliorer un système qui doit explorer d’autres pistes au grand bénéfice de tous les apprenants.

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Albert Einstein : «Chacun de nous est un génie. Cependant, si vous jugez un poisson par sa capacité à grimper sur un ar­bre, il passera le restant de ses jours à croire qu’il est stupide»

 

Dr. Mawa SAMB

Formateur au Crfpe

mawa.samb@gmail.com

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