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Un Pèlerin À Tivaouane

Un Pèlerin À Tivaouane

”Ma porte est ouverte, je reprendrai a mon compte toutes les bonnes idées venant d’un Sénégalais quel qu’il soit, et j’ai pris note de votre appel à la paix et au dialogue qui sont d’ailleurs mes viatiques”…

Ainsi, s’exprimant devant le chef suprême de la confrérie religieuse des Tidianes du Sénégal, dans un Wolof dont il maîtrise les tournures, Macky Sall a montré hier soir qu’il savait être doux et enjôleur.

Il s’est rendu en visite privée, pardon en pèlerinage, a une centaine de kms de Dakar, dans la localité de Tivaouane, capitale du Tidjanisme Sénégalais, pour tenir ces propos.

Devant Serigne Abdoul Aziz Sy, le guide de la confrérie, entouré d’au moins trois de ses principaux lieutenants, tous membres de la famille du Fondateur du mouvement religieux au Sénégal, c’est un doucereux individu qui s’est donné à voir. On eût dit une poule mouillée…

Aucun signe de nervosité ne trahissait son visage, son plumage était rentré, une tarte d’humilité à la bouche. Les fanfaronnades n’étaient pas de saison. Il était la, respectueux, sans faire de remarque même s’il manquait au tableau autour de son hôte d’importantes figures du Tidianisme dont le fils du défunt Calife de la Tidiania, Serigne Moustapha Sy, que Macky disait devoir rencontrer impérativement -Faratala, lui avait-il glissé aux obsèques de son père, il y a un mois. Pourquoi n’y était-il pas? Bouderie? Time will tell. Quid de la descendance du très respecté Serigne Abdou Aziz Sy ”Dabaakh”? La aussi mystère et boule de gomme.

Mais au total, avant de clarifier ces absences, ce que l’on peut retenir, c’est que Macky, le ‘terrorisateur’, permettez ce néologisme, avait été remplacé par celui doux comme un agneau offrant meme son cou pour se faire égorger, si nécessaire, au nom de la paix. Ce paon était déplumé!

Conversion sincère ou ruse nouvelle? Peur-panique ou appel au secours d’un homme qui voit monter autour de lui les flammes de la contestation, de la résistance, avant celles d’un assaut final dirigé contre la citadelle branlante de son pouvoir, en deliquescence?

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On ne peut que se féliciter que de ce qu’il soit revenu sur terre pour comprendre que le Sénégal, comme dit la propagande électorale du passé, est une terre sèche, ou aucun œuf ne peut se permettre de faire du yoyo ou du ping pong. Le pire des dictateurs est forcé de se tenir coi dans ce pays au risque de se faire remonter les bretelles. Il en sait quelque chose!

Cela étant, et malgré les paroles de sagesse, incitant à la paix et à la concorde nationales, prononcées en réponse à la prêche, a l’apostasie vers la souplesse, de Macky, par le guide des Tidianes, on ne peut éluder certaines interrogations.

Pourquoi celui qui aimait tant jouer aux durs à cuir s’est-il rendu si urgemment, et platement, a Tivaouane? Au point d’en donner des explications emberlificotées ! ”Quand j’ai appris votre projet de venir à Dakar me voir, je vous ai supplié de me laisser faire le déplacement vers vous”, a assuré Agneau Sall au patriarche des Tidianes.

Sentait-il enfin le sérieux, la gravité de la situation pour contraindre un vieux de près de 90 ans à vouloir se déplacer de si loin pour lui dire des vertes et des pas mûres ?

Avait-il peur que celui-ci ne vienne à Dakar pour le rencontrer mais accessoirement aussi pour rendre visite a Khalifa Sall, ci-devant Maire de Dakar, son disciple, homonyme de son père, actuellement incarcéré, non sans raison, pour prévarication de deniers publics par le régime de son hôte d’hier?

Sans doute.

Ont-ils parlé de lui? Peut-être. Macky était-il allé montrer des preuves irréfutables au Calife pour enfoncer définitivement son protégé? Ou lui demander, à la sénégalaise, de lui permettre de dénouer tout cela en passant sur le cadavre de la Justice, justice instrumentale? Les récentes visites de leaders politiques chez le prisonnier ont du donner des poussées d’urticaires au pauvre President-perdu.

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Peu importe la substance de ses entretiens avec le Calife, toutefois, le fait est que pour rien au monde la libération d’un détourneur de deniers publics, fut-il Khalifa, Macky ou Karim, ne doit pas être la conséquence de tractations politico-religieuses ou diplomatiques.

Justice rigoureuse doit se faire, point à la ligne !

Tout ceci n’explique pas, en plus, la précipitation autour de cette visite. Est-ce l’effet Yenamarre, avec le million-man-march d’il y a six jours contre son régime, la férocité des attaques contre sa famille, son parti et lui-meme, notamment dirigées contre leurs malversations politiques et financières par trop nombreuses, les tractations au sein des partis d’opposition pour le mettre à la sauce degagisme aux Législatives puis à la présidentielle?

A-t-il peur?

Il aurait raison. Sa case à lui, Diogoye, brûle, il le sait !

Les vents ont en effet tourné. L’histoire de son pèlerinage, bien fouillée, pourrait même révéler qu’il en est si conscient que sa visite sur une terre religieuse a aussi pu être justifiée par son envie de solliciter des prières pour se tirer d’affaire. Sa mission étant maintenant surhumaine, il lui faut rien moins qu’une intervention, une onction, divine, pour respirer.

Or, depuis Cesar, le pauvre a oublié que Dieu, préfère rester loin de tout cela, de ces jeux temporels, sauf au Sénégal ou ceux qui se posent en représentants de Ses Enseignements restent en première ligne dans le débat politique voire politicien. Dieu ne bougera pas!

Macky se sent cerné, traqué, harcelé par un peuple déterminé à ne plus s’en laisser conter ni à le laisser dérouler ses micmacs cousus de fil blanc.

Bienvenue donc dans le Monde de la vérité, loin de celle, ouatée, des flagorneurs.

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Signe du sérieux qu’il attachait à sa visite d’hier, il n’était pas accompagné par le plus célèbre amplificateur de la parole des Chefs d’Etat et de la famille religieuse, le laudateur-en-chef de la nation, Mansour Mbaye. Pour leur donner meme un surplus de legitimité, les échanges de propos avec le Calife ont été en version originale. Inédit, preuve s’il en est que le temps des flagorneries est fini. Les choses sérieuses ont commencé.

Ce sont des temps qui exigent la transparence dans la gestion de la nation et de ses ressources, la démocratie sans entraves, les débats sans tabous sur des questions essentielles, de la diplomatie à la Commission électorale nationale autonome (quand les zombies qui y trônent vont ils dégager aussi?), au Contan et ses magouilles, au Cnra, au Pudc-arnaque, a la gestion anti-démocratique et opaque des médias d’Etat, aux inscriptions electorales frauduleuses, etc, à la pauvreté, aux détournements des deniers, par des contrats léonins, à l’immixtion de la famille de qui on sait dans les Affaires publiques, bref le temps d’aborder les enjeux essentiels de la nation dans un contexte mondial changeant est venu.

Lutte, il y aura…Chute de l’Agneau en vue. Au moment de l’Aid? Attention à la gorge! Couteaux bien acérés, nous restons vigilants, prêts à passer à l’action, bêlements de supplice ou pas…

Adama GAYE

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