Depuis 2013, une série d’incendies ravage beaucoup de localités du Sénégal avec des bilans désastreux et des dégâts matériels incommensurables. Celui qui venait d’endeuiller le Sénégal avec plus de 20 personnes calcinées tragiquement à Médina Gounass, cité de dévotion et de ferveur, avait interpellé tous les citoyens du Sénégal. A cela s’ajoute le violent incendie au Parc Lambaye à Pikine avec des millions emportés par les flammes… La responsabilité de chacun et de tous est interpellée en raison de la désinvolture et de la légèreté qui se soldent toujours par des conséquences calamiteuses vite mises sous la responsabilité de l’Etat ou, en guise d’exutoire, sur la puissance de la Volonté divine.
Des briquets jetés n’importe où, du bois attisé où l’on veut, des mégots de cigarettes lancées avec frivolité, des bonbonnes de gaz mis dans l’abime et des branchements électriques désinvoltes sont amplement les causes des nombreux incendies qui dévastent et annihilent des vies humaines.
Déjà, en octobre 2013, un violent incendie a ravagé le marché Sandaga, de la rue Emile Badiane à l’avenue Lamine Guèye en passant par la rue Sandiniery, laissant un bilan sinistre dont le seul souvenir lacère le cœur des victimes. Le 1er mars 2017, un autre incendie endommage la cité de Touba Tawfekh, dans le département de Mbacké au même moment où se déclarait, à quelques endroits, un autre braisier dans la même zone. Le marché des Hlm V de Dakar a également en un mois d’avril été abîmé par un incendie qui a mis en cendre des dizaines de cantines avec des dégâts incalculables. Un samedi 8 avril, alors que la Nation s’interroge, s’émeut et se désole de ces incendies qui se multiplient au Sénégal, le marché Zinc de Kaolack explose en fumée.
D’immenses biens matériels et commerciaux sont alors emportés par les flammes. Le lendemain, dimanche 9 avril, le Ranch de Dolly est envahi par un incendie d’une rare violence, un incendie difficile à éteindre en raison de la nature de la zone. Soixante Ha de terre herbacée étendue sur presque 10 km ont été ravagés et les soldats du feu n’ont rien pu faire.
Et voilà qu’en un mercredi 13 avril 2017, à Médina Gounass, cité de réclusion et de prière, un désastre dévaste, en feu et en sang, le dévot retranchement de citoyens musulmans. Des animaux domestiques en ont fait les frais et c’est épouvantable de constater que plus de 20 pèlerins ont été tragiquement calcinés, bloqués et asphyxiés dans les ténèbres des flammes jusqu’à subir une dramatique flétrissure. La Nation en est meurtrie.
Une enquête ne peut situer les culpabilités. Tout le monde est responsable. L’absence de sens du bien commun, le manque de citoyenneté, l’attachement à l’intérêt collectif et le refus atavique de se soumettre à un esprit de discipline ont alimenté au Sénégal une désinvolture qui aboutit soit à de catastrophiques accidents de la circulation, soit au brandissement d’une arme blanche, soit à un geste de légèreté qui provoque des incendies.
Aujourd’hui le quartier commerçant, communément appelé “Pack-Lambaye“, est l’une des plus grandes zones de stockage de bois. Une zone qui alimente la capitale Dakar en bois brut, mais également en meubles. Et c’est pour cette raison que l’incendie qui a débuté vers quatre heures ce vendredi matin a pris une grande ampleur et s’est propagé rapidement. L’incendie qui s’est déclenché n’a pas fait de victime. Mais les dégâts sont considérables. Une puissance du feu qui a fait que les soldats du feu ont dû batailler pendant plusieurs heures avec l’incendie. «Jusque dans l’après-midi, ce vendredi 17 novembre 2017, l’incendie est loin d’être maîtrisé même si la situation est sous contrôle», expliquait le colonel Coulibaly qui dirige les opérations des sapeurs-pompiers.
Ce quartier qui brûle est un secteur de 400 mètres de long sur 50 mètres de large, bien connu des Dakarois. C’est une zone difficile d’accès, des petites rues en latérite, des constructions anarchiques, tout cela a contribué à compliquer les opérations des sapeurs-pompiers qui ont finalement réussi à stopper la progression du feu.
La légèreté d’un geste peut toujours provoquer une calamité. Certains pays africains comme le Rwanda ont imposé la politesse du comportement dans ses lois et règlements de sorte que le respect du bien commun y est devenu culturel. Il est indubitable que les incendies que le Sénégal a connus ces derniers jours et celui, tragique, de Pack-Lambaye, Médina Gounass, des marchés Sandaga, Hlm et autres ne sont que les conséquences d’actes incivils, rudimentaires et défectueux.
L’Etat a beau sécuriser les cités et les lieux de rencontre de masses, mobiliser un arsenal de moyens sécuritaires, de modernisation et d’assainissement du cadre de vie et d’organisation de la circulation routière, seul un comportement civil, citoyen et respectueux des lois et règlements et du bien public peut endiguer le mal.
Babacar MBENGUE
Journaliste et consultant
en communication et relations publiques
babavero78@gmail.com