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Oser Revisiter Les Théories économiques Occidentales Sur Le Capital Humain

Oser Revisiter Les Théories économiques Occidentales Sur Le Capital Humain

Devant les difficultés de toutes sortes qui assaillent l’Afrique depuis les indépendances, le continent vient de trouver dans la formation professionnelle, une piste intéressante pour relever le niveau de ses capacités intellectuelles et techniques et ce faisant redresser une économie peu productive et mieux maitriser le taux de chômage. Cette orientation semble soutenue par la Belgique dont le ministre des Affaires étrangères, Monsieur Didier Reynders, déclarait à l’occasion des dernières journées européennes du développement tenues à Bruxelles les 5 et 6 juin 2018 que «la formation peut intervenir dans tous les domaines pour donner l’accès à l’emploi aux jeunes». La vision de la Banque mondiale consistant à favoriser la création de 19 centres régionaux d’excellence pour la recherche et l’éducation supérieure en Afrique centrale et de l’Ouest, afin de doter les jeunes africains des compétences nécessaires au maintien de la croissance économique vient confirmer une tendance. Il est vrai que depuis la formulation en 1961 du concept de «capital humain» par l’économiste américain Théodore Schulz, l’apport de l’expertise humaine sur les problématiques de croissance et de développement fait l’objet d’un consensus mondial.

La question est de savoir si cette vision occidentale du capital humain est une panacée comme de nombreux économistes veulent nous le faire croire. En mettant l’accent notamment sur la qualification professionnelle et l’éducation (notion relative) et en occultant l’impact culturel et géopolitique lié aux rapports de force entre pays dans l’efficacité du capital humain, cette théorie devrait être revisitée et réquisitionnée en ce 21ème siècle. L’exemple des pays africains ci-dessous exposé le dé­montre.

Depuis leur accession à la souveraineté internationale, les pays africains ont beaucoup formé dans plusieurs disciplines : matières littéraires, scientifiques et techniques. Des formations qui ont eu lieu sur le continent mais aussi dans des universités reconnues du monde mais dont l’impact dans le progrès des peuples africains reste faible. Les gouvernements africains jettent actuellement leur dévolu sur les activités de formation avec l’optique d’avoir plus de scientifiques que de littéraires, pour entre autres, permettre à la jeunesse d’accéder plus facilement à l’emploi. Cette orientation gagnerait à être infléchie pour quatre raisons.

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Premièrement des jeunes bien formés, l’Afrique en a suffisamment sur son sol et à l’étranger ; chaque année sur les 11 millions de diplômés qui arrivent sur le marché du travail, à peine 10% réussissent à s’insérer professionnellement. De nombreux jeunes africains formés par leurs pays partent en émigration et généralement pour exercer des métiers peu qualifiés, en déphasage totale avec leurs compétences. Cette situation de gâchis devrait s’exacerber à la lumière des prévisions du Fmi, qui tablent sur pas moins de 34 millions de migrants africains vers l’Europe à l’horizon 2025. Dès lors, nos gouvernants de­vraient revoir leurs politiques budgétaires en matière de formation afin que les investissements puissent être plus rentables économiquement pour l’Afri­que.

Deuxièmement, les problèmes de l’Afrique semblent aujourd’hui plus liés à des économies peu performantes, malgré les taux de croissance annoncés, qu’à une problématique de réponses adap­tées aux besoins d’emploi d’une économie peu productive. Le défi actuel est de donner plus de valeur aux économies. Il faut revoir les politiques en la matière, en résolvant au préalable des défis majeurs comme la transformation des matières premières locales, la promotion d’industries de substitution aux importations, la qualité des dépenses publi­ques, la transparence du management des sociétés publi­ques et privées et l’innovation en matière de stratégie économi­que.

Troisièmement, les vrais problèmes rencontrés par  l’Afri­­que  en matière de ressources hu­maines semblent plus relever d’une crise de valeur que d’insuffisance de compétence. Les programmes de formation ne peuvent avoir un impact réel sur le développement qu’une fois les questions liées à l’éducation morale, civique, culturelle et religieuses correctement prises en charge.

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Quatrièmement, l’Afrique n’a plus besoin de théories mais de pratiques qui pourraient être recherchées à travers la mise en place d’incubateurs technologiques dont l’objet serait d’aider les jeunes à inventer d’une part, à mettre en pratique leurs découvertes scientifiques et techniques d’autre part..

Par ailleurs, les budgets colossaux que les pays africains sont en train de consacrer à la formation technique et professionnelle mais aussi à des séminaires et colloques auraient pu être utilisés de manière tactique à créer plus de valeurs économiques, notamment en optant pour le redressement des entreprises en difficultés. Loin de nous, à travers ces quelques lignes, l’idée de battre en brèche l’importance de la formation. Notre proposition consiste à alerter sur la nécessite de bien penser la problématique en définissant rigoureusement ses objectifs et en s’inscrivant dans une stratégie globale bien ficelée en étudiant concomitamment les alternatives. La formation doit être au service de l’économie et des réels besoins exprimés par la collectivité, et ce grâce à une bonne logique d’anticipation et de méthode. L’Afrique doit éviter de former pour former. En Occident, les économies obéissant à une certaine rationalité et parfois performantes, génèrent des besoins d’emplois à court terme qu’il faut combler grâce au recours à des actions de formation ciblées ou en jouant sur la carte migratoire. En Afrique la problématique est différente. De nombreuses distorsions existent sur les marchés du travail, des biens et services et des capitaux, ainsi que sur les politiques publiques en direction du secteur privé.

Les gouvernements africains devraient à l’avenir chercher à utiliser plus efficacement les compétences disponibles, favoriser la mobilité des compétences à l’échelle africain voire recourir à la coopération internationale, ou encore favoriser un retour des cerveaux africains sur le continent. Cela peut être moins coûteux et plus efficace que ces programmes de formation. De notre point de vue, aussi une bonne politique de formation devrait avoir pour socle une politique d’auto-emploi efficace. Elle doit, outre des besoins sectoriels à bien identifier, notamment viser les métiers nouveaux tels que les corporations comme les artisans (menuisiers, ébénistes, maçons, mécaniciens, plombiers électriciens, etc.) qui ont de solides talents mais produisent encore insuffisamment en qualité et qui pourtant, pourraient rivaliser avec les meilleurs du monde.

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Des domaines comme l’auto entreprenariat et l’économie familiale gagneraient aussi à être bien explorés. Sur ce dernier aspect, l’unité micro économique de base d’un pays est constitué par ses familles ; que de gaspillage dans celles-ci  notamment en matière d’eau, d’électricité et de nourritures ; les familles devraient aussi être formatées dans des réflexes de responsabilité, notamment par le développement de petites activités économiques capables de valoriser les déchets domestiques, et dans la mise en œuvre des budgets familiaux.

 

Magaye GAYE

Economiste

Ancien de la Boad et du Fagace

Président du Parti sénégalais la troisième voie

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