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Présidentielle : Le Risque Du Parrainage Déguisé

«Que des hommes qui ont essayé de ‘’naufrager’’ notre République puissent, sans être inquiétés, prétendre nous donner des leçons de démocratie, voilà bien qui prouve que nous sommes, réellement, une démocratie !» Léopold Sédar Senghor, Sg Ups décembre 1976.

La séance de débat suivi de vote par l’Assemblée nationale de la loi portant parrainage des candidatures à l’élection présidentielle a été pour les acteurs politiques l’occasion d’apprécier la maturité du Peuple sénégalais. Les acteurs politiques croient dur comme fer que les Sénégalais sont obligés de répondre favorablement à leur appel à manifester contre les actes que pose le gouvernement et d’empêcher la mise en œuvre de ses projets par des moyens illégaux, quel qu’en soit le prix. A défaut, les Sénégalais passent pour des traîtres aux yeux de l’opposition, car ils sont convaincus qu’un 23 juin, les Sénégalais sont sortis uniquement sur leur demande pour s’opposer au vote par l’Assemblée nationale d’un projet de loi instituant un ticket présidentiel qui aurait permis au fils du président de la Répu­blique de se faire élire en compagnie de son père au sommet de l’Etat. Cette maturité des Sénégalais, certains l’ont apprise à leur dépens, et n’ont pas manqué de s’en prendre à ce Peuple qu’ils prétendent défendre à son insu, et face à l’ennemi imaginaire dénommée «chef de l’Etat». «Les Sénégalais sont des lâches, et les guides religieux, des complices du gouvernement», déclare Ki lit feu avant de s’excuser, sans pour autant se dédire.

Ce n’est pas tout. Les hommes politiques, membres l’opposition, de même que leurs alliés de la société civile, ont eu pour la circonstance la même attitude que le responsable de «Y’en a marre du rap», avec les mêmes convictions et exigences que les Sénégalais soient disposés au sacrifice ultime pour parrainer leur projet de conquête douloureuse du pouvoir. Ils dénoncent l’absence de démocratie, exigent le dialogue politique et refusent de répondre à l’invitation au dialogue formulée par le président de la République. Ils exigent du chef de l’Etat qu’il «abdique» ou à défaut demandent au Peuple de le démettre. Ils s’appliquent à démontrer au Peuple sénégalais, sans succès, mais avec une ténacité digne de Sisyphe, que le Sénégal n’est pas une démocratie. Faut-il les imaginer heureux dans cette posture, comme Camus l’avait suggéré pour Sisyphe ? C’est que toutes les situations ou décisions prises par l’autorité sont exploités par la gent contestataire à cette fin. Certains candidats à l’élection présidentielle n’ont aucun respect pour les institutions de la République, ni pour les hommes qui les incarnent et qu’ils ambitionnent de remplacer.

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Le président de la République est interpellé sans égard par les «guerriers» dont l’un, Monsieur Ousmane Sonko, a déclaré que «le Conseil constitutionnel ne sert à rien», avant de soumettre à l’institution sa candidature, sa caution et sa liste de parrains. Le Conseil constitutionnel servira au moins à valider sa candidature ou continuera de ne lui «servir à rien». Cependant, en s’exprimant ainsi et en agissant de la sorte, Monsieur Sonko donne raison à Monsieur Serigne Mbaye Thiam, ministre de l’Education nationale, qui déclarait récemment que «l’on ne doit élire quelqu’un président de la République et lui confier notre destinée juste pour essayer». La fonction est très importante et grave des conséquences de décisions que ce dernier, une fois élu, serait amené à prendre. Un chef d’Etat sans expérience et qui banalise les institutions est un danger.

La dernière désillusion de l’opposition remonte au 19 avril 2018, avec le vote du projet de loi instituant le parrainage pour l’élection au Sénégal. La mobilisation annoncée en grande pompe pour s’y opposer n’a pas connu de succès. Les Sénégalais savent que le parrainage, loin d’être un coup d’Etat institutionnel du genre 23 juin, entre en droite ligne du processus permanent de renforcement de la démocratie et de l’assainissement du système partisan parasité par le nombre élevé de formations politiques, et l’irruption dans la scène d’une société civile devenue méconnaissable à cause de ses positions également partisanes. Le parrainage n’est ni une particularité ni une nouveauté sénégalaise. Il a permis à un candidat indépendant, Maître Mamadou Lô, de se présenter à l’élection présidentielle de 1993. A l’époque, dix mille signatures étaient nécessaires à chaque candidat indépendant, et devaient être réparties sur la moitié des régions du pays, avec un minimum de cinq cents par région. Plus loin, en 1963, le parrainage de dix députés au moins était nécessaire à la validation d’une candidature à l’élection présidentielle. Les Socialistes avaient compris l’importance du parrainage dans le dispositif de renouvellement du personnel dirigeant sénégalais. Le parrainage renforce la crédibilité des candidatures et renseigne sur la notoriété des candidats. Il préserve le système politique des dérives de l’anarchie, contribue à la limitation des candidats, dissuade les chasseurs de Cv et les prétentieux qui se prennent à tort pour le nombril du pays. Il constitue également une riposte et un verrou face au risque dangereux du parrainage déguisé perceptible à travers des actes posés par les héros politiques nouveaux. Les cas de fonctionnaires de la hiérarchie A qui ont quitté l’Administration en rigolant et qui mènent jusque-là un train de vie dispendieux nous autorisent à penser que des moyens énormes sont mis à leur disposition.

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Par qui et dans quel but ?

Les Sénégalais doivent s’interroger sur l’origine de ces fortunes colossales qui permettent ce train de vie et qui intègrent le financement d’une campagne et d’une pré-campagne électorales, en plus d’une propagande permanente et onéreuse. Si j’étais téméraire, j’aurais volontiers affirmé qu’il y a des puissances financières «intéressées» derrière certaines candidatures, car je ne vois pas dans ce lot de prétentieux un seul héritier de Djily Mbaye, Ndiouga Kébé, etc., ni un capitaine d’industrie qui a vécu le temps et fourni l’effort nécessaire à la création d’un empire financier. Je ne suis que courageux. Aussi, me limiterai-je à craindre avec les Sénégalais conscients que certains candidats ne soient des victimes ou des complices instrumentalisés par des lobbys financiers sans scrupules, attirés par l’odeur du gaz et du pétrole récemment découverts dans notre pays.

Ibra FALL – Secrétaire général 22ème coordination B

Secrétaire chargé de la communication

Union départementale de Pikine

Parti Socialiste

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